Simon Pagenaud a profité la trêve estivale en IndyCar Series pour revenir en France afin de célébrer sa victoire aux 500 Miles d'Indianapolis auprès des siens. Une tournée médiatique qui passait par sa ville natale, à Montmorillon où nous avons pu le rencontrer.
Un retour sur le sol européen pour y célébrer sa victoire à l'Indy 500, Simon Pagenaud a couru un véritable marathon médiatique mais avec bonheur et émotion. Il est le premier pilote a découvrir son visage gravé sur le trophée Borg-Warner hors du sol américain et avec un timing plus court qu'à l'accoutumé.
Simon Pagenaud a signé la pole position à Indianapolis, 100 ans après le dernier français à l'avoir fait, et s'est imposé 99 ans après Gaston Chevrolet. Présent dimanche dernier au Grand Prix de Hongrie où il a agité le drapeau à damier, il a fait le tour des rédactions en France pour répondre aux questions des médias, il nous a aussi accordé une entrevue.
Entretien avec Simon Pagenaud
Simon, cette victoire à l'Indy 500 doit vous enlever un poids, cet objectif désormais atteint, est-ce que cela va vous donner une façon différente d'aborder les prochaines éditions des 500 Miles d'Indianapolis ?
Pour l'heure, je suis concentré sur le reste de ma saison et la prochaine course de Pocono puis les trois dernières qu'il restera de la saison. Je ne suis pas encore dans la dynamique d'Indianapolis, mais quand la prochaine édition va se présenter, mon objectif sera de gagner.
Maintenant que j'ai remporté cette course une première fois, le désir sera encore plus grand de gagner à nouveau. Je sais ce que c'est et je veux le reproduire parce que ce sont des moments incroyables à vivre. Dans ma tête, maintenant que je l'ai gagné une première fois, j'ai l'impression que ça serait plus facile.
Depuis cette pole position acquise magistralement, est-ce que vous aviez un bon feeling pour vous dire que vous pourriez le faire, pouvoir décrocher la victoire ?
Oui, j'avais un très bon feeling depuis le début des essais, j'ai senti que la voiture me convenait parfaitement et j'avais une confiance incroyable. Je n'ai jamais eu une confiance telle, j'avais ce sentiment d’être en osmose avec la voiture, je faisais ce que je voulais en piste et comme je le voulais. C'est vraiment un gros avantage d’être en confiance car j'ai pu me concentrer sur les petits détails et ça m'a permis de gagner la course.
Le kit Aero Super-Speedway de 2018 a été amélioré cette année, l'ancien avait tendance à provoquer du sous-virage, les monoplaces étaient bien meilleures à piloter cette année ?
Oui, plusieurs facteurs y ont contribué, d'abord les nouveaux pneus Firestone étaient très bons pour ces conditions, puis la piste avait un nouveau revêtement, donc ça nous a aidé notamment pour doubler. L'IndyCar a amené une amélioration sur l'aileron avant aussi. Sinon par rapport à 2018 la voiture n'a pas beaucoup évolué, nous avions déjà la voiture pour gagner l'an passé et mon coéquipier Will Power l'a démontré.
Racontez-nous le Money-Time, ces derniers tours… Nous, on ne tenait plus en place, mais comment avez-vous géré ça dans la voiture, le fait de casser l'aspiration, vous aviez l'air à l'aise avec votre monoplace…
La gestion de course ça commence dès le drapeau vert, lors des 100 premiers tours on est tous en observation, moi j'avais décidé d'imprimer le rythme devant et aussi pour montrer à mon écurie que je voulais rouler devant, c’était le but. Dès le tour 120, ça monte d'un cran, on le voit à l'agressivité des pilotes, au tour 150 il reste 1 ou 2 arrêts donc c'est là que la course peut basculer.
Aux alentours du tour 170, c'est le dernier relais qui se présente, c'est là où on se donne à fond dans la bataille, on débranche un peu le cerveau. On va chercher les limites, certains pilotes qui sont trop aux limites engendrent des drapeaux jaunes. Dans les derniers tours, on a eu un drapeau rouge, après ça, moi j'ai pu faire ce que j'avais prévu, des manœuvres plus osées et amener la voiture à faire des choses peu naturelles, comme sortir des virages à l'intérieur ou casser l'aspiration en ligne droite.
