La guerre des nerfs en coulisses entre Mercedes et Red Bull a grandement agrémenté la saison 2021, pour le meilleur comme pour le pire. Les deux équipes ont rappelé que le titre ne se gagnait pas que sur la piste, quitte à ressortir la carte du « dispositif illégal » à plus d'une reprise.
Une tactique loin d'être récente et qui s'est matérialisée de différentes façons au cours de l'histoire. Quitte à parfois influer sur la dynamique d'un championnat, comme l'a démontré l'affaire Michelin en 2003.
L'affaire Michelin en 2003
Dimanche 24 août 2003, Grand Prix de Hongrie. Fernando Alonso vient de franchir la ligne d'arrivée en tête et d'écrire une page d'histoire. Le jeune espagnol est devenu le plus jeune vainqueur de son sport et a ramené Renault sur la plus haute marche d'un podium pour la première fois depuis le 14 août 1983 et la victoire d'Alain Prost en Autriche. Dans les deux cas, la monoplace frappée du losange était équipée de pneus Michelin, son partenaire historique.
Le manufacturier français est alors aux anges. Après deux saisons de rodage, ses gommes semblent avoir enfin pris le dessus sur les produits de son rival Bridgestone. Durant l'été, les Williams furent les machines à battre tandis que Ferrari sauvait quelques places d'honneur et une victoire dans la fraîcheur anglaise de Silverstone. Le Hungaroring quant à lui n'offrit aucune pitié à la Scuderia. Michael Schumacher concéda même un tour au vainqueur et finit piètre huitième sous la fournaise magyare.
S'il reste leader du championnat au soir de cette course, il ne dispose plus que d'un point d'avance sur Juan-Pablo Montoya (Williams) et deux sur Kimi Räikkönen. Le championnat est plus ouvert que jamais.
Dans les grandes largeurs...
Le directeur de la compétition de Michelin, Pierre Dupasquier, avait donc toutes les raisons de sourire. Mais peu de temps après la cérémonie du podium, l'homme clé du Bibendum en F1 reçoit la visite du directeur de course Charlie Whiting et du délégué technique Jo Bauer. Point de félicitations ici mais un signalement quant à la légalité de ses pneumatiques.
En effet, les deux ont été informés que la bande de roulement des pneus avant d'Alonso (la surface du pneumatique en contact avec la piste) s'avérerait plus large que la réglementation l'autorise, en l'occurrence 270 millimètres.
Dupasquier ne se démonte pas et rappelle à ses interlocuteurs une réunion datant de 2001 où il avait demandé les termes précis du règlement technique à ce sujet. A cause des différentes déformations que subit un pneumatique durant un Grand Prix, une mesure d'après-course risquait d'être trop aléatoire. Ainsi, Michelin et la direction de course s'étaient accordés pour une mesure d'avant course, sur des pneus neufs uniquement. Or jusqu'à présent, les pneumatiques français ont tous été déclarés réglementaires sur la base de cette mesure.
Whiting et Bauer concèdent cet argument, si bien que le classement du Grand Prix de Hongrie reste en l'état. Cela étant, ils conservent leur scepticisme quant à l'élargissement possiblement exagéré des pneumatiques Michelin durant une course. Ils promettent donc une réflexion en ce sens.
Nul ne pouvait prévoir que cet échange était le prémisse à une polémique qui manqua d'entacher une splendide saison 2003.
Alerte rouge
La polémique en question explosa aux yeux des observateurs lorsque la FIA annonça un amendement du règlement technique trois jours après Budapest. A partir de cet instant, les pneumatiques pouvaient subir un contrôle de largeur de la bande de roulement à tout moment. Y compris après la course.
Les pneus Michelin courraient désormais le risque d'être déclarés illégaux. Six équipes sur dix, dont deux prétendantes au titre mondial, pouvaient être disqualifiées si cet élargissement suspecté à Budapest se répétait. Alerte rouge du côté de McLaren et Williams. Alerte rouge oui, puisque le premier signal venait du camp adversaire...
La FIA n'avait en effet pas agi sur un coup de tête. Ferrari et son partenaire Bridgestone avaient fait part de leur intention de porter réclamation contre les équipes chaussées de Michelin en raison de cette largeur trop importante sur les pneus avant.
