Notre confrère Laurent Mercier, co-fondateur d'Endurance-Info.com, est à la tête du site spécialisé dans le monde de l'Endurance. Comment une passion pour le sport automobile peut-elle transformer le quotidien des amoureux de ces disciplines ?
Endurance-Info.com c'est la bible du monde de l'endurance, tout ce que vous devez savoir en temps réel s'y trouve. On ne devient pas le site n°1 de l'information sur l'endurance par hasard. C'est plus d'une décennie d'efforts, d'implication et de rencontres avec les professionnels du sport automobile que nous raconte Laurent Mercier.
Endurance-Info, Laurent Mercier
Comment se découvre-t-on fan de sport automobile ? Quel est le premier souvenir qui est l'élément déclencheur ?
Le premier souvenir, il est forcément familial car mon père a toujours travaillé dans le secteur de l'automobile. De plus nous habitions à deux heures du circuit du Mans, mon père allait voir la course depuis les années 60. Et ensuite, j'ai accompagné mon père aux 24 Heures du Mans, la suite est toute évidente !
C'était la course de l'année à ne pas rater, j'en ai été privé une année à cause des résultats scolaire. Ça ne s'est produit qu'une seule fois, parfois la passion peut aussi être bénéfique aux études. L'endurance a vite pris beaucoup de place que je n'ai jamais vu de ma vie un Grand Prix de Formule 1. Je reste focalisé à 100% à l'endurance, la F1 ne m'intéresse pas tellement, je continue mes rêves d'enfant.
Comment vît-on sa passion du sport automobile en étant jeune ? L'héritage paternel, le partage des émotions ?
Depuis tout jeune, en allant aux 24 Heures du Mans avec mon père, j'ai toujours pensé que je serai un jour de l'autre côté du grillage spectateur. Le partage de la passion arrive souvent lorsqu'un père amène son fils ou sa fille sur un circuit. C'est un moment exceptionnel, plein d'émotions, si on aime le sport automobile, c'en devient viral.
Pour en avoir discuté avec beaucoup de personnes, c'est le même scénario à chaque fois. L'héritage de la passion paternelle, transmisse pour les futures générations. Un bémol cependant aux courses d'aujourd'hui, où la transmission de cette passion peut s'essouffler. J'ai l'impression que l'on n'arrive plus à faire rêver les jeunes qui s'intéressent à la course automobile.
L'endurance ? "L'héritage paternel..."
Qu'est-ce qui a fait qu'un jour, Laurent Mercier, a décidé en se levant de vouloir s'impliquer dans le sport auto ?
C'est une histoire de rencontres et presque du hasard. Les premières courses auxquelles j'ai assisté en FIA GT en 2003 étaient les premières où j'ai rencontré des personnes, devenues des amis aujourd'hui. A Magny-Cours, puis Spa et Monza, je quittais pour la première fois la France pour assister à des courses.
Concernant l'implication dans la rédaction sur internet, ça ne s'est pas fait de suite. Nous étions aux débuts de l'internet, et peu de sites traités de l'endurance (virages.net), je consultais quotidiennement ce site à l'époque. Il y avait beaucoup d'informations et notamment des brèves (dont nous avons repris le concept).
C'est à Monza où j'ai assisté à la course, les personnes de "virages.net" n'étaient pas sur place, j'ai proposé mon aide, ils ont accepté avec plaisir. Par la suite, j'ai fais quelques courses, sur lesquelles j'ai été accrédité. C'était mes débuts dans le milieu du sport automobile en tant qu'acteur média.
Quelle est la motivation première qui fait que l'on veut devenir rédacteur pour un site internet ?
A la base, un site : info-course, tenu par Laurent Chauveau, devenu un ami et qui travaille toujours avec moi. C'était un site axé uniquement sur les 24 Heures du Mans, et les catégories endurance marchaient pas mal comme le FIA GT. La réflexion est partie de là, on s'est lancé sur plusieurs catégories, nous étions accrédités sur quelques courses. Les débuts faisaient quelques visiteurs, mais nous étions déjà heureux, et ensuite ça s'est développé. Sans Anthony Megevand, Laurent Chauveau, Julie Sueur et Claude Foubert, qui est toujours dans l’aventure, Endurance-Info ne serait pas là aujourd'hui.
Derrière un écran et un clavier, comment fait-on pour transmettre l'amour du sport automobile ? Quelle attitude faut-il adopter ?
Dans l'attitude, idéalement c'est de rester le plus neutre possible, ce n'est pas toujours évident. Mais il est inutile de s'insurger à tout-va contre les pilotes ou les directeurs de course, ce sont des métiers compliqués, et il faut raisonner intelligemment. La situation peut paraître plus complexe qu'elle n'y parait lorsqu'on n'est pas immergé directement dans le milieu où se déroulent les actions. Il faut écouter les acteurs de sport automobile, et retranscrire le mieux possible.