Pour faire ça, il faut avoir une voiture stable et c’était mon cas. J'ai gardé un joker : le coup du dragon. J'avais étudié ce scénario en visionnant beaucoup de courses à Indianapolis, même les courses NASCAR, pour me préparer à cette situation et la course s'est déroulée exactement comme je l'avais imaginé. Le coup du dragon, ce double mouvement de gauche à droite en ligne droite pour casser l'aspiration, cela a déjà été vu les années précédentes mais j'ai poussé le concept à l'extrême, on peut y voir le mouvement qui imite un dragon. Je voulais surprendre Alexander Rossi, je ne voulais pas qu'il anticipe mes mouvements et c'est ce qui s'est passé.
Une victoire à l'Indy 500, est-ce que cela « sauve » une saison, une carrière ? Même si la vôtre est déjà un exemple de réussite, comment percevez-vous cela, à quel point ça impacte un pilote ?
Les 500 Miles d'Indianapolis c'est perçu aux USA et même partout d'ailleurs, comme étant la plus grande course du monde. Il y a plusieurs raisons, l’âge de la course, la première édition eut lieu en 1911, les traditions autour de la course (boire le lait sur la ligne d'arrivée...), la vitesse de la course qui est la plus rapide au monde aussi.
La tradition ensuite du visage gravé sur le trophée, le Borg-Warner (depuis 1935), c'est la seule course qui propose ça. Pour toutes ces raisons-là, c'est pour moi la plus grande course du monde. Lorsqu'un pilote remporte cette course, il rentre dans le club des vainqueurs, appelé « le club des Légendes des vainqueurs des 500 Miles d'Indianapolis ». Aux USA, les vainqueurs de l'Indy 500 deviennent des légendes, moi ça m'a changé la vie. Aujourd'hui j'en profite, je veux devenir le meilleur ambassadeur possible pour l'IndyCar.
Vous êtes en lice pour le titre et à 47 points du leader, il reste 4 manches… Savez-vous quel est le dernier pilote à avoir réalisé le doublé : Indy 500 et le championnat ? (Dario Franchitti – 2010). Et le dernier pilote Penske à l'avoir réussi ? (Sam Hornish Jr. – 2006).
Oui, je sais qui a fait ce doublé car c'est un de mes modèles d'ailleurs : Dario Franchitti (2010). Pour le pilote Penske, je dirais que c'est Gil de Ferran ? Non ? Ah... Dario Franchitti en 2006, je n'avais pas la référence. Cela fait 13 ans donc… Ah, tiens, treize, c'est parfait ça ! C'était ma 13e victoire, ma 13e pole position… donc tout est bon, les planètes sont alignées (rires) !
Vous êtes un touche-à-tout, du ChampCar à l'IndyCar, 4 participations aux 24 Heures du Mans, dont un podium au général, l'ALMS, l'IMSA, vous avez évoqué un retour au Mans pour y décrocher la victoire au général… quelle autre course manque-t-il à votre palmarès idéal ?
Oui c'est vrai que j'ai évoqué les 24 Heures du Mans, mais je dois tempérer un petit peu car je suis totalement concentré sur l'IndyCar et la conquête du titre… Je suis avec le Team Penske sur du long terme. Évidemment, les 24 Heures du Mans c'est un rêve car j'ai été tellement proche, mais il faudra que je trouve la bonne opportunité car je veux y retourner pour gagner, pas pour faire de la figuration.
Sinon, mon rêve serait de participer un jour au Rallye Monte-Carlo, le rallye est une passion, mais uniquement quand j'aurai le temps, lorsque je serai sans engagement. J'ai des personnes qui sont derrière moi, comme Hugues de Chaunac qui est totalement enthousiaste concernant ce projet…
Allez-vous offrir une réplique du Trophée à Norman (son chien, un Jack Russell) ?
Une réplique du trophée pour Norman, non sans doute pas ! Le trophée Borg-Warner appartient au circuit, il reste au Musée. Il voyage avec moi pour les présentations, moi j'aurai une version réduite, le « Baby-Borg », je devrais l'avoir courant du mois de septembre. Mais, non, Norman n'aura pas de trophée car c'est assez coûteux mais il a participé à cette réussite de toute façon.