La voiture électrique prend de plus en plus d'importance dans le secteur de l'automobile. Nombreuses sont les marques qui investissent dans cette technologie du futur. Mais qu'en est-il du recyclage des batteries ?

En 2018, 31 069 véhicules électriques neufs ont été vendus. Cela représente 1,42% des ventes annuelles de l'automobile neuf avec une progression de 0,24% par rapport à 2017. La Renault Zoe reste la leader du marché français en électrique, avec 17 038 ventes sur l'année 2018 contre 2 381 pour la Nissan Leaf, deuxième du classement français.

Seulement, le véhicule électrique est mal vu. On parle de pollution lors de sa production, comme l'indique un rapport de l'ADEME, l'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie, datant d'avril 2016. « Cependant, le VE a des impacts négatifs sur l’environnement, majoritairement durant sa phase de fabrication, notamment sur l’acidification des milieux et le potentiel d’eutrophisation de l’eau. Sur le cycle de vie du véhicule, ces impacts sont toutefois du même ordre de grandeur pour un VE que pour un véhicule thermique », explique le rapport publié en avril 2016. Il y est également souligné que « l’utilisation en seconde vie et le recyclage des batteries permettent de diminuer ces impacts environnementaux ». Justement, depuis sa première commercialisation en 2012, le recul n'est guère suffisant pour savoir comment une batterie de véhicule électrique est recyclée.

Le constructeur, premier acteur du recyclage des batteries

Le recyclage est une chose réfléchie par le constructeur français. Une batterie de Zoe est recyclée lorsque son efficacité diminue à 75% de sa capacité initiale.

« Les seules batteries qui sont susceptibles d’être recyclées aujourd’hui sont celles qui sont accidentées. Mais nous avons un centre de réparation. Ce n'est que lorsqu'on ne peut pas les réparer qu’elles partent au recyclage. Mais ce n’est que quelques exceptions. Une batterie, quand elle arrive en fin de vie automobile, est réutilisée dans des projets de seconde vie. Elle ne peut plus assurer son rôle dans une automobile mais a encore une grosse capacité de stockage. Donc elles sont réutilisées dans des projets de stockage stationnaire, essentiellement pour stocker des énergies renouvelables », déclare une porte-parole de Renault.

Le constructeur français parle de projet immobilier comme celui de l’île de Porto Santo, dans l’archipel de Madère, où un projet annoncé en 2018 a été réalisé grâce aux batteries de véhicules électriques. Le projet vise à réduire de 80 % la dépendance aux énergies fossiles de l'île. Mais la durée d'utilisation des batteries ne se limitent pas à une seconde vie. Le constructeur voit plus loin en offrant, si possible, une troisième vie, 10 à 15 ans après le début de la deuxième vie des batteries. L'utilisation serait envisagée pour des projets nécessitant moins de capacités.

Renault estime que le montant alloué pour chaque batterie est d'une centaine d'euros par recyclage. L'entreprise travaille avec des partenaires, comme la société Reputil. D'autres, comme la société SNAM, font également du recyclage de batteries de véhicules électriques. Cette entreprise est en effet spécialisée dans le recyclage des batteries de voitures électriques et hybrides. Les premiers contrats de la société SNAM ont été signés en 2010.

Le recyclage des batteries est soumise à une réglementation, à savoir la directive batterie 2006/66 CE. La réglementation impose, dans son premier volet, que tout metteur sur le marché à l'obligation de reprendre à titre gracieux les batteries qu'il a mis sur le marché afin que ces dernières soient recyclées. Le second volet souligne que les batteries doivent être recyclées. En fonction du type de batteries et de sa technologie, l'efficacité du recyclage varie.

"Les sociétés de recyclage dont fait partie SNAM, on atteint des efficacités recyclage qui sont largement supérieures puisque nous sommes à plus de 70%. Cela signifie que les éléments sont récupérés pour être réinjecté dans l'économie. On va récupérer un certain nombre de métaux et d'éléments de la batterie, on va les transformer, les purifier et ça repart dans l'industrie pour fabriquer soit de nouvelles batteries, soit d'autres pièces".

"Sur les 30% restants, on a une partie qui va en « perte au feu » parce qu'on a des procédés thermiques avec des séparateurs, des pochettes, des films, etc. qui sont brûlés. Les fumées ne repartent pas dans l'atmosphère. Nous avons toute une succession de filtres qui permettent de filtrer les matières avant de sortir vers l'extérieur. Les électrolytes ne sont pas récupérés. On a également des déchets ultimes qui représentent environ 5%. Ils sont enfouis dans un centre d'enfouissement technique, contrôlé. Ce procédé est un choix de la France. Le recyclage à 100% n'est pas techniquement possible et économiquement possible''.

La pollution liée au recyclage des batteries

"On ne peut pas dire que la méthode de recyclage est totalement inoffensive pour l'environnement. Toute activité industrielle a des impacts sur l'environnement. On est soumis par autorisation par arrêté préfectoral, on a des audits. Nos rejets sont très inférieurs au limite demandé par nos autorisations. On est une ICPE (Toute exploitation industrielle ou agricole susceptible de créer des risques ou de provoquer des pollutions ou nuisances) et nous sommes contrôlés par la DREAL''.

Pour la société SNAM, le rejet de cadmium dans l'air en 2017 représente 98g pour une autorisation de 1,5kg, et un peu plus de 36g dans l'eau pour une autorisation de 730g.

