Comme chaque année, cette première journée d'essais hivernaux, est l'occasion d'enregistrer le premier pic de curiosité frénétique chez les fans de Formule 1. Les serveurs fument puis sautent comme au bon vieux temps des standards téléphoniques les soirs de concours Eurovision.
Cette année, malgré un règlement technique stable, regardons quelles sont les nouveautés que nous réservent les constructeurs.
Haas F1 Team :
Tout d'abord honneur à l'équipe débutante qui a alimenté les discussions depuis près d'un an, Hass F1 team.
L'équipe de Gene Hass, dont Gunther Steiner occupe le poste « Team Pincipal » se construit sous la bienveillance de Ferrari, grâce à une partenariat technique très poussé. Il faut remonter loin en arrière pour trouver une telle collaboration. Car si l'on exclue ToroRosso qui utilisa les châssis dessinés par son écurie sœur qu'est RedBull, c'est vers Tom Walkinshaw et une Ligier qui héritait de nombreux éléments des Benetton contemporaines qu'il faut chercher pour retrouver une relation aussi étroite.
L'équipe Hass a tenu le devant de la scène médiatique du la F1 tout l'hiver en distillant une foule d'annonces plus ou moins maladroite. Gene Hass et Gunther Steiner ont multiplié les sorties médiatiques au ton belliqueux, avant de faire preuve d'un peu plus de modestie lors du dernier mois.
En dépit de toutes ces annonces, la VF16 toute fraîche ne semble pas tenir ses promesses, tout au moins visuellement. Bien que l'esthétique d'une monoplace soit subjective, la décoration de la VF16 paraît déjà un peu démodée. Et que dire de sa ligne ventrue, ses pontons de refroidissement sont larges et ronds, plus que toutes ses concurrentes dévoilées à ce jour.
Par le passé déjà, Dallara, l'entreprise Italienne spécialiste de la fabrication de monoplaces pour séries monotypes(Indycar, GP2, FR 3,5 V8, etc.) n'avait pas été en mesure de produire une monoplace performante sous les couleurs de HTR, la modeste équipe Espagnole apparue en 2009.
Mais le manque d'audace technique dans les lignes est décevant de leur part.
On sait également que Ferrari fournit l'ensemble du Power Unit et boite de vitesse, ce qui se traduit par une architecture comparable à la monoplace de l'écurie Italienne, la SF16-H, c'est visible entre autre grâce au grille d'extraction d'air chaud de part et d'autre du cockpit.
Mais la collaboration va très loin, car les VF16 semble équipée des suspension de la SF16-H rouge et blanche, au point que l'Américaine est affublée d'un affreux bossage qui semble improvisé pour cacher la suspension Italienne, un détail indigne d'une monoplace qui a passé 18mois en conception. En outre la Hass est même équipée d'éléments aérodynamiques tirées directement de la SF15-T que pilotaient Vettel et Raïkkonen en 2015. Ainsi les ailerons avant et arrière, ainsi que les déflecteurs de ponton semblent sortir des moules Italiens.
Au final, de par son manque d'audace et sa filiation poussée, la première monoplace de Hass est bien décevante.
Renault Sport F1 Team :
Deuxième caractéristique de cette saison 2016, Renault est de retour chez les constructeurs. Nous avons tous suivi la pénible agonie de l'écurie Lotus en 2015. Privée de financement par son propriétaire Gérard lopez et Genii capital, l'équipe a été sauvée de la faillite par le constructeur au losange au terme d'une interminable période de doutes. Que pouvons nous attendre d'une monoplace 2016, conçue autour d'un propulseur Mercedes et adaptée en toute vitesse au moteur Renault ? Surement pas la machine miraculeuse qui fera de Renault l'équipe championne du Monde 2016, mais nous avons vu en 2015, une monoplace performante malgré l'absence de budget développement voire même un budget fonctionnement insuffisant. Dans la lignée de la Lotus E23 dont elle dérive étroitement la Renault RS16 présente une ligne agressive, elle est dotée d'une suspension avant haut perchée pour dégager les flux aérodynamiques vers le fond plat et les entrées d'air des pontons. A noter que la RS16 est la seule monoplace à présenter une sortie de waste gate unique quand toutes les autres écuries présentent des sorties doubles. Bien que critiqué lors de sa présentation, la livrées noire, et peut être provisoire de la monoplace est élégante et moderne.
