En remportant son premier Dakar cette semaine en Arabie Saoudite, Yazeed Al-Rajhi a atteint la consécration ultime, confirmant son statut de cador de la discipline après une ascension fulgurante

Au terme de ce qui aura été le Dakar le plus exigeant de l'ère saoudienne de la course et probablement l'un des Dakar les plus exigeants de ces 10 dernières années, Yazeed Al-Rajhi s'est imposé après une bataille féroce avec Henk Lategan, remportant ainsi son premier Dakar. Déjà considéré comme un cador de sa discipline, le Saoudien a confirmé son statut et fait désormais son entrée dans le cercle très fermé des vainqueurs de Dakar, une consécration pour celui qui aura vécu une ascension folle, passant en 10 ans à peine de débutant complet à référence de la discipline. Celui qui a longtemps été classé comme un outsider ou un challenger est dorénavant devenu le nouveau roi du désert.

2015 – 2019, apprentissage à la dure

En 2015, Yazeed Al-Rajhi fait ses grands débuts au Dakar au volant d'un Toyota Hilux, une voiture qui à l'époque n'est pas encore la référence de la discipline. Si le Saoudien est déjà un pilote d'expérience en 2015, étant engagé en WRC et WRC2 depuis quelques années au volant d'une Fiesta R5 puis d'une Fiesta WRC. et cours également en rallye raid, et ce, depuis 2008, mais exclusivement sur des épreuves saoudiennes il n'en reste pas moins un pilote méconnu et pour qui tout est encore à prouver sur la grande scène mondiale du rallye raid qu'est le Dakar. En 2015, donc, c'est un Al-Rajhi déjà rodé mais pourtant inexpérimenté à l'échelle du Dakar qui débarque sur le plus prestigieux des rallyes raids. Malgré son expérience acquise depuis quelques années, il va devoir, comme tous les autres avant lui, subir la dure loi du Dakar, celle qui fait flancher même les meilleurs. Pour sa première participation, c'est un abandon mécanique qui prive Al-Rajhi de la ligne d'arrivée à Buenos Aires, mais malgré ça, le "jeune" Saoudien impressionne et se révèle comme la surprise du Dakar avec une victoire sur la huitième étape et une solide troisième position au général avant son abandon. Dès sa première participation, le Saoudien aurait pu glaner un podium. En 2016, Al-Rajhi vit un Dakar difficile. Pas de victoire d'étape, une arrivée à la onzième place du général et une troisième place sur l'étape 8 comme seul fait d'armes.

En 2017, et ce, jusqu'en 2019, Al-Rajhi change de monture et s'installe au volant de la Mini, délaissant son Toyota Hilux engagé en privé via sa structure Yazeed Racing. Dans l'affaire, le Saoudien devient pilote officiel de l'équipe X-Raid. Malheureusement pour lui, ces trois éditions ne lui souriront toujours pas. En 2017, c'est une anonyme 27ᵉ place qui attend le Saoudien avec un Dakar plein de galères. En 2018, dans un Dakar extrêmement exigeant pour l'ensemble des concurrents, le Saoudien abandonne. Enfin, en 2019, il y a du mieux, puisque Yazeed Al-Rajhi parvient à enregistrer une septième place au général. Sans victoire d'étape sur cette édition, Al-Rajhi montre en revanche que la régularité commence à venir. Avec l'expérience acquise depuis 2015, Al-Rajhi fait désormais figure d'outsider qu'il faut prendre au sérieux, car à présent capable de la jouer placé au général. Dans ces premières années, le Saoudien commence également à faire des apparitions dans les grands rallyes raids internationaux comme le Silk Way Rally.

Yazeed Al-Rajhi au Silk Way Rally 2016

Yazeed Al-Rajhi et sa Mini dans les dunes du Silk Way Rally 2016 aux côtés de l'armada Peugeot | © Bastien Baudin / DPPI / Red Bull Content Pool

2020 - 2022, le challenger dont il faut se méfier

En 2020, Al-Rajhi Toyota et le Hilux, mais cette fois-ci dans le giron de l'équipe Overdrive, la structure privée aux moyens colossaux et premier client de Toyota en rallye-raid, à tel point qu'aujourd'hui, Overdrive ressemble presque à l'antichambre pour accéder à un baquet dans l'équipe officielle Toyota. Désormais expérimenté avec cinq Dakar au compteur, Al-Rajhi fait figure de challenger, tant il semble désormais en mesure d'inquiéter les cadors de la discipline au classement général. Autre point important, le Dakar se déroule dorénavant en Arabie Saoudite, sur les terres d'Al-Rajhi. Sur cette édition 2020, Al-Rajhi frappe fort et termine à la quatrième place du général. En 2021, en revanche, c'est un Dakar contrasté pour Al-Rajhi. Malgré deux victoires d'étapes, il ne termine qu'à la 16ᵉ place. Enfin, en 2022, le Saoudien franchit un cap. Dans ce qui sera à ce moment-là son Dakar le plus abouti, Al-Rajhi se hisse à la troisième place du général. Auteur d'une course exemplaire, le Saoudien joue même des coudes avec Sébastien Loeb pour la deuxième place, avant de s'incliner pour de bon en deuxième semaine. Derrière Al-Attiyah vainqueur, Al-Rajhi est la meilleure deuxième Toyota de la course. En 2022, on le sent, Al-Rajhi est désormais en train de basculer dans une autre dimension, un sentiment accentué par l'arrivée de la nouvelle règlementation T1+ qui semble convenir à merveille au Saoudien ainsi qu'au Hilux qui s'impose alors comme la référence ultime de la discipline. En cette même année 2022, Al-Rajhi signe une quatrième place au Rallye du Maroc et une troisième place au Rallye d'Andalousie dans le cadre de la première saison du W2RC, le Championnat du Monde des Rallyes Raids de la FIA.

