À compter de l'année prochaine, la célèbre passerelle Dunlop va changer de nom pour devenir Goodyear. L'édifice en lui-même restera en l'état, mais le nom qui y est apposé est le vestige de nombreuses ères de la plus grande course d'endurance au monde.

Ah cette passerelle Dunlop...Elle est devenue reconnaissable entre mille avec les années, en particulier avec la décoration à l'effigie du manufacturier de pneus britannique. Il fera très bizarre de la nommer passerelle Goodyear l'an prochain, alors que la première courbe du circuit est désignée par "La Dunlop". Un changement de nom symbolique, qui clôt d'une certaine manière tout un pan de l'histoire des 24 Heures du Mans.

Apparition après-guerre de la passerelle Dunlop

La seconde guerre mondiale a fait des ravages au Mans et le circuit lui-même avait été bombardé par l'armée allemande, laissant un vaste champ de ruines. Mais lorsque le conflit fut terminé, l'heure était à la reconstruction.

Les préparatifs ont eu cours de 1945 à 1949, année où les 24 Heures du Mans allaient enfin reprendre, après des années passés sur les fronts. Et l'un des ajouts du circuit allait se situer au sortir de la première courbe : une passerelle reliant l'intérieur du circuit à l'extérieur, qui allait être affublée d'un nom déjà bien connu : Dunlop.

Cette passerelle, sous ce nom, se situait juste devant l'ancienne tribune de presse, aujourd'hui devenue tribune Goodyear, face à la première chicane. Elle a elle aussi connu le circuit du Mans à l'époque où la courbe Dunlop conduisait directement, sans chicane, aux esses de la Forêt. Cette décoration Dunlop a bien entendu connu, d'un peu plus loin, l'immense tragédie des 24 Heures du Mans 1955, dont nous vous avions rappelé le déroulé en juin dernier, pour les 70 ans.

Dunlop surplombe les chicanes

Il fallut attendre 1987, à la demande de la Fédération internationale de motocyclisme (FIM) pour que la courbe Dunlop soit refermée et stoppée dans son parcours par la fameuse chicane, ayant évolué entretemps. Reste que cette passerelle Dunlop était toujours là et a même été témoin de l'apparition, en 2002, des esses plongeant vers le virage de La Chapelle, juste avant ceux de La Forêt.

Elle a vu, sous ce nom, l'horrible crash d'Allan McNish en 2011, en contrebas de la descente, son Audi R18 se désitégrant près des voies de sécurité. Rien n'avait vraiment changé par la suite, le nom Dunlop apposé à la passerelle ayant été témoin de bien d'autres histoires : le duel Peugeot-Audi, puis Porsche-Toyota-Audi, les premiers passages des Hypercar et, surtout, l'incroyable édition du centenaire.

Dur de passer de passerelle Dunlop à Goodyear

Pour les personnes plus extérieures au monde du sport automobile, l'émoi suscité par un simple changement de nom d'un bâtiment peut interroger. Mais dans le film "Il était une voix" dédié au commentateur foot de TF1, Thierry Roland, le sélectionneur de l'équipe de France, Didier Deschamps, l'avait dit : « quand on est passionné, on est excessif ».

Il est vrai que ces nouvelles couleurs, ce nouveau nom, a une logique marketing indiscutable : le manufacturier américain est le fournisseur exclusif des LMGT3 en WEC, ainsi que des LMP2 en ELMS et au Mans par extension. Mais il faut croire que tout amoureux du Mans sera volontiers perturbé par un changement de couleur, de nom, qui tranche avec des souvenirs gravés dans la mémoire.