Scuderia Ferrari :
Du côté de Maranello, la première Ferrari conçue sous la responsabilité de James Allison a été détaillée par Guillaume Pruvost (cliquez ici) , elle signe un retour à une suspension avant à poussoir et se voit doté d'un moteur revue profondément. Le gain de performance ne pourra pas être aussi grand qu'en 2015, mais rien ne semble pouvoir empêcher le SF16-h de briller cette saison.
McLaren - Honda :
A Woking, la seconde McLaren Honda de l'ère hybride a été détaillée par Bill Suserg ( cliquez ici ), très performante dans certaines(rares) condition en 2015, gageons qu'aidée par un moteur Honda enfin au niveau de la concurrence, la MP4-31 retrouve le rang auquel prétendent habituellement les voitures de Ron Dennis
Sahara Force India :
La Force India VJM-09 est extrêmement proche de sa devancière. Toujours équipée du moteur Mercedes, la monoplace 2016 n'expose que peu de nouveautés. Des détails évoluent du côté des suspension, de l'arrière affiné ou encore des pontons remodelés avec leurs entrées d'air revues et dimensionnées pour coller au plus près des exigence du moteur en terme d'évacuation de calories. Mais souvenons nous que si sa devancière la VJM-08 avait souffert d'un manque de financement lié aux déboires juridiques et financiers de Vijay Mallya, propriétaire et actionnaire majoritaire de l'équipe, elle s'était malgré tout montrée performante dès que la version « Spec B » entra en piste. Le règlement évoluant peu, la solution adoptée par l'équipe en faisant l'économie de la conception d'une monoplace entièrement nouvelle sera peut être payante si le développement en cours de saison peut être assuré. On note tout de même que la monoplace qui roulait ce premier jour d'essai était équipé de vieux éléments aérodynamiques. En effet, c'est peut être pour éviter le scénario catastrophe vécu en 2015 quand Daniil Kvyat détruisit le seul aileron avant disponible chez RedBull, que la ForceIndia était équipée de l'avant dernière version d'ailerons.
Seule avec la Manor à être encore équipée d'un « nez » long, la VJM-09 présente néanmoins une pièce de carrosserie bien plus élaborée, présentant des « nose trills » facilitant l'alimentation en air de la face inférieure de la coque et un profil inférieure très sculpté.
Pour finir, en 2015, l'équipe utilisait deux versions de châssis, Nico Hulkenberg disposait d'un châssis allégé pour compenser son poids corporel plus élevé que celui de son équipier Sergio Perez. Ce ne sera plus le cas en 2016, l'équipe ayant jugé la rigidité du châssis léger suffisante, elle ne produira que cette version.
Scuderia Toro Rosso :
Chez Toro Rosso, malgré deux jeunes pilotes au style flamboyant , la saison 2015 fut jugée décevante. La responsabilité de cet échec fut attribué au moteur Renault, bien que l'écurie sœur équipée de la même motorisation ait marqué près de trois fois plus de points. Les relation distendues de manière irréversible avec le motoriste Français, le constructeur de Faenza a choisi de retourner vers son précédent motoriste, la Scuderia Ferrari. C'est une version de la fin de saison 2015 qui équipera la STR11, néanmoins ce moteur a subi quelques évolutions comme le démontre la présence d'une double sortie de waste gate comme l'autorise le règlement technique 2016.
Alors que la STR10 était très élégante, la nouvelle voiture de l'équipe de James Key semble devoir assurer un refroidissement moteur plus important, ses pontons apparaissant plus ronds . Si les entrées d'air des pontons sont réduites, c'est au détriment de la prise d'air moteur qui est certainement chargée d'alimenter l'échangeur thermique du moteur placé au centre du V comme c'était le cas chez ferrari depuis la saison 2014.