Ce n'était pas qu'une question de simple mesure réglementaire. Le raisonnement étant qu'avec une surface pneumatique plus large en contact avec la piste, la monoplace équipée de ces gommes bénéficie d'une meilleure adhérence à long terme et d'une dégradation plus limitée. Ce qui expliquerait l'avantage concret pris par Michelin durant l'été 2003 face à Bridgestone.
Bridgestone proposait de son côté des gommes bien plus étroites sur demande de Ferrari afin que celles-ci soient en parfaite adéquation avec leur monoplace. Or après le regain de performance de Michelin à Monaco, Bridgestone testa de nouvelles gommes plus larges et constata que celles-ci dépassaient la fameuse limite de 270 mm. C'est ici que les doutes du manufacturier envers Michelin naquirent. La protestation n'intervint qu'à Budapest car jusqu'à cet instant, Bridgestone n'était pas encore en possession de preuves confirmant leurs allégations.
Selon Bridgestone, son enquête servait à l'origine à comprendre comment Michelin parvenait à faire fonctionner ses pneus larges et non à prouver une quelconque tricherie. Reste qu'une menace de plainte fut formulée par Ferrari après que son partenaire lui ait communiqué ses informations, d'où la petite enquête de la FIA et la clarification qui suivit.
Timing suspect
Le timing choisi pour cette attaque n'avait échappé à personne. Ferrari était alors au plus mal, de même que Bridgestone. Outre McLaren, Williams et désormais Renault en position de force, on retrouvait des Jaguar et Toyota en Michelin plus fringantes que les Sauber et BAR en Bridgestone dans le midfield. Et comme précisé plus tôt, l'avance de Schumacher était des plus infimes, avec trois courses restantes.
Pour certains, cette demande de clarification sonnait comme un aveu d'échec de la part des deux associés. La position privilégiée dont jouissait Ferrari en tant que seul top team équipé par Bridgestone semblait s'être retournée contre les deux parties. Bridgestone manquait de points de repères pour améliorer ses produits, quand Michelin pouvait compter sur plusieurs équipes de pointe pour recueillir des informations capitales et déterminer quel facteur de (contre) performance était dû au pneu ou à la voiture. Le directeur technique de Bridgestone reconnut lui-même ce handicap au plus fort de la lutte.
Ironiquement, Michelin bénéficiait depuis cette saison d'un nouveau point de règlement, lequel autorisait un fournisseur pneumatique à proposer deux types de gommes spécifiques. McLaren gomma ainsi une partie de son handicap de 2002, où son adaptation aux produits français se fit dans la douleur.
Et à Monaco, Michelin proposa des pneus de 14 pouces qui convinrent particulièrement aux Williams, la FW25 devenant la monoplace à battre durant l'été après que l'équipe ait décidé de régler la voiture en fonction des gommes. Soit l'inverse de la méthode pratiquée par Bridgestone avec Ferrari. Or comme indiqué plus tôt, Monaco coïncida avec le début de domination de Michelin et les suspicions de Bridgestone.
Sauf que cette nouvelle gamme n'était que la dernière version d'une constitution spécifique des pneus Michelin, laquelle était présente depuis le Grand Prix de Saint-Marin... 2001 ! Quarante-quatre courses s'étaient déroulées sans que la moindre protestation ne soit adressée envers le manufacturier. Quarante-quatre Grands Prix avec une mesure d'avant course uniquement des pneumatiques, lesquels furent systématiquement déclarés conformes au règlement.
Pourtant il est fort probable que moult pneus Michelin aient excédés les fameux 270 mm une fois l'épreuve terminée. C'était si insignifiant aux yeux du manufacturier qu'il ne prenait même pas la peine de mesurer la bande de roulement après la course !
D'où la surprise de Dupasquier après Budapest, qui eut pour première réaction à l'information de Whiting et Bauer : « Peut-être, et alors ? ». Selon lui, cette différence n'avait aucune importance concrète, aussi bien du point de vue du règlement que des performances. D'ailleurs, après vérification plus poussée, les pneus avant d'Alonso étaient finalement bien dans la limite définie, prouvant à ses yeux que l'avantage de la Renault n'était pas lié à cette astuce.
En revanche, les Williams faisaient partie des monoplaces suspectes avec une bande de roulement approchant les 276 mm... Ainsi après le Grand Prix de Hongrie 2003, une réclamation se faisait entendre avec modification du texte trois jours après afin d'empêcher toute interprétation controversée.