"Ces autorisations varient en fonction des entreprises et de leur activité. Le cadmium est le plus compliqué à traiter. Par défaut, si on est bon sur celui-là, on est bon sur les autres par déclinaison. Concernant le rejet dans l'eau, on peut avoir un peu de rejet par les cheminées, qui vont se mettre sur les toits et lorsqu'il pleut, cela peut s'écouler. Nous sommes un site placé sur rétention intégralement et nous disposons de bassin de rétention et de système de traitement des eaux usées. Cela permet de réutiliser l'eau par la suite'', déclare Frédéric Salin.

"Toute activité industrielle a des impacts sur l'environnement. On est soumis par autorisation par arrêté préfectoral, on a des audits. Nos rejets sont très inférieurs au limite demandé par nos autorisations. On est une ICPE (Toute exploitation industrielle ou agricole susceptible de créer des risques ou de provoquer des pollutions ou nuisances) et nous sommes contrôlés par la DREAL''.

Les normes

Aujourd'hui, le recyclage des batteries des véhicules électriques est régi par des normes. Deux prédominent le sujet : la norme ISO 14001 et la norme XP X30-901.

La norme ISO 14001

Cette première norme vise à atteindre un équilibre entre l’environnement, la société et l’économie. Le management environnemental repose sur le modèle PDCA (Plan-Do-Check-Act qui correspond à Planifier-Réaliser-Vérifier-Agir). L'objectif consiste à améliorer d'une manière continue la performance environnementale via 18 exigences réparties en 6 parties :

  • Les exigences générales
  • La politique environnementale
  • La planification
  • La mise en œuvre des actions pour satisfaire à la politique environnementale
  • Les contrôles et les actions correctives
  • La revue de la direction

La politique environnementale met en lumière le principe de recyclage et de préservation de l'environnement. C'est un ensemble de principes formulés sous forme d’engagements dans lesquels la direction définit les intentions de l’organisme pour le soutien et l’amélioration de sa performance environnementale. La gestion des déchets, y compris la réutilisation, la remise en état, le recyclage et l’élimination, en est un des engagements.

La norme XP X30-901

Cette norme, publiée en octobre 2018, spécifie les exigences relatives à un système de management d'un projet, porté par un organisme, pour améliorer sa performance environnementale, économique et sociétale dans la perspective de sa contribution au développement d'une économie circulaire. Concrètement, cette norme s'attaque au système économique actuel décrit comme « produire, consommer, jeter » et qui conduit à l’épuisement des ressources naturelles.

Elle suggère également une gestion efficace des matières ou produits en fin de vie qui se traduit par l'opération de valorisation, dont le recyclage, des résidus post-consommation, en substances, matières ou produits aux fins de leur fonction initiale ou à d’autres fins.

Le lithium-ion présente-t-il un danger ?

"Le lithium-ion n'est pas dangereux ni pour l'environnement ni pour l'humain. Aujourd'hui on contrôle très bien la chimie du lithium-ion et également, le recyclage des batteries et comment les récupérer.
Il y a des méthodes de recyclage qui sont adéquates et efficaces. La difficulté est de faire en sorte de recycler les batteries dans le futur. Mais cela sera d'autant plus facile quand on parle des véhicules électriques. Ils ont de grosses batteries. Si on prend le cas des batteries au plomb aujourd'hui, quand on change la batterie, la vieille est reprise. La difficulté aujourd'hui dans le recyclage du lithium-ion, s'il y en a une, c'est qu'avec les petites batteries ce n'est pas évident'', explique le Professeur Jean-Marie Tarascon.

Aujourd'hui, l'ensemble des "éléments chimiques proviennent de la croûte terrestre, ils ne sont pas dangereux quand ils sont dans l'environnement'', ajoute-t-il. Ce qui est le plus dangereux, c'est la transformation de ces éléments qui fait que le produit devient dangereux pour l'environnement.

Un des produits dont l'utilité s'amenuise est le nickel-cadmium. "C'était vraiment la toxicité du cadmium qui a été bannie'', nous explique le Professeur du Collège de France. Ce dernier estime qu'il disparaîtra dans "15 ou 20 ans''.

Faire oublier les peurs d'il y a quelques années

Dans une batterie au lithium, ce dernier a son importance. "C'est l'élément qui va voyager entre la positive et la négative'', nous indique le Professeur Tarascon.

"Le lithium pose quelques problématiques dans le cadre du développement durable, lié à ses ressources. Mais là aussi, ce sont des peurs d'il y a 6 ou 7 ans. Aujourd'hui, les ressources augmentent et on sait aussi le recycler. Le cobalt, par exemple, on en parle beaucoup aujourd'hui. Il y a eu beaucoup d'articles dans les journaux sur les problèmes éthiques associés au cobalt. Il est meilleur marché de recycler le cobalt que d'aller l'extraire de nos jours'', ajoute-t-il.

La solution sodium-ion ?

En 2010, avec Rosa Palacin, une collègue espagnole, le Professeur Jean-Marie Tarascon explore une alternative au lithium-ion : le sodium-ion. Ce type de batterie peut-elle être une alternative au lithium-ion dans un véhicule électrique ?

"Le sodium-ion n'est pas une alternative au lithium-ion dans le cadre d'un véhicule électrique. La technologie sodium-ion n'a pas assez de capacité d'énergie'', nous explique-t-il. Le volume d'énergie a une place plus que primordiale dans un véhicule dit électrique, ce que n'apporte pas cette alternative.

Conclusion

Le recyclage des batteries de voitures électriques ne représente en soi aucune menace réelle pour l'environnement. Que ce soit le constructeur ou l'entreprise de recyclage, tout est mis en œuvre pour que la batterie soit le plus "écologique" dans ses autres vies ou dans son démantèlement.

Reste à savoir si la filière du recyclage sera prête lorsque le véhicule électrique prendra une part plus importante du parc automobile français voire mondial.