On note un capot moteur assez large mais dont la hauteur retombe rapidement à la manière de ce que fait Williams depuis quelques année. La STR11 rompt ainsi avec le schéma d'évacuation des flux d'air chaud adopté entre autre chez RedBull, le capot colle maintenant au plus près de l'échappement, abandonnant la forme de trèfle caractéristique du capot des années précédentes. Par ailleurs, comme c'était le cas McLaren en 2015, la carrosserie est détachée du fond plat, offrant ainsi un grand espace à la circulation de l'air sous la boite de vitesse. A l'avant, le nez de la voiture n'évolue que très peu, amis adopte un S Duct, pour améliorer les flux aérodynamiques sous l'avant de la coque.
Red Bull Racing Tag Heuer :
Du côté de RedBull après la pire saison depuis 2008, l'équipe doit se résigner à reconduire le contrat avec Renault pour au moins une saison supplémentaire, faute d'autre choix. C'est donc surement avec un peu d'amertume que fut lancée la conception de la monoplace 2016.
Après une peinture satinée chez Ferrari l'an passé, peinture censée offrir de meilleures images(sans reflets), redBull va beaucoup plus loin en adoptant une robe intégralement mate. A la fois sobre et moderne, cette livrée fera sûrement date en Formule et devrait être copiée dans un futur proche par d'autres équipes.
En observant la RB12, on ne manquera pas de remarquer son arrière extrêmement étroit, en totale rupture avec les monoplaces des saisons précédentes. Avec un peu de recul, il semblerait que le concept adopté par McLaren sur sa MP4-30 de 2015 fasse école. Visiblement les observateurs éclairés ont su mettre de côté les piètres résultats de la McLaren Honda sur la piste pour se concentrer sur des informations sectorielles qui mettent en avant les performance d'un châssis mal motorisé. A l'évidence Adrian Newey, dont le génie de la science aérodynamique ne souffre d'aucune discussion fait partie de ces observateurs.
Les entrées d'air minimalistes montrent les faibles exigences du moteur Français en terme de refroidissement. Le reste de la monoplace évolue peu, perdant néanmoins le S Duct à l'avant.
Mais comme je l'ai écrit plus haut, les ailerons de la saison 2016 et autres nouveautés aérodynamiques ne seront pas en piste cette semaine.
Un des particularités des RedBull est la longueur de ses tirants de suspension arrière qui activent des amortisseurs placés très en avant sous la boite de vitesse et près du moteur.
Cette saison sera cruciale pour RedBull, car on verra si le concept du châssis à l'assiette plongeante(rake ) est arrivé aux limites du développement possible ou si l'écurie devra chercher un nouveau concept pour l'avenir.
Williams F1 Team :
Du côté de Williams, c'est sur la stabilité que l'équipe à misé.
Comme chez ForceIndia, la monoplace conçue à Grove joue la carte de la stabilité.
Le parti pris aérodynamique de l'équipe, qui consiste à alimenter au maximum l'aileron arrière en exploitant un arrière totalement dépouillé est poussé à son paroxysme cette année. Aucune autre équipe ne va aussi loin, aucun aucun capot ne retombe aussi rapidement, collant aussi près au moteur et ses périphériques. L'une des détails subtils et élégants de la saison se trouve au dessus de la transmission de la FW38, à la manière des déflecteurs de pontons, cette pièce de carbone a pour but de stabiliser les flux aérodynamiques qui ont quitté le capot moteur, afin d'optimiser le travail de la face supérieur de l'extracteur et de la face inférieure de l'aileron arrière.
On note également que les écuries sont nombreuses à avoir abandonné les ailerons appelés « monkey seat » qui se trouvaient à la proximité immédiate de la sortie de l'échappement. Aucune raison réglementaire à cet abandon, mais tout simplement le rapport traînée/appui de cet équipement ne satisfait plus les équipes.
A l'avant, le nez de la monoplace évolue peu cette saison, il faut avouer que cette solution(néanmoins plus élégante en 2014) semble avoir fait ses preuve puisqu'elle a été reprise par d'autre écuries telles que McLaren ou RedBull.
La taille des entrées d'air des pontons semble diminuer, confirmant une tendance générale, d'exigence de refroidissement mieux maîtrisé.
