Nous le savons tous, la place des femmes dans le sport automobile est fragile voire anecdotique. Pourtant, quelques femmes se battent au milieu des hommes, avec la même envie et la même soif de vaincre. Mais leur chemin est souvent bien plus compliqué que celui d'un homme car aux traditionnels soucis de financements s'ajoutent des préjugés qui collent encore et toujours à la peau de ces femmes.
La F1 est l’objectif principal de tous les jeunes pilotes aujourd'hui, qu'ils soient hommes ou femmes, mais ces dernières peinent à se faire remarquer autrement que par l'intérêt marketing qu'elles apportent. Qu'elles s'appellent Beitske Visser, Susie Wolff , Tatiana Calderón, Alice Powell ou Simona de Silvestro, elles sont talentueuses et visent les sommets, mais doivent composer avec le fait d'être une femme dans ce qui est encore trop souvent un monde d'homme, et cela dès le plus jeune âge.
La pilote colombienne Tatiana Calderón, qui pilote en EuroFormula Open avec Teo Martín et en GP3 avec Arden cette saison, ambitionne clairement un volant en F1. La pilote de 23 ans, dont le meilleur résultat est une deuxième place en MRF Challenge Formula 2000 (saison 2015/2016), vise clairement la F1, tout en estimant qu'elle doit encore prouver être capable de tenir à un très haut niveau de compétition. Mais tout le monde sait que pour accéder à la F1 le seul talent ne suffit pas. Pour Tatiana Calderón les femmes sont tout à fait capables d'affronter les hommes, mais elles doivent cependant à chaque nouvelle équipe, chaque nouvelle série qu'elle tente, prouver encore et encore qu'elles y ont leur place. « Accéder à la F1 est compliqué, peut importe le genre. Il y a moins de femmes en sport auto donc il y en a encore moins qui atteignent les sommets. » dit la colombienne dans une interview accordée à The Typewriter en mai dernier. « Doucement mais sûrement, les portes s'ouvrent » pour les femmes pilotes en F1, ajoute-t-elle.
Simona de Silvestro est, avec Susie Wolff, la dernière femme pilote a avoir eut la chance de passer des tests pour la F1. En 2014, la pilote suisse devient pilote d'essais de l'équipe Sauber avec pour la suite un volant de titulaire, ce qui malheureusement ne sera pas concrétisé, l'équipe Suisse étant en proie à des difficultés financières. L'actuelle pilote Formule E avec Amlin Andretti et ancienne pilote Indycar, rate donc la dernière marche en raison non pas de son talent mais de manque de moyen. Être une femme devrait pourtant être un avantage marketing dans un univers dominé par les hommes, tant les sponsors sont nécessaires pour financer les différentes saisons. Plus d'exposition permettrait d'avoir plus de sponsors et donc un budget plus intéressant pour les équipes. De quoi favoriser la progression des femmes ? Pas vraiment car la garantie de piloter n'est pas là et les sponsors deviennent alors frileux. Ce qui doit être un avantage ne l'est finalement pas. Les femmes pilotes, même avec une exposition médiatique plus importante, ne sont pas certaines d'obtenir les faveurs des sponsors et des équipes.
Alice Powell, qui a remporté la Formule Renault BARC en 2010 et la Formule Renault Asie en 2014, est la première femme pilote à marquer un point en GP3 (2012) avec Status. La pilote anglaise estime être très difficile pour les femmes pilotes d'avancer en sport auto, mais cela n'entrave pas ses ambitions. Le sport auto est physique, et les femmes doivent donc s’entraîner plus pour compenser la différence de masse musculaire en leur défaveur. Pour Simona de Silvestro, il n'y a pas de différences physiques entre une femme pilote et un homme pilote une fois la visière baissée. Il y a de plus en plus de femmes pilotes dans toutes les catégories de sport auto. Les temps changent et les mentalités évolues, et pour la pilote suisse, les femmes doivent juste montrer ce dont elles sont capables.
Le plus important pour ces femmes pilotes est juste d'être la meilleure en piste. Beitske Visser, compatriote de Max Verstappen et pilote Teo Martín en Formula V8 3.5 cette saison, ne considère pas son genre comme un handicape. Pour elle, être une femme ou un homme revient au même, il faut être le/la meilleure, peu importe contre qui. « Depuis que j'ai 5 ans je pilote contre des garçons, je ne connais rien d'autre que ça. Pour moi ça ne compte pas que je sois une fille. Je ne veux pas être la meilleure des filles, je veux être la meilleur tout court. » dit-elle dans une interview à France Monoplaces.
Mais pour cela il faut que les pilotes puissent montrer tout leur talent et leur travail. Il apparaît alors nécessaire d'aider ces jeunes pilotes à progresser au mieux au travers des différentes séries. C'est pour cela que Susie Wolff, ancienne pilote d'essais de Williams en F1, a créée « Dare To be Different » qui a pour but d'aider et soutenir les jeunes filles pilotes. La pilote de 33 ans, dont le meilleur résultat est une 5e place dans le championnat de Formule Renault UK en 2004, estime que la F1 est prête pour une femme pilote, mais que le manque de jeunes filles pilotes retarde l'échéance. Il y a trop peu de jeunes filles dans les formules de promotions où la misogynie est encore trop présente. Les jeunes garçons y sont alors conditionnés à ne jamais devoir se faire battre par une fille. De quoi entretenir la difficulté d'une certaine égalité des genres dès les premières compétitions. Dare To be Different a donc pour objet de valoriser l'image de la femme dans les sports auto et d'aider les jeunes filles pilotes à exister pleinement dès les formules de promotions. Tatiana Calderón apporte son soutien au projet de Susie Wolff et ajoute « Mon seul conseil serait de véritablement oser être différente et de suivre sa passion ; si c'est le sport auto alors va-y et suis tes rêves. »