Eric Boullier, conseiller stratégique sportif et opérationnel mais aussi ambassadeur du Grand Prix de France de F1, a accepté de répondre à nos questions.

En quoi consiste votre nouveau rôle de consultant sur le GIP du Grand Prix de France F1 ?
C'est un double rôle. Il y a un rôle ambassadorial et un rôle de conseiller sport et opération. Mon rôle consiste à mettre à disposition du GIP mon réseau, mon expérience et un peu mes connaissances notamment de faire la liaison entre circuit, écuries, pilotes, les instances dirigeantes comme la FIA, la FOM et la FFSA. C'est un rôle de conseiller, on peut apporter des suggestions, des opinions ou des solutions ; un rôle de facilitateur un peu.

Vous êtes le noyau central de plusieurs acteurs ?
Pas le noyau central, mais j'essaie d'apporter une contribution positif et constructive auprès de plusieurs interlocuteurs du GIP.

Vous avez un pouvoir décisionnaire auprès du GIP ou du circuit par exemple ?
Pas forcément décisionnaire. Quand on est conseiller, on n’est pas décisionnaire.

Vous avez été l'un des pionnier du retour de la F1 en France, en quoi est-ce important pour vous ?
Ça l'est. C'est important quand on est mandaté d'abord il y a une dizaine d'années par le Premier Ministre, c'est une mission importante. Ensuite mandaté par Christian Estrosi alors président de la région Sud, ce sont des missions importantes. Après, à titre personnel, vouloir faire partager la vie d'un Grand Prix pour son pays, sans être hyper patriotique, c'est important. D'autant plus avec les nombreux acteurs français d'aujourd'hui, que ce soit les pilotes, les chefs d’équipe et les équipes, on a quand même un constructeur engagé en F1. Je pensais que c'était important qu'il y ait un évènement en France et j'étais assez personnellement fier de voir le retour du Grand Prix de France aboutir.

Vous avez dit que vous aviez été mandaté par le Premier Ministre, c'était François Fillon à l'époque.
Oui. Il y avait déjà eu une première tentative qui avait failli aboutir mais, pour des raisons diverses, ça ne s'était pas fait. Ensuite, Christian Estrosi avait rappelé la cellule qui avait été mise en place à l'époque, avec Gilles Dufeigneux et Arnaud Péricard notamment et Stéphane Clair pour pouvoir ramener le Grand Prix de F1 en France, ce que nous avons réussi à faire la deuxième fois.

Vous étiez présent dans la consultation en 2012 pour le retour au Castellet ?
Oui, c'était la première tentative. Le groupe avait été formé fin 2010 ou 2011. François Fillon avait créé un groupe de travail, qui avait presque réussi. Ensuite, Christian Estrosi a repris le même groupe et nous a confié la même mission et cette fois-ci, ça a marché.

L'aventure en F1

Vous avez rejoint la F1 après une expérience en World Series by Renault, en A1GP, en GP2 et F4... Est-ce qu'il est difficile de passer d'un management d'une série de promotion à une équipe de F1 ?
Bien sûr, ce n'est pas du tout la même approche. Dans mes expériences passées, j'avais eu la chance de participer au projet Cadillac aux 24 Heures du Mans, qui était un projet constructeur au sens global du terme et aussi au sens construction de la machine, ce qui m'a un peu aidé. Après, effectivement, la F1, c'est à part. Ce sont 500 personnes dans le cadre d'une équipe comme Lotus à l'époque. C'est beaucoup de personnes, beaucoup de process et d'obligations. C'était un challenge et il faut effectivement quelques mois pour se mettre en ordre marche correcte.

Est-ce que ça a été difficile de reprendre l'équipe Lotus après toutes les différentes histoires, la dynamiser, lui donner un second souffle ?
Non parce que l'équipe en elle-même n'était pas foncièrement impliquée. Les gens qui composent l'équipe travaillent tous les jours pour qu'une voiture de F1 soit sur la piste et compétitive. Surtout à Enstone, ce sont des grands compétiteurs qui ont l'habitude de travailler sous différentes marques et propriétaires. C'était une nouvelle équipe mise en place par Genii Capital, par Gérard Lopez et Eric Lux à qui je dois beaucoup puisqu'ils m'ont fait confiance et m'ont donné ma chance. C'était une nouvelle façon de manager. Ça a été une nouvelle feuille de route, de nouveaux engagements, une nouvelle identité. Tout un tas de choses nouvelles qui ont fait que tout le monde s'est accroché, tout le monde est reparti, dans le même sens.

Ron Dennis est une légende de la F1, est-ce difficile de travailler avec un tel personnage, aussi médiatique, aussi légendaire ?
Oui et non. Pas au sens de votre question. Médiatique ou légendaire non, c'est quelqu'un qui est intense, qui est extrêmement passionné, extrêmement compétitif, donc très exigeant. C'est donc motivant et inspirant. Une énorme expérience, une grosse vision, c'est positif. Ça reste des personnages extrêmement exigeants, qui ne sont pas toujours facile au quotidien mais c'est avant tout une source d'inspiration.

Vous avez travaillé avec plusieurs Champions du Monde et avec des jeunes pilotes, quels souvenirs gardez vous de toutes ces associations jeunes pilotes avec un Champion ?
Chaque histoire est différente. Ce sont des personnalités complètement différentes. La grande chance était de travailler avec des pilotes de talents, compétitifs et compétiteurs. Toutes les histoires n'ont pas forcément marchés comme on l'aurait souhaité mais se sont des gens extrêmement attachants et inspirants également. Car ils ont un coté compétitif qui les rend attachant et ils font partie intrinsèquement du projet à ce moment là. Vous choisissez les pilotes, vous voulez travailler avec eux, ils font vraiment corps avec l'équipe. Ça a toujours été une expérience positive même si les résultats sportifs n'ont pas toujours été au niveau.

Vous envisagez à l'avenir de revenir en F1 en tant que responsable d’une équipe ?
Je n'envisage rien pour l'instant. Je me concentre sur ma mission pour le Grand Prix de France. C'est nouveau, c'est un challenge. C'est aussi intéressant et passionnant parce que ce sont d'autres facettes du métier même s'il y a beaucoup de « similarités » que ce soit entre être un acteur dans le paddock ou être un acteur au sein d'une organisation d'un Grand Prix, que ce soit l'obligation de délivrer en temps et en heure, puisque les voitures commencent à rouler le vendredi matin à une heure bien précise et qu'il faut être prêt. Et puis la quinzaine de jours autour du Grand Prix, c'est quand même une grosse organisation avec 1000 personnes donc il y a quand même beaucoup de similitudes et pour l'instant ma priorité.