Depuis que les monoplaces F1 2014 sont en piste, les pilotes ont appris à utiliser une méthode de pilotage différente, une habitude qui n'a pas été si facile à acquérir mais qui fut indispensable pour pouvoir exploiter pleinement le V6 Turbo Hybride équipant le plateau de la catégorie reine des monoplaces.
Imaginez vous tous entrain de conduire votre auto habituelle et d’actionner avec votre pied une pédale et l’auto réagit d’une façon inhabituelle, cela fait peur n’est ce pas?.
C’est ce qui arrive depuis Jerez 2014 (première sortie des F1 hybrides) à nos valeureux pilotes au volant des nouvelles créations de leurs écuries respectives.
En effet, commençons par la pédale d’accélérateur : Celle-ci est couplée bien sûr par le biais d’un capteur de position à effet Hall à l’ECU chargé de contrôler le régime moteur par rapport à la position de la pédale, mais cette dernière a une action sur le turbo et sa récolte d’énergie électrique (MGU-H). Lorsque le pilote appuie sur la pédale, la position de celle-ci est transmise aux différents éléments commandant le régime moteur : Soit la pompe à injection haute pression, les injecteurs et enfin le MGU-H.
Imaginons que le pilote appuie à fond sur la pédale d’un coup sec : Le signal envoyé donnera l’ordre d’avoir le débit maximum aux injecteurs haute pression et le moteur électrique du MGU-H fera monter le turbo immédiatement dans les tours maximum afin d’éliminer un temps de réponse trop long, bien évidemment, le boîtier de contrôle donnera le temps d’injection et le volume de carburant nécessaire au plein régime du moteur, tout en gardant une marge pour la limitation de consommation de carburant maximum autorisé pour une course.
Ensuite deux cas de figure se présentent, soit l’unité de puissance électrique ERS est lancée donc fournira de la puissance supplémentaire ou pas du tout (tout cela dépend du programme informatique initial calculé par les ingénieurs moteur et course pour chaque meeting). Donc à chaque appui à fond sur la pédale la réaction n’est pas la même.
Tout comme vous l’aurez compris chaque position de pédale est retransmise à l’instant T, donc si le pilote actionne sa pédale du point 0 au point 100% mais d’une manière progressive, les ordres données à l’unité de puissance iront donc de crescendo du bas régime vers le régime maximum.
Si le pilote lâche la pédale d’accélérateur, l’unité de puissance V6 ne recevra plus d’alimentation en carburant jusqu’à son régime minimum afin d’augmenter le frein moteur et d’économiser d’une manière optimale le carburant.
Pour la pédale de Frein :
Depuis le début des essais hivernaux 2014, nous lisons les commentaires des pilotes concernant le « Brake by Wire » et le fait qu’ils aient du mal à s’y habituer, à comprendre le frein électronique. Avant, même lors de l’époque de l’ABS, lorsque le pilote actionnait sa pédale de frein, celle-ci commandait d’une manière mécanique directement le Maître-Cylindre qui envoyait une pression plus ou moins forte d’huile de frein dans le circuit de freinage, et actionnant ainsi une poussée sur les plaquettes de frein par les pistons dans les étriers auxquels étaient appliqué la pression du fluide de freinage.
Depuis 2014 les freins arrières agissent de manière électrique et sont gérés électroniquement, mais ne pensez pas ABS, la philosophie est tout autre. Le Brake by wire est un système où le blocage est possible lors de gros et longs freinages.
Pour comprendre comment cela fonctionne, j’ai dessiné deux schémas :
Le système de freinage est divisé en deux parties séparées par un ensemble de câbles électriques (information de freinage). la partie de gauche est la partie information (calcul de force de freinage appliquée par le pilote), la partie de droite est la partie où le freinage est appliqué électriquement.