"Anomalie apparente" ?
Une modification qui laissa Michelin perplexe sur plusieurs points. Le texte décrivait la bande de roulement comme « toute partie du pneu en contact permanent et systématique avec le sol ». Sauf que, comme le fit justement remarquer Pierre Dupasquier, les pneus avant ne rentraient pas dans ces critères, puisque délestés ou en suspension lors de passages de vibreur !
Dans le même ordre d'idées, le texte ne précisait pas non plus à quel moment la mesure pouvait être effectuée, ni comment. Ceci alors que Michelin avait clairement spécifié la difficulté à mesurer un pneu usé après la course en raison de tous les paramètres influant sur la question. Pourquoi diable effectuer une clarification du règlement tout en y laissant des trous béants ?
Plus cocasse encore : il a fallu l'intervention de Michelin pour que la FIA annote dans son règlement de quelle façon la bande de roulement serait mesurée, ceci suite à la réunion évoquée par Dupasquier face aux instances dirigeantes. Avant cela, il n'y avait aucune précision officielle à ce sujet. En revanche, la limite de 27 centimètres était déjà en vigueur.
Notons que Michelin avait demandé une autre clarification à la FIA avant même son retour à la compétition, sur la question des rainures. En effet il n'était pas rare que les pneus rainurés d'après-course aient davantage l'apparence de pneus lisses « slicks »... alors que ces mêmes rainures devaient respecter une profondeur spécifique avant la course et rester apparentes durant celle-ci. La demande resta sans suite faute d'avoir trouvé un accord avec Bridgestone sur la question.
Le président de la FIA Max Mosley admit qu'il laissait volontairement ce type d'ouverture dans les règlements afin de permettre une réinterprétation si des innovations et autres découvertes venaient à remettre en cause la situation établie. Ceci tout en déclarant que la FIA devait « renforcer la règle et assurer que la partie se joue correctement », après avoir constaté une « anomalie apparente ». Des propos recueillis... après une visite de l'usine Ferrari avec Charlie Whiting, entre Budapest et le changement de règle.
Tous ces palabres donnèrent du grain à moudre à ceux qui soutenaient la thèse d'une collusion malhonnête entre FIA et Ferrari. Cela étant, Mosley précisa qu'il s'agissait d'une rencontre planifiée des mois à l'avance afin de dissiper tout malentendu. Aussi, d'autres observateurs soulignèrent avec justesse qu'une clarification du règlement allait moins dans le sens de la Scuderia qu'une disqualification pure et simple des pilotes Michelin dépassant les vingt-sept centimètres de contact...
Règlements de comptes
Mais le mal était fait : la Formule 1 retombait dans la polémique et Ferrari se retrouvait à nouveau dans l'œil du cyclone médiatique. 2002 fut particulièrement dommageable pour la Scuderia avec les fameuses consignes du Grand Prix d'Autriche décrétées au détriment de tout esprit sportif. Elle n'était donc plus dans les bonnes grâces du grand public et cette manœuvre sonnait pour beaucoup – acteurs du milieu ou simples fans – comme une attaque détournée pour conserver son bien, faute de pouvoir le faire « à la régulière ».
Ross Brawn ne fit rien pour calmer le jeu. Le directeur technique de Ferrari accusa ouvertement Michelin de tricherie dans la presse italienne, et il fallut toute la diplomatie de Dupasquier et ses pairs pour dissuader le grand patron Edouard Michelin d'attaquer Ferrari en diffamation. Brawn dut se justifier en conférence de presse le vendredi du Grand Prix d'Italie face à ses rivaux de Williams (Patrick Head), McLaren (Ron Dennis) et Renault (Flavio Briatore).
Une conférence où Brawn, parfois directement questionné par Head, peina à plaider sa cause, au point que sa défense fut accueillie par quelques rires du côté des journalistes présents dans la salle. Un des reporters demanda même ouvertement à Head s'il se souvenait d'un changement de règlement qui n'avait pas avantagé Ferrari ! Entre les huées de Spielberg 2002 et cette scène, une partie de la presse ne cachait même plus sa désapprobation des manœuvres de Ferrari. Même les médias italiens décrivirent Brawn comme « lancé dans la fosse aux lions ».
