On a entendu un Laurent Rossi (PDG d'Alpine) très critique envers ses troupes au micro de CANAL+, il enfonce le clou dans l'interview de Lawrence Barretto pour le site officiel de la F1, et menace de changements avant la fin de la saison.
Laurent Rossi a été très critique envers ses hommes pour ce bilan de début de saison, et en coulisses on comprend que l'organigramme d'Enstone risque de changer puisque le PDG d'Alpine a prévenu ses troupes qu'il y aurait des changements et ce avant même la fin de la saison.
Rossi prévient qu'il y aura "des conséquences"
Si Alpine a réussi son pari en 2022 de terminer devant McLaren au championnat avec la 4e place des constructeurs, on comprend que l'objectif de cette saison 2023 de conserver cette position sera compliqué, voire déjà compromis. Aussi, Laurent Rossi en profite pour menacer de conséquences en interne.
"Nous avons commencé la saison en retard sur les objectifs de développement", a déclaré Rossi lors d'un entretien exclusif au site de la F1. "Nous manquions de performance par rapport à ce que nous voulions être pour consolider la P4. Nous avons commis beaucoup d'erreurs, trop d'erreurs, au cours du week-end. Si l'on ajoute à cela une performance relativement faible et un manque d'excellence opérationnelle, on se retrouve dans une position difficile."
"L'année à venir s'annonce difficile. La saison est encore à ses débuts. Je ne veux pas baisser les bras, mais certaines choses doivent changer. Nous devons continuer à renforcer l'équipe pour retrouver la performance. L'une des choses qui doit changer, puisque c'est en grande partie la même équipe que l'année dernière, c'est l'état d'esprit. C'est quelque chose qui doit changer pour les membres de l'équipe actuelle et pour les nouvelles personnes que nous allons ajouter."
Qui est responsable sur le plan opérationnel ?
Il est clair que le Français est irrité par la situation et après avoir restructuré l'équipe et joué un rôle très actif pendant plus d'un an, Rossi a recruté Otmar Szafnauer depuis Aston Martin en tant que directeur d'équipe et s'est retiré pour s'occuper de son travail quotidien, à savoir la gestion d'Alpine Cars. Cela signifie-t-il que Szafnauer est responsable du mauvais départ d'Alpine en 2023 ?
"Il est responsable des performances de l'équipe, c'est son travail", déclare Rossi. "Il ne s'agit pas de se cacher. Otmar a été engagé pour diriger l'équipe, tout au long de la saison et des saisons suivantes, vers les objectifs que nous avons, c'est-à-dire progresser constamment, comme nous l'avons fait les deux premières années et monter sur les podiums, et c'est donc sa mission de redresser cette équipe et de l'amener à la performance que nous voulons."
"Nous avions une équipe qui s'est assez bien comportée l'année dernière, qui a obtenu la quatrième place, ce qui est la meilleure progression que nous ayons eue depuis longtemps. Elle était très prometteuse. Ce sont plus ou moins les mêmes personnes, donc je n'accepte pas que nous ne soyons pas capables de maintenir cela. Oui, c'est Otmar et le reste de son équipe, car Otmar ne fait pas tout à lui seul, mais c'est Otmar qui est responsable. Donc, oui, c'est la responsabilité d'Otmar."
Après un tel constat, la confiance existe-t-elle toujours entre Rossi et Szafnauer après un peu plus d'un an de collaboration ? "La confiance est quelque chose qui augmente avec les bons résultats et s'érode avec les mauvais", déclare Rossi.
"Tout le monde commence avec un capital de confiance qu'il faut ensuite gérer. Il y a un nombre limité de revers que l'on peut essuyer dans un sport, dans un monde de compétition, parce que cela se voit. Tout le monde peut savoir si vous allez dans la bonne direction ou non. Cela a un impact direct sur votre capital de confiance. Je dirais qu'Otmar est très capable, mais qu'il a une lourde tâche à accomplir" continue d'expliquer Rossi.
Faut-il remettre en cause le plan sur 100 courses d'Alpine ?
Ce week-end à Miami, Laurent Rossi (PDG d'Alpine) était présent, tout comme Luca De Meo (PDG du Groupe Renault), et avec les sommes investies à l'année (près de 500 millions d'euros, entre le budget plafonné, le développement et conception du moteur et du châssis, et tout l'opérationnel de l'équipe), il y a de quoi voir rouge quand tout n'est pas exécuté correctement. Aussi, un plan de 100 courses avait été donné pour que Alpine joue les premiers rôles en 2025, ce plan est-il toujours valide ?