Depuis 2014, le couple moteur sur les roues arrières a considérablement augmenté et augmente toujours, du fait du moteur turbo-compressé, qui naturellement apporte plus de Nm (newton mêtre, unité de mesure du couple) qu’un moteur atmosphérique, et de l’augmentation de l’exploitation de l’énergie électrique qui s’ajoute à cette même force. Lors d’un freinage, une unité centrale (ECU) va calculer la force de freinage appliquée par le pied gauche du pilote et la retranscrire aux roues arrières d’une manière variable via le système Brake by Wire.
C’est à dire, si lors du freinage l’ERS (l'énergie électrique est restituée pour la propulsion) est en fonction, l’ECU va appliquer plus de puissance, et contrairement si l’ERS est en fonction "charge" du fait du décélération, ou dès lors du début du freinage en ayant bien sûr pris en compte la puissance d’appui du pied du pilote, au cas où celui-ci décide juste de ralentir ou de freiner d’une manière plus violente, la pression sur les freins arrière sera moindre car l'effet frein moteur sera pris en compte pour le calcul de la capacité de freinage des roues arrières.
D’après le témoignage des pilotes, cela n’a pas été facile de s’y adapter, tout comme l’accélérateur, la réaction suite a une manœuvre la pédale est différente si l’ERS est en action ou non.
Mais mieux encore, les actions sur les deux pédales en simultané mettent la cartographie en défaut. En effet les pédales donnent des ordres différents aux divers ECU (calculateurs) équipant l'auto en particulier dans les phases "charge" et "moteur" des MGU. Lorsque l'on pousse la pédale d’accélérateur le MGU-H lié au turbo entrera dans un mode moteur pour relancer le turbocompresseur afin d'éviter une latence dans l’accélération, une fois fait, il retrouvera son mode charge, afin de stocker de l'énergie électrique dans la batterie le MGU-K, qui lui, se contentera du mode moteur quelques secondes pour accentuer l'accélération du moteur thermique grâce à l'énergie électrique.
Lorsqu'on lève l'accélérateur le MGU-H passera en mode charge, le turbo-compresseur entrainera suffisamment le MGU-H grâce à l'inertie des turbines sauf peut être sur le Power-Unit Honda : à voir ici.
Le MGU-K quand à lui entrera en action en mode charge aidant, de ce fait, à ralentir la voiture comme décrit plus haut. Les deux derniers effets sont identiques lors de la phase de freinage pure.
Si vos pieds balancent sur les deux pédales en simultané, cela cause des effets "pervers" pour la gestion informatique et l'électrique de ces organes mais aussi annihile les effets du "brake by wire". Imaginez-vous de presser la pédale de gaz en phase de freinage même légèrement, comme l'ECU capte deux signaux contradictoires, il va essayer de gérer au mieux avec les organes qu'il commande.
Ainsi, si vous êtes en mode freinage, le MGU-K et H en mode charge, vous envoyez un signal de la pédale d’accélérateur, l'ECU va désactiver le mode charge du Kers, vous perdez donc cette amplification de freinage, votre pression de freinage appliquée sur les freins de l'auto va augmenter. Le Brake by Wire captant une perte de "frein moteur" et vous allez surchauffer vos freins mais aussi vous allez déconnecter le mode charge du MGU-H l'empêchant donc de stocker de l'énergie électrique dans la batterie.
Si un des capteurs de pédale est défectueux, ou même un mécanisme, c'est l'abandon assuré (cf. abandon de Nico Rosberg GP de Russie 2015), la voiture devenant incontrôlable et ce même s'il existe des programmes informatique dans l'ECU chargé de donner des priorités en cas de ce type de situation. Ces priorités imposés par l'ECU ne sont pas celles du pilote, celui-ci essaiera de les combattre et ce sera l'enchaînement jusqu'à ce que le calculateur impose des valeurs refuges (permettant de rentrer au stand).
Alors que l'on lit partout des déclarations qui disent qu'une monoplace de F1 est devenue trop facile à conduire, combinez ce que je viens de décrire à la perte d’efficacité aérodynamique et des pneus à fortes dégradations. vous comprenez dès lors que les pilotes de F1 d'aujourd'hui complètent à merveille ces machines complexes, mais efficientes !