Brawn interrompit l'échange en rappelant la révolution sportive de cette saison justement initiée pour contrer la domination de la Scuderia, tout en dénonçant le climat de paranoïa régnant en Formule 1. Il rappela aussi que de nombreuses équipes – dont Ferrari – se sont retrouvées en cas d'illégalité involontaire. Ron Dennis mentionna les déflecteurs, allusion à la polémique de Sepang 1999 où Ferrari échappa à une disqualification prononcée à l'origine. Ce à quoi Brawn précisa que Ferrari a admis avoir demandé une clarification pour Michelin, là où McLaren n'a jamais précisé qu'ils étaient derrière la réclamation des déflecteurs ! Clairement une « ambiance de règlements de comptes », comme le rapporta Renaud de Laborderie,
Selon ce dernier, le texte de la conférence atteignit la taille record de dix feuillets ! Le contre-rendu fut ensuite étudié jusqu'à la dernière virgule par les experts juridiques de Michelin et Bridgestone. Ferrari fit même venir son avocat attitré, Me Henry Peter, afin de se protéger en cas de riposte de ses rivaux sur ce terrain glissant. On nota d'ailleurs que Brawn refusa de commenter ses propos d'origine et opta pour un discours plus nuancé, selon quoi Michelin n'avait commis acte conscient d'irrégularité, parlant davantage d'une « interprétation ».
"Une pollution politique tenace"
Heureusement, le Grand Prix d'Italie se déroula sans accroc de ce côté. Bien que convaincu de son bon droit, Michelin avait assuré ses arrières en apportant une nouvelle structure au cours des essais préliminaires sur le circuit italien. Non seulement celle-ci s'élargissait moins mais elle aboutissait à un gain de performance ! Hélas pour le fournisseur, Ferrari reprit l'avantage avec une pole et victoire de Michael Schumacher. Juan-Pablo Montoya échoua à cinq secondes après une chaude bataille au premier tour, tandis que Kimi Räikkönen se contenta de la quatrième place.
Le rapprochement entre le retour en force de l'armada rouge et le fameux changement de réglementation était tentant, sauf que cette victoire de Ferrari était attendue avant même que la polémique Michelin n'explose. La F2003-GA s'avérait plus adaptée pour le tracé transalpin que les FW25 et MP4-17D, avec sa configuration analogue à celle de Montréal. Idem pour Bridgestone, dont les gommes étroites s'exploitaient mieux que les bandes larges de Michelin en ces lieux. Aussi Ferrari multiplia les tests au cours d'essais préliminaires ici-même : 25 types de gommes – mélanges comme structures – y furent éprouvés afin de combler leur handicap !
De son côté, Michelin répéta à l'envie que les changements apportés n'avaient en rien dégradé leurs produits, que du contraire. Montoya ne fut en effet jamais distancé par Schumacher durant la course et selon Frank Williams, seul un mauvais départ l'empêcha de prendre l'avantage et le garder.
En dépit de cette situation établie, l'affaire Michelin avait instauré une ambiance malsaine dans le paddock. Dans leur analyse d'après-course, Jean-Michel Desnoues et Patrick Camus (Auto Hebdo) évoquèrent « une pollution politique tenace, profonde » avec « un air de revanche agressif, les uns voulant se venger d'avoir été traités de tricheurs, les autres prouver qu'avec des règles bien respectées, ils étaient les plus forts ».
L'histoire aurait pu s'arrêter là, et en un sens, ce fut le cas. La FIA déclara l'affaire close après que toutes les gommes se soient avérées conformes au soir du Grand Prix. Mais Jean Todt ne l'entendit pas de cette oreille. Après l'arrivée, le dirigeant français confirma qu'il avait toujours l'intention de porter réclamation auprès de la FIA afin de faire annuler certains résultats passés ! Il se basait sur l'article 179b qui permettait la révision de classements antérieurs si une équipe disposait de nouvelles preuves témoignant de l'illégalité d'un élément.
Une réclamation qui pouvait ou non intervenir « selon la tournure des événements », dixit Todt lui-même. Avec ces termes, il laissait libre court à l'interprétation d'observateurs qui imaginaient sans mal Ferrari aller au bout de cette logique si, au hasard, le championnat se concluait par une défaite de Schumacher...
