Dans un communiqué datant du 26 octobre, la FIA explique que Ferrari a apposé son droit de veto sur la proposition visant à réduire le prix maximum des unités de puissance et des boites de vitesses pour les équipes clientes.

Maurizio Arrivabene justifie ce veto en expliquant avoir fait « valoir son droit commercial en tant que motoriste ». Cependant, de nos jours, dans une F1 de plus en plus en crise avec des équipes privées asphyxiées par le manque de sponsoring, un tel droit est-il encore viable pour l’équipe historique du plateau ?

Le droit de veto de l’équipe Ferrari est une longue histoire. Dans une interview, Jean Todt, président de la FIA, explique que celle-ci a été mise dans les premiers Accord Concorde au début des années 80. A cette époque, Enzo Ferrari était le seul à fabriquer à la fois châssis et moteur et devait faire face aux équipes privées comme Williams, Lotus ou encore McLaren, propulsées par le Ford Cosworth.

Cette règle, remise en avant en 2005 par Max Mosley afin que les Rouges ne quittent pas la F1, a été validée une nouvelle fois lors des derniers Accords Concorde régissant la F1 de 2013 à 2020. Elle permet ainsi à l’équipe italienne de bloquer les nouveaux règlements allant contre leurs intérêts. Mais elle peut aussi apposer son veto sur le successeur de Bernie Ecclestone (Ferrari disposant d’une participation dans la F1 de 0,25%).

Il est certain que la proposition de Jean Todt visant à réduire le prix des moteurs allait contre les intérêts commerciaux de la Scuderia. Il faut dire que l’investissement généré pour le développement des V6 turbo a été si colossal qu'atteindre la rentabilité nécessite du temps.

Par le passé, Ferrari jamais n’a utilisé son droit de veto. L’affaire de 2009 opposant la FIA à la Scuderia concernant le règlement 2010 en est la preuve. Cette affaire portant sur le plafonnement des budgets, a été déboutée par le tribunal de grande instance de Paris, prétextant que l’équipe, voulant utiliser justement le droit de veto, ne l’avait pas exercé utilement. Une histoire qui s’était transformée à l’époque en un véritable conflit entre la FIA et la FOTA, association des équipes, créée en 2008 à Maranello.

Bien que l’équipe au cheval cabré soit historique, est-ce qu’un tel traitement de faveur est encore possible de nos jours, dans une F1 où les constructeurs ont une plus grande importance ? Dans les faits, Jean Todt explique clairement que Bernie Ecclestone et toutes les équipes souhaitent laisser ce droit à Ferrari. Cependant, l’utilisation d’un tel droit a un revers. La FIA peut invoquer un article de l’accord entre elle et la Scuderia en cas de préjudice aux valeurs traditionnelles du championnat et à l'image de la Fédération.

Cependant, dans la réalité, un tel droit ne devrait pas être propre qu’à une équipe. Pourquoi McLaren ou Williams n’auraient-elles pas le droit au même traitement de par leur statut historique ? Après tout, McLaren a rejoint le championnat en 1966, Williams en 1975. D’autant que les deux équipes ne sont pas dépendantes d’un constructeur comme Ferrari l’est de Fiat et ont dû réussir grâce à leurs performances en piste, aux sponsors et à leur renommée. Ces deux équipes ne seraient-elles pas plus aptes à déterminer ce dont la F1 a besoin ?

Mais peut-être qu'elles ont ce droit via Ferrari qui ne servirait que de faire valoir pour tous les « grands » du championnat afin de protéger leurs intérêts, mais aussi à protéger simplement les petites équipes dont la F1 a besoin. Pourtant, les grands sont présents au Strategy Group. Mais être 6 contre 18 n'est pas équitable pour imposer sa loi, sauf si on a l'arme ultime pour cela, à savoir Ferrari...

Ne pas perdre Ferrari

Mais la F1 ne « peut pas perdre Ferrari » si on en croit la déclaration de Bernie Ecclestone datant de 2009. Perdre l’équipe qui a couru 906 des 933 Grands Prix courus en championnat du monde aurait un impact sans précédent, d’autant que la Scuderia a attiré les plus grands pilotes, de Alberto Ascari à Sebastian Vettel en passant par Mario Andretti, Gilles Villeneuve, Niki Lauda, Alain Prost, Michael Schumacher ou encore Fernando Alonso. Pour tout pilote, c’est l’apogée d’une carrière. Mais être une légende ne doit en aucun cas donner le droit de diriger pour son propre intérêt un sport en crise, même si elle ne le fait pas que de son propre intérêt mais pour celui des autres équipes, ni même recevoir une part supplémentaire du gâteau donnée chaque année par la FOM.

Cependant, on peut voir que la FIA ne compte pas se laisser impressionner par Ferrari (et les autres) allant jusqu’à proposer l’appel d’offres pour un moteur alternatif, le fameux V6 bi-turbo 2.2L, Jean Todt souhaitant « proposer un moteur client à des équipes qui n’est pas contre leurs intérêts », ce qui en soit est une vérité. Une proposition qui ne vise qu'à faire plier les constructeurs.

Mais qu’importe, la F1 ne peut pas se passer de l’équipe d’il Commendatore…