"Je sais que l'on peut y arriver si l'on s'en donne la peine", affirme-t-il. "Les gens doivent comprendre que nous ne sommes pas là où nous devrions être. Enstone n'a jamais eu autant de ressources à sa disposition pendant un nombre d'années continu", déclare Rossi.
"Aston Martin a moins d'ingénieurs que nous, pour autant que je sache", dit-il. "Ils n'ont pas encore leur propre soufflerie, ils n'ont pas encore leur usine en marche. Ils ont accéléré le développement en s'entourant des bonnes personnes. Cela montre qu'il faut faire preuve de créativité et d'efficacité. C'est la règle du jeu, nous le savons. Alors non, je suis désolé, je ne crois pas à l'excuse des ressources."
Quant aux pilotes, Laurent Rossi se veut rassurant à leur propos en pensant que tous deux sont les bons candidats pour Alpine et qu'ils produisent le meilleur possible avec le matériel qu'on leur donne.
"Ils font leur part du travail, nous leur devons, ainsi qu'à Alpine, un meilleur niveau de performance", déclare Rossi.
Et il sait qu'Alpine doit prouver qu'elle peut fournir de bonnes voitures année après année si elle veut "être attrayante" et recruter de grands pilotes à l'avenir pour l'aider à passer à l'étape suivante. Et entre les lignes, on croit comprendre que Rossi pense que certains cadres de l'équipe ne font pas assez d'efforts et manquent de motivation.
"Surtout quand les enjeux sont si importants, vous avez réussi à obtenir un bon résultat (P4 en 2022), vous devriez être motivé pour le conserver, vous devriez vous battre pour rien de moins que la quatrième place et vous devriez donc éviter tout type d'erreur", ajoute-t-il.
Doit-on craindre qu'Alpine quitte la F1 ?
Cette accumulation de mauvais résultats et une déception globale, ne pourraient-elles pas aboutir à une décision du Groupe Renault de stopper les frais pour l'équipe Alpine F1 Team et de vendre la structure ?
"Non, il n'y a pas de risque. Il n'y a aucun risque. L'engagement est extrêmement fort. Nous savions que le chemin serait semé d'embûches. Je l'ai dit à l'époque quand il y avait de bons moments, comme la victoire en Hongrie, la quatrième place au classement des constructeurs l'année dernière."
"Nous savions qu'il y aurait des difficultés. Nous en avons. Et il y en aura beaucoup d'autres. Franchement, c'est la vie des équipes : Mercedes et Ferrari ont connu des hauts et des bas ces deux dernières années, un week-end ils sont des héros, un week-end ils sont des zéros. Nous fonctionnons à un niveau inférieur, ce qui m'agace, mais nous avons les mêmes hauts et les mêmes bas."
"Nous devons maintenir le cap. Il ne fait aucun doute que nous serons encore là dans dix ans. L'équipe changera, comme toutes les autres équipes, mais il s'agit de la renforcer pour qu'elle y parvienne le plus rapidement possible."
Pour l'instant, Rossi reste sur ses positions et ne change pas l'objectif de conserver la quatrième place au championnat des constructeurs, même s'il semble très improbable qu'ils puissent l'atteindre au vu de la hiérarchie actuelle.
"Il est trop tôt pour le faire, et je ne veux pas donner aux gens l'impression que c'est le cas", déclare-t-il. "Je n'entre pas dans une compétition et je ne change pas d'objectif parce que c'est plus facile. L'équipe a réussi à se hisser à la quatrième place. Elle a les moyens d'être quatrième, plus que d'autres. Je veux qu'ils soient quatrièmes. S'ils ne le font pas, ce sera un échec."
"S'ils échouent en donnant le meilleur d'eux-mêmes à 500 % et en redressant la barre, il y aura des circonstances atténuantes et ce sera de bon augure pour l'avenir. Si ce n'est pas le cas, c'est la règle des affaires, il y aura des conséquences. Et je n'attendrai pas la fin de l'année. La trajectoire n'est pas bonne. Nous devons changer l'état d'esprit de l'équipe au plus vite."