Si Pierre Dieudonné est bien connu pour sa carrière de pilote au Mans chez Mazda et ses apparitions dans les albums de Michel Vaillant, son rôle de directeur sportif chez WRT est méconnu.

Pourtant il est certainement l'une des clés des nombreux succès de l'équipe belge...

Pierre Dieudonné - Directeur Sportif de WRT

Comment on se sent après toutes ces saisons chez WRT ?

C'est une magnifique success story, je suis arrivé en 2011 et Vincent Vosse a créé l'équipe en 2010, on peut dire que je suis un petit peu la mémoire de l'équipe et de sa progression. Professionnellement j'avais déjà accompli beaucoup d'étapes mais j'ai vécu des années extraordinaires avec WRT. On vole de succès en succès, l'équipe a pris une certaine place sur la scène sportive internationale. C'est une très belle réussite à mettre à l'actif de Vincent Vosse.

En 2021 vous êtes passés tout prêt de la victoire à Spa... Vous l'avez vécu comment ?

A Spa on est devenu coutumiers de se présenter au départ avec des chances de succès, les années précédentes, la réussite n'avait pas été toujours de notre côté. On a eu de nouveau une course intéressante et on y a cru quasiment jusqu'à l'arrivée. On a été battus de peu mais on ne peut pas vraiment parler de défaite, il fallait un vainqueur et Ferrari a autant mérité son succès que nous.

Ce qui a été beau surtout, c'est que dans la phase finale, Dries Vanthoor s'est très bien comporté. Il aurait suffit qu'il élargisse un peu sa trajectoire pour que cela se termine mal, d'autres n'auraient pas hésité et ça aurait tout gâché... Le dépassement de Pier Guidi était superbe, une belle attaque et tout s'est déroulé de manière très fair-play.

Cette saison vous engagez 5 voitures en Endurance Cup et 4 en Sprint Cup. Vous avez dû changer des choses pour engager autant de voitures ?

Il nous est déjà arrivé d'engager ponctuellement autant voire plus de voitures. Engager 3 voitures c'est une chose mais au-dessus le mieux c'est de scinder l'équipe. Le travail de fond reste bien entendu le même mais sur le terrain il faut avoir des équipes bien distinctes.

Cette année particulièrement avec l'arrivée de Valentino Rossi, avec la pression que cela impliquait à tous les niveaux, on pouvait difficilement mettre tout le monde ensemble. Une équipe s'occupe de la #46 et de la #32 et l'autre s'occupe des autres voitures, les équipes ont les mêmes moyens et les voitures sont traitées équitablement.

Mon alter-ego Kurt Mollekens s'occupe de la #46 et de la #32 et moi des autres autos, cela fonctionne très bien comme ça. Au niveau des ingénieurs, des datas, des mécaniciens nous avons des bases très solides. Tout le monde coopère dans une bonne ambiance, c'est efficace.

Début Juin, vous allez avoir un week-end chargé avec en parallèle la journée test des 24 Heures du Mans et la manche du Fanatec GT World Challenge Endurance au Paul-Ricard, comment abordez-vous ce week-end ?

En effet, cette course de 6 heures au Paul-Ricard est très importante, c'est une révision générale pour les 24 Heures de Spa. Elle se termine à minuit le samedi et l'on devra être le dimanche à la journée test au Mans. Cela pose quelques problèmes de logistique et il y aura sûrement beaucoup de fatigue mais on va y arriver.

Et après les 24 Heures du Mans on devra enchaîner sur Zandvoort en Sprint Cup et 2 jours après il y aura les journées test à Spa. WRT a l'habitude de mener de front différents programmes.

A l'époque où vous étiez pilote, vous avez connu le Groupe C et les constructeurs qui vendaient leurs voitures à des équipes clientes. C'est cette orientation qui est donné au LMDh qui fera son apparition l'an prochain. Qu'en pensez-vous ?

C'est évidemment enthousiasmant pour tout le monde. Il faut se dire par contre qu'entre l'annonce de la réunion de l'Endurance européenne et américaine sur un règlement commun, que tout le monde a salué, il y a quand même eu des changements qui font que les constructeurs sont désorientés.

Il faut à cela ajouter l'électrification de la gamme des constructeurs, on a vu des marques abandonner l'Endurance pour aller en Formula E et revenir en Endurance avant d'envisager encore autre chose... On a le sentiment que les constructeurs sont déboussolés, le conflit actuel ajoute de l'incertitude, il est probable que ce sera difficile pour le sport automobile.

Nous ne sommes plus dans l'alignement parfait des planètes que l'on a eu lors de l'annonce du LMDh. Cette formule va bien marcher, mais peut être pas aussi bien que cela aurait pu où pas aussi bien que ce que les passionnés auraient pu l'espérer.

Notre confrère Laurent Mercier (Endurance-Info) a révélé que Toyota s'orienterait vers la construction d'une nouvelle auto pour 2023. Pour vous, est-ce trahir l'esprit du règlement voire un contournement des règles en bonne et due forme ?

C'est un éternel recommencement. Les règlements sont fait pour être, si pas contournés, exploités à fond ! Maintenant, est-ce que cela va changer la donne ? Je ne pense pas. Toyota a fait sa voiture assez tôt, la réglementation n'était pas figée...

Les gens arrivés après comme Porsche ont pu mieux orienter leurs études sur un règlement qui était plus certain. Si Toyota construit une nouvelle auto, ils ne trichent pas. Pour en revenir à la comparaison avec le Groupe C, Porsche semble comme à l'époque s'orienter sur la vente de voitures à des équipes privées. Si BMW où par exemple Cadillac font la même chose, cela fera un très beau championnat.