Présent ce week-end au Mans pour soutenir son fils Dudu Barrichello, Rubens Barrichello nous a accordé un entretien où il évoque ses envies de rouler avec ses fils au Mans et son actualité au Brésil où il a remporté une course à Interlagos pour la première fois depuis 1990 !

24 Heures du Mans

À la fin de la course du Qatar, vous avez dit que vous souhaiteriez rouler un jour avec vos deux fils en endurance. Est-ce qu'il y a eu du progrès dans la concrétisation de ce projet ?

Non, c'est actuellement trop tôt pour ça. Cela pourrait arriver l'an prochain, mais je roule beaucoup au Brésil et je n'ai pas pu venir à Imola ou Spa par exemple. Mon planning est très chargé : après Le Mans, je dois aller au Brésil pour une course, puis retourner en Europe pour voir Fernando rouler en Hongrie. Je n'ai pas encore eu la chance de vraiment travailler sur ce projet, mais être au Mans est un bon moyen pour en parler aux différentes équipes. Eduardo fait vraiment bien les choses, et le meilleur moyen de se faire une place en sport auto est d'avoir un très bon rythme en piste. Quand je suis passé de Stewart à Ferrari, c'est parce que les personnes croyaient en ma vitesse et à mon potentiel pour gagner des courses. Je suis très fier de ce que mes fils font, et cela ouvre la porte à cette opportunité.

Si vous arrivez à concrétiser ce projet, dans quelle catégorie souhaiteriez-vous le faire ?

Je ne sais pas, on doit voir cela. Je pense que nous sommes préparés physiquement, mentalement et sportivement pour toutes les catégories, même pour l'Hypercar. Je pense que mes fils sont tous prêts pour ça. J'ai 53 ans, mais je n'ai jamais arrêté de rouler. Je vais faire le championnat du monde de Karting à Bahreïn cette année. Je fais énormément de courses, bien plus que quand j'étais en Formule 1. La seule chose à voir, c'est la catégorisation, car je suis encore Gold et j'ai fait une demande pour que je puisse passer en Silver, ce qui est le niveau le plus bas que je puisse avoir, car on passe automatiquement en Bronze à 60 ans. Être Silver serait l'idéal pour moi pour avoir plus d'opportunités de le faire, car mes deux fils sont actuellement Silver, mais peuvent progresser au fil des années. Dans tous les cas, quelle que soit la catégorie, si on a une voiture et une équipe compétitives, le choix de la catégorie n'aura pas d'importance.

Est-ce que vous pensez que c'est possible de gagner Le Mans en LMP2 ou en GT3 à votre âge ?

Oui, je le pense, en particulier si vous continuez à faire des courses. Par contre, pour un pilote qui aurait arrêté la compétition et qui souhaiterait revenir à un haut niveau de performance, je ne le pense pas. Dudu était mon coéquipier l'an passé en Stock Car, et vous pouvez lui demander si j'étais encore compétitif (rires).

Comment trouvez-vous l'atmosphère dans le paddock ?

Il y a beaucoup d'engouement de la part du public avec énormément de monde présent ici. Beaucoup de gens viennent pour voir un pilote ou une voiture en particulier. Le Mans est un endroit spécial, tout comme Indianapolis, Monaco ou Monza, qui sont des temples du sport automobile. C'est juste super de voir autant de monde avec le sourire dans un environnement plus relaxant.

Quand on voit l'engouement qu'il y a pour le WEC et les courses d'endurance, est-ce que vous pensez que c'est le bon choix pour Dudu de se placer en WEC ?

Oui, je le pense. C'était compliqué pour moi il y a 3 ans, quand Dudu m'a appelé quand il était en Formula Regional. Il m'avait demandé si on pouvait parler à des équipes qui avaient une voiture compétitive dans des catégories supérieures et si on avait de l'argent et des sponsors pour financer cela, mais ce n'était pas le cas. C'était un moment triste pour moi, mais on ne s'est pas découragés. On a réussi à trouver des sponsors qui sont derrière nous et qui nous donnent la possibilité de rêver d'être de nouveau compétitifs. Bien sûr, avec Spirit Of Leman, on a cette opportunité d'avoir une voiture compétitive. Le fait qu'il ait été mon coéquipier devait être le moment le plus difficile de sa carrière, car on le comparait en permanence à moi, même s'il a terminé 3e du championnat l'an passé, et cela lui a appris beaucoup de choses.

Il y a quelques semaines, vous avez remporté une course en NASCAR Brasil sur le circuit d'Interlagos, votre première victoire sur ce circuit depuis 1990. Comment avez-vous vécu ce moment ?

C'est incroyable comment la vie peut être drôle parce que j'aurais pu gagner à Interlagos un nombre incalculable de fois en Formule 1. Cela m'a pris toute ma carrière pour gagner ici, mais je n'ai jamais renoncé à cet objectif de gagner ici. Je suis né ici, à l'hôpital d'Interlagos. Quand je mourrai, je veux être enterré sur le circuit quelque part parce que j'aime cet endroit. Lorsque je suis présent là-bas, mon motor-home est placé dans l'enceinte du circuit. Je ne vais pas chez moi pour dormir même si j'habite pas si loin du circuit car je veux être sur le circuit, je veux vivre ces moments ici. À propos de la course de NASCAR, le phénomène d'aspiration est très présent, ce qui signifie qu'on ne peut pas créer de grand écart. Dans le dernier tour, cela a été très chaud avec mon adversaire Thiago Camilo et je me suis agrippé à mon volant en me disant 'Cette victoire est pour moi'. Le jour d'après, on a été encore plus compétitifs et on a gagné de nouveau. J'espère que cela a éteint la malédiction, surtout que mon fils Fernando a gagné ici avant que je le fasse de nouveau. C'était absolument fantastique de gagner de nouveau ici. C'est un bon exemple pour les gens de montrer que si vous croyez en vous-même, les choses finissent par arriver. Il était déjà tard quand j'ai appelé mes fils pour leur dire la nouvelle, vu qu'ils étaient à Spa, et on a célébré ça par vidéo, et c'était fantastique. Cela me donne encore plus de passion quand je vois que mes fils adorent me voir faire des courses. J'espère que je n'arrêterai jamais de rouler. Même à 80 ans, je pourrais rouler au Mans sans problème !

Cette année, il y a une nouvelle voiture en Stock Car Brasil, comment se comporte-t-elle comparée à l'ancienne voiture ?

La voiture est beaucoup plus agréable à conduire. Elle est également beaucoup plus rapide, mais le championnat ne s'est pas bien préparé à avoir ce genre de voiture aussi performante. Il y a beaucoup de problèmes d'équité entre les modèles (Toyota Corolla Cross, Chevrolet Blazer, Mitsubishi Eclipse Cross) avec de grosses différences de performance entre les moteurs. La Toyota ne produit pas assez d'appuis aérodynamiques que la Mitsubishi, alors que les voitures sont les mêmes avec le même châssis et le même moteur ; seule la carrosserie change. À chaque fois que l'on accélère derrière une autre voiture, elle va très souvent s'envoler loin devant sans que je puisse rien faire. C'est un peu un cauchemar actuellement, mais j'espère que les choses vont rapidement évoluer. Je dois donner tout mon soutien au championnat parce que j'adore le Stock Car, mais c'est une catégorie dont les voitures ne doivent différer que par la carrosserie, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.