Bien entendu, la presse anglaise mit la pression sur Todt, lequel répondit par une saillie pour le moins venimeuse. « Comment voulez-vous que l'on ne vive pas dans un état de paranoïa avec toutes les attaques et critiques dont nous sommes l'objet ? Regardez vous là, tous autour de moi comme des chiens... ».
Ce sentiment de victimisation se retrouvait aussi dans une moindre mesure chez Schumacher. Lorsqu'on voulut recueillir sa réaction face à l'affaire Michelin, Michael avoua que sa seule pensée fut d'imaginer comment les médias auraient réagi si l'irrégularité supposée s'était retrouvée du côté de Ferrari...
L'arroseur arrosé ?
Finalement la menace de Todt resta sans suite. Ferrari finit par triompher aux championnats, non sans un petit coup de pouce du destin quand la pluie s'invita à Indianapolis. Des conditions mixtes prirent place, où Bridgestone possédait un avantage non négligeable sur Michelin – 1,4 seconde par tour en moyenne selon Pascal Vasselon, responsable du programme F1 de la marque.
Schumacher y remporta la course devant Räikkönen et put assurer à Suzuka, non sans quelques frayeurs. Course où Juan-Pablo Montoya et Fernando Alonso menacèrent un temps Rubens Barrichello pour la victoire avant leurs abandons respectifs. Preuve supplémentaire que même avec des pneus corrigés, Michelin n'avait pas perdu la face en conditions ordinaires, ni gagné un avantage substantiel avec sa structure originale.
Néanmoins, si dans cette histoire, Bridgestone s'était placé du côté de l'assaillant et Michelin retrouvé sur le banc des accusés, les rôles furent plus discrètement inversés quelques mois plus tôt... En effet, entre les Grands Prix d'Autriche et de Monaco, Michelin consulta la FIA quant à la conformité des pneus Bridgestone. On l'a dit, ceux-ci étaient plus étroits que les Michelin de façon à ne pas trop influer sur l'aérodynamique des monoplaces concernées – principalement la Ferrari.
Mais cette étroitesse allait de paire avec une durée de vie plus limitée... en théorie. Constatant que Ferrari ne rencontrait aucun problème de la sorte, Michelin suspecta que Bridgestone utilisait des gommes plus dures à l'avant qu'à l'arrière, pratique rigoureusement interdite.
Si Michelin ne porta aucune réclamation officielle, la FIA confirma qu'elle avait enquêté sur le sujet. Et les équipes Michelin de constater le recul de Ferrari durant le week-end de Monaco au profit des Williams. Un changement hiérarchique qui se confirma durant la majeure partie de l'été, sauf sur les pistes plus adaptées à la F2003GA (Montréal et Silverstone). Ce qui tend à crédibiliser le scénario d'un changement de philosophie chez Bridgestone, bien que le manufacturier se défendit de toute tactique illégale comme de bien entendu. Et rien ne put concrètement prouver cette allégation.
En vérité, les Bridgestone avaient surtout souffert de la chaleur – caniculaire cet été là – et de leur isolement en tête de peloton. Mais on peut noter l'ironie qu'une enquête porte sur des pneus « trop étroits » pour être si performants, pour que quelques mois après, une plainte soit adressée sur des gommes « trop larges »...
Toute ressemblance...
Bien que rôdé à l'exercice de la guerre psychologique, en Formule 1 et ailleurs, Pierre Dupasquier ne put s'empêcher de regretter que « la confrontation a[it] été déplacée du terrain sportif au terrain politique et même « politico-merdique !» ». Après Monza, il s'épancha davantage sur l'ambiance délétère qui régnait en Formule 1 :
«Le premier but est de créer un climat de déstabilisation chez l'adversaire. Le second est de minimiser la capacité de travail de l'adversaire en l'occupant à autre chose. Le troisième est de pourrir le climat de façon telle que, quelque soit le résultat, il ne puisse pas servir à l'adversaire […]. Ce que nous vivons n'est pas notre métier, c'est apparemment celui de quelques-uns qui n'ont visiblement rien d'autre à faire que chercher des histoires là où il n'y en a pas, pour se trouver des excuses ou atteindre un objectif qu'ils ont peur de rater » (Auto Hebdo, N°1411)
Plus les choses changent, plus les choses restent les mêmes en Formule 1...