Yazeed Al-Rajhi troisième du Dakar 2022

Yazeed Al-Rajhi célèbre sa troisième place au Dakar 2022 | © A.S.O. / F.Gooden / DPPI

2023 - 2024, le challenger est désormais un cador de la discipline

Ces deux dernières années, Yazeed Al-Rajhi est officiellement entré dans une autre dimension. Après son podium au Dakar 2022 et sa saison de W2RC réussie, le Saoudien le sait, il fait désormais partie des meilleurs pilotes de la discipline. Pourtant, il démarre son année 2023 par un coup dur, puisqu'il termine à une lointaine 86ᵉ place au Dakar, la faute à une malchance constante, le Saoudien enregistrant problème mécanique sur problème mécanique cette année-là. Le reste de la saison est une formalité et une confirmation du nouveau statut d'Al-Rajhi. En W2RC, Al-Rajhi enchaîne les succès : victoire à l'Abu Dhabi Desert Challenge, deuxième place au Sonoma Rallyet quatrième place au Desafio Ruta 40. Troisième du championnat en 2022, Al-Rajhi termine cette fois-ci à la deuxième place.

L'an dernier, le Saoudien a réalisé sa saison la plus complète et la plus aboutie, malgré une terrible désillusion au Dakar. En tête de la course dès l'étape 3, Al-Rajhi réalise alors la course parfaite avant de tout perdre dans l'étape 6. Au détour d'une dune prise bien trop vite, le Saoudien se fait piéger comme un débutant et pulvérise son Hilux. Dans une année qui lui semblait destinée, Al-Rajhi repart du Dakar avec de gros regrets. Comme en 2023, le reste de sa saison sera d'une grande qualité. Deuxième à l'Abu Dhabi Desert Challenge, cinquième au Portugal, vainqueur au Desafio Ruta 40 et quatrième au Maroc, Al-Rajhi enchaîne les résultats et dispute le titre de champion du monde à Al-Attiyah jusqu'à la dernière course de la saison au Maroc.

Yazeed Al-Rajhi vainqueur du Desafio Ruta 40 2024 !

Al-Rajhi vainqueur du Desafio Ruta 40 2024 | © A.S.O. / E.Bauer / DPPI

2025 : la consécration ultime et la promesse d'une grande saison

Cette année, après 10 participations faites de hauts et de bas, Yazeed Al-Rajhi aura enfin réussi à remporter le plus prestigieux des rallyes raids, le sacre ultime pour tout pilote. Auteur d'une course que l'on peut qualifier de parfaite au vu de la vitesse affichée, de la régularité et de la stratégie, Al-Rajhi est allé décrocher, vendredi dernier, son premier Dakar et qui plus est sur ses terres. Après quinze jours d'une bataille de haute intensité avec Henk Lategan dans un Dakar palpitant qui aura vu les autres favoris tomber comme des mouches, Al-Rajhi aura joué son coup à la perfection. Désormais, il est entré dans le cercle très fermé des vainqueurs de Dakar et il confirme plus que jamais son statut de star de la discipline, ultra-favori sur chaque course aux côtés de Nasser Al-Attiyah, de Sébastien Loeb ou encore de Carlos Sainz. Alors que la saison de W2RC débute à peine et qu'elle promet d'être encore plus spectaculaire que les précédentes, Yazeed Al-Rajhi est plus que jamais favori au titre de champion du monde des rallyes raids.

Yazeed Al-Rajhi, au-delà du sport

S'il est un pilote aguerri et dorénavant un cador et même une star du rallye-raid, Yazeed Al-Rajhi est aussi un atout de taille pour son pays, l'Arabie Saoudite. Si le pays occupe à présent une place omnipotente dans le sport automobile, il n'en est encore qu'à ses débuts dans son objectif de devenir "un royaume du sport automobile", un objectif qui va bien au-delà du simple fait de vouloir devenir un pays référence dans le sport automobile, puisque cet objectif fait partie d'un plan bien plus global dans la stratégie géopolitique du pays. Si le pays possède dorénavant une place importante en sport automobile, que ce soit par sa présence massive en F1, l'accueil du Dakar depuis 2020 ou encore l'accueil d'une manche de la FIA Formula E, il manque encore beaucoup de choses à l'Arabie Saoudite pour devenir cette nation référence du sport automobile, dont un ou une pilote star, à l'exception de Yazeed Al-Rajhi qui est donc pour le moment le seul pilote majeur de l'Arabie Saoudite, le seul qui pour le moment, porte haut les couleurs de l'Arabie Saoudite aux quatre coins du globe. Si la victoire d'Al-Rajhi sur le Dakar 2025 est symbolique pour lui, elle l'est aussi pour son pays, qui place enfin l'un des leurs sur la plus haute marche d'une des courses automobiles les plus célèbres au monde, qui plus est à domicile. À l'image du jeune Saood Variawa qui a été l'une des révélations du Dakar 2025, Al-Rajhi pourrait bien inspirer d'autres de ses jeunes compatriotes saoudiens et saoudiennes à faire briller leur drapeau national sur les pistes et les circuits du monde entier.

Crédits photo de couverture: A.S.O. / C.Lopez.