La photographie, l'un des objets sans lequel le sport auto n'aurait pas le même sens. On a tous en tête un cliché de référence dans tous les catégories, ici, la Toyota Celica dans les airs au Safari Rally 1993 est un incontournable.

Derrière chaque photo ou presque, il y a une histoire que seuls les photographes connaissent et pour cause : de leur implication, leur passion, leur dévouement et leur talent, naissent des clichés mythiques. Ici, c'est l'histoire sur cette photo du Safari Rally qui est racontée.

Safari Rally : cliché mythique

Ian Duncan et sa Toyota Celica GT-Four ST185 survolent une crête lors du Safari Rally 1993 au Kenya. Le mont Kilimandjaro enneigé, le point culminant de l'Afrique à près de 5900 mètres, se dresse au-dessus de la voiture de l'autre côté de la frontière tanzanienne. Un ciel azur se dresse au-dessus des neiges éternelles et de la terre desséchée alors que deux villageois Masaï se tiennent au bord de la route.

Cette composition est l'œuvre de Reinhard Klein, brillant photographe de l'agence McKlein. L'homme qui a assisté à chaque Safari Rally de 1978 jusqu'à l'événement final de 2002 nous plonge dans les coulisses de ce chef-d'œuvre. Interviewé par le site WRC.com, le célèbre photographe avait expliqué les dessous de cette image.

Reinhard, expliquez-nous comment vous avez immortalisé cette image...

Cette photo a été prise lors des essais et non lors du rallye à proprement parler. Ian a fait des essais en Afrique pour Toyota, qui voulait une couverture pré-événement pour communiquer avant le Safari. La marque a demandé à l'équipe de rallye de l'aider comme elle était déjà là avec des voitures d'essais, donc il semblait pertinent d'associer l'équipe de tournage et celle de photographes pour leurs passages dans les spéciales.

C'était donc une photo promotionnelle ?

Exactement. Marion Bell-Andersson (également épouse d'Ove Andersson, le directeur de Toyota Team Europe) était responsable de l'équipe de tournage. Toyota l'a fait sur de nombreuses épreuves afin d'avoir du matériel disponible dès la fin du rallye. À cette époque, il fallait tellement de temps pour arriver dans les quotidiens qu'ils préféraient préparer les photos en avance. Quand ils s'imposaient, ils n'avaient plus qu'à appuyer sur un bouton pour lancer les publicités.

© McKlein Photography

Connaissiez-vous cet endroit ?

Je connaissais assez bien le Kenya et je savais que ce cliché du Kilimandjaro était celui que Toyota recherchait. La route était surnommée la route du pipeline. Elle était toute droite et venait du Kilimandjaro jusqu'à la route principale de Mombasa. Aujourd'hui, tout est asphalté.

C'est un endroit spectaculaire...

C'est l'Afrique à l'état pur. En Afrique, vous pouvez faire des compositions avec des animaux et avec le Kilimandjaro. Le mont n'est normalement visible que tôt le matin, de 6h30 à 8h30 environ. Il fait alors assez clair, mais vers Pâques, la saison des pluies s'approche et de nombreux nuages ​​arrivent. Il faut donc être sur place tôt avant qu'il ne soit couvert.

Comment l'avez-vous préparé ?

Nous sommes venus la veille au soir et nous sommes restés près de la montagne et du parc national d'Ambroseli. Nous avons vérifié l'emplacement et il y avait ce flanc de colline que je connaissais. Durant le rallye, avec la circulation ouverte, cela n’aurait pas pu être possible car les pilotes ne voient pas ce qui arrive de l'autre côté. Nous avons donc bouclé la route le matin...

En quelque sorte, puisque vous n'avez pas vraiment besoin de le faire là-bas. Vous devez juste faire attention à ce que personne ne vienne et vous leur faites signe de la main pour les prévenir. Ian est parti à fond pour réussir à s'envoler. Pendant le rallye, ils ne décolleraient même pas. La différence n'était peut-être que de 20 km/h, mais cela a fait toute la différence pour ce cliché.

© McKlein Photography

Comment les Masaï ont-ils été impliqués ?

L’ultime défi était de placer les Masaï au bord de la route. Bien sûr, ils voulaient être payés, mais le problème était qu'ils avaient peur lorsque la voiture arrivait à fond. Normalement, ils sont habitués aux véhicules roulant à 50 km/h. Celui-ci atteignait 170 km/h à l’approche du saut… Et ils se sont enfuis ! Nous leur avons dit que nous n'avions pas encore la photo parce qu’ils étaient partis, mais ils nous ont dit que nous n’avions payé que pour un cliché.

Nous avons donc dû renégocier, faire quelques photos et les payer à chaque passage. Ils devaient s'habituer à la vitesse, se tenir au bon endroit et ne pas s'enfuir. Cela a pris quelques tentatives, mais toutes les pièces se sont finalement assemblées. Les Masaï étaient habitués à la vitesse, ils sont restés en place, ils savaient qu'ils étaient en sécurité, la voiture a sauté correctement et le Kilimandjaro était sous un soleil radieux.

Et le résultat est superbe…

Ces images incroyables ont été utilisées dans le monde entier et elles le sont toujours. Elles ont apporté beaucoup de publicité au Safari et au rallye. C’est l’une de mes photographies préférées. Normalement, vous allez à un endroit et vous attendez que quelque chose se passe, mais il s'agissait presque d’un moment d’action brute dans un studio à ciel ouvert !

Le Safari Rally fut remporté cette année 1993 par Juha Kankkunen / Juha Piironen sur leur Toyota Celica Turbo 4WD (ST185) et ce fut un quadruplé pour la firme nippone avec sur le podium l'autre paire finlandaise Markku Alén / Ilkka Kivimäki et les kenyan Ian Duncan / Ian Munro. Yasuhiro Iwase / Sudhir Vinayak complètent cette domination Toyota.

Photos McKlein Photography

© Toyota Team Europe - 1993