Depuis la saison 2024, Jérôme Policand et ses troupes de son équipe Akkodis-ASP Team se sont lancés à l'assaut du WEC. Après une saison d'apprentissage, l'équipe de Rabastens marque désormais son territoire.
24 Heures du Mans
On vous sent heureux d'être ici ?
Le Mans c'est extraordinaire, tu sens que c'est quelque chose de fort. Certains membres de l'équipe découvrent l'épreuve et ils sont un peu ébahis. Ils connaissent le sport automobile, mais là c'est une autre dimension. Désormais, je suis plus centré sur la compétition, non je ne connais pas tout par coeur, ce n'est pas non plus de la lassitude, je suis juste moins surpris.
La journée test été positive pour vous ?
La journée s'est bien passée et je ne cache pas qu'avec José Maria Lopez nous avons tenté un run de qualifications avec peu d'essence et des pneus neufs. Je m'attends à un sursaut de la concurrence mais pour moi le premier objectif de la semaine est rempli, nous avons la compétitivité attendue.
La saison 2024 n'a franchement pas été facile pour votre équipe...
C'était même laborieux, on peut le dire. Mais cela reste le sport auto. Signer avec Toyota est une chance absolue pour nous, rouler en WEC, venir au Mans... On existe depuis 25 ans, nous étions venus en 2014 mais nous étions surtout des spécialistes du GT3. Avec AF Corse et WRT nous sommes les plus vieux teams dans la discipline. Quand j'ai vu en 2022 que l'ACO se penchait sur le GT3, je n'ai pas voulu rater le train !
Nous avons donc poussé à fond pour obtenir le soutien d'un constructeur. Nous avions une relation avec Mercedes mais en entamant le chapitre Toyota, nous sommes repartis sur des bases complètement nouvelles, la dernière saison de ces voitures en Europe remontait à 2019. Et je peux le dire, notre simple présence au Qatar en 2023 était un vrai challenge. Préparer le team, le matériel, la logistique, ré-homologuer la voiture. Sur les 5 premiers mois nous faisions ce qu'il fallait pour "être là".
Il nous restait à comprendre la voiture, que le championnat se fasse aux GT3. Mais finalement nous avions quand même remis les choses assez rapidement. Au Mans nous avons mené une cinquantaine de tours, sans la perte d'un attache capot à quelques heures de l'arrivée, on jouait le podium.
Du point de vue de la voiture, la Lexus a 10 ans mais elle a été conçue comme un proto. C'est une très bonne voiture, mais assez lourde et avec beaucoup de poids sur l'axe avant. Sur des circuits comme COTA, Interlagos où Fuji où nous avons rencontré des températures élevées, on en a bavé... La voiture pouvait être compétitive mais la surchauffe des pneus avant ne nous mettait pas dans la bonne fenêtre.
Nous connaissions donc notre niveau de performance mais nous n'avions pas pu réellement le démontrer. Cet hiver nous avons testé à Bahreïn, nous avons également réalisé des essais aéro en ligne droite à Lurcy-Lévis. On a cherché de l'amélioration dans tout les domaines. Nous n'avons pas gagné une seconde mais en sport auto si tu gagnes 3/4 dixièmes, tu exploites mieux ta voiture et tu reviens dans le match.
C'était un risque car en GT World vous maîtrisiez votre sujet !
Cette saison dernière nous a marqué mais effectivement en GT World, quand nous ne gagnions pas, nous faisions 2. Cela a été plus dur pour l'équipe que pour moi. J'ai 35 ans de sport auto, j'en ai vécu des saisons galère, en tant que pilote, directeur de team. Les personnes jeunes de l'équipe ont uniquement connu la période dorée avec Mercedes en GT World où certains étaient déçus après une troisième place.
Mais l'important était leur réaction, et leur réaction a été bonne. Cela montre la force d'une équipe. Nous étions dans le dur et nous sommes revenus, cela prouve que le travail paye.
En 2026, une nouvelle GT3 du groupe Toyota doit arriver. Avez vous été impliqués ?
L'an dernier nous avons été impliqués sur trois séances d'essai où nous avons fourni le support logistique. Pour la conception de la voiture, cela se joue entre le Japon et TGR en Allemagne. Nous avons vu cette nouvelle voiture donc, une voiture très moderne et plus tôt nous l'aurons plus tôt nous serons contents. Attention, cela reste néanmoins une grosse satisfaction de réussir à faire fonctionner la Lexus ! Ce n'est pas comme si nous attendions un messie qui nous ferait changer de statut. Nous sommes concentrés sur notre saison et on commencera sans doute à en parler un petit peu plus après le Brésil.
Vous savez je suis d'un naturel asse confiant. Je suis plus du style "ah tiens le constructeur me demande de faire le Dakar, et bien je le fais" (rires). C'est vraiment une chance pour nous d'être liés à un constructeur.
Vous avez fait une bonne pioche en faisant rouler Finn Gehrsitz ! Si on suivait le GT on connaissait son nom mais ce n'était pas celui qui nous venait au moment d'ébaucher un line-up...
C'est un peu une marque de fabrique de l'équipe. L'an dernier nous avions Esteban Masson. J'ai été pilote, et ce n'est pas pour leur faire plaisir mais quand on voit des jeunes pilotes talentueux qui n'ont pas forcément les moyens où qui ne se sont pas retrouvés au bon moment au bon endroit, et bien on essaye de les faire monter à un autre niveau et leur donner une chance.
Par le passé on a eu Morgan Moulin-Traffort, Kévin Estre, Tristan Vautier, Felix Rosenqvist que nous avons participé à relancer après qu'il ait perdu son volant en DTM. Raffaele Marciello a passé 7 ans chez nous... On fait du GT, mais sans être présomptueux, du karting à la F2, je suis attentivement. Je vois donc des pilotes brillants qui un jour se retrouvent sur la touche. Finn nous a signé une belle pole position à Spa et il se révèle peu à peu. Cela fait plaisir de voir ce jeune pilote performer sur cette voiture qui n'est pas facile.
Un double programme WEC et GT World vous tenterait ?
C'est clairement l'objectif. Aujourd'hui ce n'est pas possible avec la Lexus, il nous faudrait plus de châssis disponibles pour un double programme, nous avons un problème de pièces détachées également et ça aurait été risqué. Mais il ne faut pas oublier non plus nos programmes GT4 et GT2. Mais avec la nouvelle voiture, il est clair que nous souhaitons retourner en GT World Challenge en parallèle du WEC.
Les années se poursuivent et le soutien de Minerva Oil ne faiblit pas, une belle relation ?
La plupart de nos partenaires nous soutiennent depuis de nombreuses saisons et cela fait aussi la force de l'équipe. On reste une petite équipe en soit mais nous avons des soutiens fidèles. Les 24 Heures du Mans c'est très important pour Minerva Oil, être en FFSA GT c'est important pour eux également et on discute d'un retour dans ce championnat l'an prochain.