Cette saison marque l’arrivée d’un géant du sport automobile américain, à savoir l’équipe Haas. Double champion en Sprint Cup, sorte de première division de la Nascar, Gene Haas a décidé de faire revivre le nom Haas en F1, après l’aventure désastreuse de Carl Haas au milieu des années 80, ce dernier n’ayant aucun lien de famille avec le PDG de Haas Automation.

Parti sur un modèle économique et technique différent de celui des équipes dernièrement arrivées et dont il ne reste que Manor, multiplement rachetée, Gene Haas a pris le parti de s’allier avec Dallara, auteur du châssis HRT dont on ne vantera pas les prouesses, et Ferrari. Ainsi, la logistique de l’équipe peut paraître surprenante avec trois bases connues. Mais ce choix « audacieux » a-t-il un avenir en F1 ?

Décembre 2013, Gene Haas répond à l’appel d’offres de la FIA ouvrant le championnat de F1 à une nouvelle équipe. Il se retrouve en concurrence avec un projet porté par Colin Kolles. C’est cette première qui sera la seule équipe choisie le 11 avril 2014.

Viennent alors les choix concernant la base de son équipe. Le même mois que l’appel d’offres, Haas reçoit le permis de construire pour un bâtiment de 38 100 mètres carrés pour un montant de 4,4 millions d’euros, selon le journal « Independent Tribune ». D'après ce média américain, le bâtiment doit servir d’expansion à Stewart-Haas, en abritant le pôle recherche et développement. Mais il s’avère que le bâtiment constitue la base de l’équipe de F1, avec une partie seulement allouée à l’équipe de Nascar.

Cependant, l’équipe comprend qu’une base en Europe s’avère importante, le championnat se déroulant en partie sur le Vieux Continent. Après la mise sous administration de l’équipe Marussia et la vente aux enchères des actifs de cette dernière, Gene Haas décide de racheter la base de l’équipe, 3 655 mètres carrées située à Banbury, lot non-présent dans la-dite vente. Enfin, l’équipe dispose aussi d’une base en Italie, à l’usine Dallara.

En tout, l’équipe s’articule autour de trois lieux, dont le principal reste celui de Kannapolis où se regroupe le pôle administratif, la soufflerie (située à quelques kilomètres de la base), la CFD…
D’un point de vue de l’effectif, l’équipe s’avère l’une des plus pauvres du plateau avec seulement 185 personnes à la fin février 2016. La répartition est la suivante : 70 à Kannapolis, 65 à Banbury et 70 chez Dallara. Le dernier point est intéressant car ce ne sont pas des employés proprement dits de Haas mais du personnel alloué par le concepteur de châssis. Ces derniers sont donc sous les ordres de Rob Taylor, concepteur en chef de l’équipe.

Une équipe qui se repose sur l'expérience

Néanmoins, l’arrivée de Haas ne repose pas sur une structure 100% nouvelle, comme ça a pu être le cas pour Virgin ou le Team Lotus de Tony Fernandes. Outre l'association avec Dallara pour la conception du châssis, Haas peut se reposer sur un partenariat avec l’une des plus prestigieuses équipes du championnat de F1, à savoir Ferrari. Si la Scuderia fournit le moteur à l’équipe américaine, cette dernière bénéficie d’autres avantages non négligeables. L’électronique, la transmission, la suspension et les pièces non cotées par l’appendice 6 du règlement technique sont apportées par l’équipe italienne.

Reste donc à la charge de l’équipe de construire la monocoque, la cellule de survie, la structure d’impact avant, la structure de l’arceau de sécurité, la carrosserie, la géométrie, les ailerons, le diffuseur, le fond plat mais aussi les radiateurs et l’échappement, selon les déclarations de Günther Steiner à Autosport. Selon nos informations, le museau a été construit par Dallara.

Avoir le savoir-faire d’une équipe multiple championne du monde peut s’avérer être un avantage mais encore faut-il qu’elle soit compatible avec le design de la monoplace faite dans les bureaux de Dallara. Souvenons-nous de l’échec de la HRT. Certes, l’équipe n’avait pas de moyens et un moteur Cosworth mais un constructeur ayant une grande expérience dans les formules de promotions ne peut pas prétendre être bon dans le pinacle du sport automobile. Nombreux sont ceux qui ont crus, par le passé, que la F1 était simple et facile.

La F1, véritable publicité pour Haas

Enfin, Haas ne vient pas en F1 pour faire de la figuration. Véritable entreprise, l’équipe se prévoit un budget d’environ 100 millions d’euros, se situant entre Force India, Sauber et Manor. Ce budget provient presque en intégralité de l’entreprise de Gene Haas, seul sponsor de l’équipe avec Richard Mille.
L’idée de Gene Haas en arrivant en F1 est de s’offrir une vitrine marketing mondiale, profitant du déploiement de la discipline pour faire la pub de sa société. Dans une entrevue avec Forbes, l’Américain se veut clair : doubler les ventes de sa société dans les cinq années à venir et ainsi atteindre un chiffre d’affaires de 1,8 milliards d’euros.

« Environ 50% de notre production est vendue aux États-Unis et nous vendons environ 50% à l'étranger […] J’espère qu'au cours des cinq prochaines années, le pourcentage de notre production vendu à l'étranger va augmenter de 50% à 70% »

L'objectif de la société est de pénétrer le marché européen, sud-américain, asiatique et chinois. Ce sont autant de lieux visités par la F1 sur le calendrier avec la tournée européenne, le Brésil, la Chine, le Japon, la Malaisie et une partie des Emirats.

Cependant, cette volonté de se mettre en avant avec sa propre équipe contient un risque non mesuré : la performance en piste. Qu’on soit clair, l’équipe usera d’une bonne couverture télévisuelle sur la première course, étant l’attraction de cette saison mais qu’en sera-t-il pour les autres courses si la voiture plafonne le fond de la grille ? Que se passera-t-il lorsque nous verrons la Haas quelques minutes par course comme ça a pu être le cas pour Manor la saison passée ? Voilà le véritable danger pour le business plan établi par l’Américain.

Le modèle choisi par Gene Haas peut se montrer intéressant bien que complexe. Si le choix d’un partenariat solide avec Ferrari est une bonne chose pour l’équipe, le choix Dallara, bien que sous la direction d’un homme connaissant la F1, peut paraître surprenante, tout comme la volonté de rester sur le sol américain et ne garder qu’une sorte d’usine succursale en Europe. Reste à attendre la fin de la saison pour voir si le rêve américain ne va pas se transformer en cauchemar sur la piste…