Quant à transmettre l'amour du sport automobile, il faut tout mettre en œuvre pour faire rêver le public. C'est aussi ça la passion des courses, il faut avoir des histoires à raconter, je m'aperçois qu'il y en a de moins en moins.
Endurance-Info.com, c'est une histoire de rencontres
Qu'est-ce qu'il faudrait changer dans le sport auto et certaines disciplines pour que ces dernières soient mieux assimilées du public. Ne manque-t-il pas parfois un trait d'union entre le spectateur et les organisateurs des championnats ?
Je pense qu'il faut s'inspirer de ce qui marche ailleurs, si on ne le fait pas, on va dans le mur. En Europe, la mentalité est totalement différente des États-Unis, eux ont su garder l'aspect "proche du public", nous en Europe on ne l'a pas... ou moins. Pour moi, les personnes qui se déplacent sur les circuits n'en n'ont pas pour leur argent. Ils n'ont pas accès aux voitures, de moins en moins accès aux pilotes, il y a trop de zones inaccessibles.
C'est peut-être compliqué d'appliquer la même recette en Europe. Aux USA par exemple, à Daytona, le public peut aller sur la grille de départ avant la course, aux 24 Heures du Mans ce n'est pas possible. Mais pour être objectif, c'est compréhensible dans le sens où il y a eu des vols par le passé auprès des écuries dans les stands. Au Japon je constate aussi ce grand respect, mais des anecdotes de vols dans les paddocks de Spa-Francorchamps, j'en ai entendu.
Comment voyez-vous le futur proche de l'information sur internet, qu'est-ce qui pourrait modifier notre façon d'informer ?
Premièrement, il faudrait arrêter d'aller à la chasse au scoop. Il faudrait informer et ne pas vendre du vent, beaucoup de sites essaient de s'accaparer une info. L'information, une fois sur internet, elle n'appartient plus à personne. Les formulations "comme annoncé précédemment par nos soins" ou autres dans le même genre sont à proscrire. Soit on a l'information et on la diffuse, soit, on ne la diffuse pas. Mais il est inutile de rameuter le peuple avec du scoop : on ne fait pas du scoop, on fait de l'information !
Ce qu'il faut éviter à tout-prix, c'est de se focaliser sur les têtes d'affiche. Il faut aussi parler des équipes privées, ce sont elles qui font le plus gros effort pour participer aux événements. Elles ont besoin qu'on parle d'elles, qu'on fasse leur promotion. Sans les équipes privées, le château de cartes s’écroule.
"On fait de l'information, pas du scoop..."
Endurance-Info continue de croître, un nouveau site dédié aux compétitions Classic va naître, quel est le but à terme de la famille Endurance-Info ?
Pas de réponse immédiate au futur d'Endurance-Info, en revanche l'historique développe vraiment l'engouement des passionnés. Il y a énormément d'histoires à raconter, alors ces formules Classic sont très intéressantes. C'est peut-être un peu l'avenir du sport automobile.
Si vous n'aviez pas été en mesure de faire cette activité de journalisme sur Endurance-Info, quel aurait été votre métier ?
... Comme tout le monde, je voulais être pilote ! (Rires...). C'est évident, non ? Ça paraissait simple d'être pilote avec nos yeux d'enfant, un bolide, un volant et il faut rouler vite. Tout le monde veut faire ça !
Finalement, je me contente d'un carnet et d'un crayon.
"Je voulais être pilote de course..."
Qu'auriez-vous à conseiller aux jeunes qui veulent couvrir les événements en sports mécaniques ?
Il faut s'intéresser à un tout, si on décide de choisir l'endurance, il ne faut pas se focaliser sur les courses les plus représentées. Il y a une multitude de championnats, mais il faut élargir au maximum ses connaissance. Intégrer une rédaction ce n'est pas facile, il faut savoir montrer ses capacités à couvrir les événements.
Il faut parvenir à écrire, mais ce n'est pas facile, il faut se déplacer sur les meetings. Nous avons mis un certain nombre d'années pour avoir la confiance des gens et pour pouvoir en faire un vrai métier. Il faut être conscient que ce métier est très chronophage, c'est à part, c'est un style de vie très spécial.
Si je prends mon cas particulier, je suis hors de France près de 200 jours / an, et en dehors de chez moi presque 300 jours / an. Ce n'est pas un métier si facile qu'il n'y parait, c'est un choix de vie.
Ce métier doit rester d'abord une passion, c'est un vrai métier, j'ai une Carte de Presse, mais ça reste d'abord une passion malgré l'investissement en temps que cela demande. Il ne faut pas que cela devienne une contrainte, ce n'est pas simple à gérer.
Merci Laurent Mercier pour cet entretien, nous partageons tous la même passion mais avec des implications différentes. Ceux qui sont derrière les écrans à vous retranscrire ces informations, essaient au mieux de vous transmettre leur amour et leur passion des sports mécaniques.