L'équipe de Franck et Claire Williams a clairement annoncé vouloir ré-goûter aux joies de la victoire cette saison, les évolutions de la monoplaces suffiront elles à combler les lacunes de l'équipe dont la voiture manque d'appui de manière récurrente et dont la stratégie de course est parfois défaillante ?
L'avenir nous le dira.
Manor F1 Team :
Manor, l'équipé ressuscitée il a un an a vu ses sauveurs la quitter à l'automne suivant. L'équipe de Stephen Fitzpatrick a effectué un recrutement de grands nom durant l'intersaison.
Parallèlement, le moteur Mercedes en version 2016 a remplacé le moteur Ferrari utilisé sans évolution depuis 2014.
La monoplace présentée à Barcelone semble n'être autre que la version 2015 qui n'avait pu voir le jour, comme le démontre la mauvaise intégration des protections latérales de la tête du pilote, rare évolue du règlement technique de cette saison.
La Manor Mercedes MRT 05 est affublée des pontons les plus volumineux du paddock, l'arrière de sa carrosserie est également le plus large de toutes.
Pour finir cette monoplace est le seule avec la ForceIndia VJM-09 à présenter un nez long, son extrémité se positionnant au delà de l'aileron avant.
La Manor présente un design dans l'ensemble très simple, qui apparaît déjà démodé. La carrosserie presque exempte de sponsors, accentue encore la perception d'une monoplace très longue.
Il est impossible de savoir quelles sont les prétentions de l'équipe, mais la monoplace semble très modeste, et seul son moteur lui permettra peut être quelques éclaircies au cours de la saison.
Mercedes AMG Petronas :
Pour finir, du côté de Mercedes, le champion en titre, la W07 suit le tendance générale, son arrière s'affine.
A croire que la stabilité a été le leitmotiv de toutes les équipes motorisées par Mercedes, y compris l'équipe d'usine.
A défaut de rumeurs concernant les évolutions du moteur, à l'inverse de celles concernant le moteur Ferrari qui ont alimenté les discussions de l'hiver, il faudra dans un premier temps se contenter de commenter les seules modifications visibles.
La plus visible de ces modifications concerne la prise d'air. La version 2016 de celle-ci abandonne les « oreilles » latérales vue à plusieurs reprises. Plus volumineuse que la précédente, elle est de plus inclinée vers l'avant, sûrement pour plus d'efficacité. Elle est segmentée en son intérieur par la structure de sécurité qui forme un triangle. La grande section de la prise d'air ne permettant pas une résistance en accord avec les exigences des résistance imposée par la FIA tout en conservant un poids réduit(indispensable pour contenir le roulis à cette hauteur), l'équipe à fait le choix de séparer la fonction prise d'air de la fonction sécurité.
On remarque une sortie d'air chaud placée à l'avant des pontons sur leurs dérives latérales, elle rappelle un peu les sorties d'échappement à l'avant des Lotus R31 mais le but est certainement bien différent.
Première équipe à utiliser des triangles de suspension de grosse section en forme de wishbone, Mercedes persiste dans cette voie qui permet d'intégrer la transmission à l'arrière, mais au contraire de Ferrai, les biellettes de direction ne passent pas à l'intérieur du triangle. On note aussi que la W-07, comme sa devancière est équipée d'une crémaillère de direction en position basse, pourtant réputée plus sensible aux mouvements de la suspension.
Si l'avant de la carrosserie change peu, l'arrière par contre s'affine fortement dans les même proportions que la RedBull pour atteindre une largeur proche de la McLaren qui décidément fait école.
L'évolution du côté de Mercedes porte donc sur des détails(nombreux). La stabilité du règlement génère un resserrement des performances. Pour tenter de conserver son avance l'équipe Anglo-Allemande avait déjà effectué des essais de suspension après avoir remporté les titres de champion du Monde la saison passée. L'équipe peut compter sur un moteur à la fiabilité sans faille, mais dont la puissance sera probablement moins dominatrice que par le passé, nous verrons donc rapidement si l''équipe a tenté des paris osés pour s'assurer un troisième titre consécutif.
Patrice Véronel, responsable de la technique pour Franceracing.