A l'issue de sa seconde victoire sur un circuit ovale à Motegi pour le compte de l'IndyCar iRacing Challenge, Simon Pagenaud nous a accordé un entretien pour nous expliquer ses nouvelles activités quotidiennes.

Du réel au virtuel, Simon Pagenaud participe à l'IndyCar iRacing Challenge officiellement soutenu par la NTT IndyCar Series, il y réalise de belles performances puisqu'il s'est imposé successivement sur les deux dernières courses au Michigan International Speedway et au Twin Ring Motegi. Il nous livre son nouveau mode de vie depuis le début du confinement.

"Beaucoup de fans me suivent sur iRacing..."

Simon, quelles sont vos journées types désormais pendant ce confinement ?
Ce qui est étonnant et difficile à expliquer, c'est que je suis plus occupé que d'habitude, j'ai commencé une routine pour ce confinement, débuté le 15 mars dès notre retour de St. Petersburg. Dans un premier temps, j'ai dû m'équiper d'appareils pour les entraînements physique à la maison : le vélo, le crossfit, le rameur, j'ai désormais tout le matériel nécessaire et je m'entraîne 3 heures tous les matins. Ça occupe déjà mes matinées !

De 12h00 jusqu'à 15h00, on dédie ce timing aux sollicitations des médias et puis aux réseaux sociaux qui sont très demandeurs de contenus donc on a mis en place des programmes et challenges pour continuer d'animer la communauté. J'ai beaucoup de fans qui me suivent sur iRacing, j'ai même l'impression qu'ils sont plus nombreux que sur les courses réelles.
C'est très important pour eux aussi de voir que nous sommes là, à leurs côtés et qu'on ne les laisse pas tomber même dans cette période. Ensuite à partir de 15h00 je suis dans le simulateur jusqu'à 18h00. Ensuite, je prends enfin du temps pour m'occuper de ma petite famille, ma femme, Norman (NDLR : son chien !) et les activités à la maison.

Avant cette période de confinement, faisiez-vous du simulateur chez vous ?
Je faisais déjà du simulateur mais chez Chevrolet pour préparer nos courses, c'est un autre type de simulateur beaucoup plus élaboré. L'inconvénient c'est qu'on ne peut pas y organiser des courses. On y enchaîne des tours de préparation pour mettre au point nos réglages mais l'entraînement et la course, ce sont deux choses très différentes. Dans iRacing, j'ai découvert de nouvelles choses, comme apprendre le comportement des pilotes, la consommation de l'essence et l'usure des pneus (dans le jeu), ce sont des paramètres très intéressants à étudier dans iRacing.

"Le simulateur cherche à tromper le cerveau..."

Quelles sont les différences entre le réel et le virtuel ?
Il n'y a pas beaucoup d'efforts physiques dans le simulateur comparé au réel, c'est sûr. Les efforts physiques dans le simulateur sont assez faibles, je n'encaisse pas les "G" latéraux de la voiture, la direction de la voiture est plus assistée, on n'est pas dans la même difficulté physique. Dans une course, mon cœur bat entre 160 et 165 ppm, là il doit être à 110 au maximum.

Le plus gros effort que demande le simulateur est d'ordre de la concentration. Il est assez difficile de rester concentré dans le simulateur pendant 2 heures, le but de ce dernier est de "tromper" le cerveau, de lui mentir. Le simulateur donne des informations au cerveau qui n'existent pas comme l'impression de vitesse, le ressenti de l'adhérence, la perception des distances, tout ça est une forme de tricherie et le cerveau doit lutter en permanence contre ça, donc c'est un très bon exercice.

Allez-vous continuer avec cet entraînement sur iRacing, une fois revenu au réel ?
Oui, je le pense, j'espère vraiment que l'on va pouvoir organiser quelque chose avec les pilotes, comme un championnat interne parce que c'est intéressant de rouler ensemble et d'accroître sa connaissance des autres pilotes. Personnellement, je vais me servir de iRacing comme d'un outil de préparation de façon beaucoup plus intense, j'ai l'impression en ce moment de progresser sur quelques aspects de mon pilotage et ça c'est positif.

Qu'est-ce que vous apporte Race Clutch (équipe française de simracing) pour cette expérience iRacing ?
C'est amusant car la première rencontre s'est faite à Montmorillon quand j'ai fais ma tournée médiatique après ma victoire des 500 Miles d'Indianapolis, j'ai rencontre Richard Arnaud qui a créé cette structure Race Clutch, puis on avait comme ami en commun, Julien Fébreau, qui nous a permis de nous rapprocher et de discuter d'une préparation pour les courses sur iRacing.

Puis au moment de débuter l'IndyCar iRacing Challenge, mon agent était aussi en relation avec Richard Arnaud et il m'a vivement conseillé qu'on fasse cause commune pour une préparation au mieux dans le but de faire les choses bien, à 100% comme je le fais toujours.
Après une première course d'essai, j'ai vu que j'avais une marge de progression. Ils m'ont bien aidé pour calibrer mon volant, le pédalier et mon écran, et puis ils m'ont donné les conseils utiles pour le simracing qui ne sont pas si faciles à déceler si ce n'est avec le temps et l'expérience. Ils me sont vraiment d'une grande aide dans mes succès et je les remercie pour ça !

Team Penske - Simon Pagenaud - iRacing

"le rachat de l'IndyCar par Penske, le bon timing..."

Pensez-vous qu'il sera difficile de se remettre dans le rythme, une fois revenu au réel ?
Non, je ne pense pas, de mon côté je me sens prêt, j'ai encore plus de temps pour ma préparation physique. Mentalement, je me sens bien et iRacing me permet également de rester au contact de la course, ma préparation avec mon ingénieur est intacte car on travaille ensemble sur iRacing. On a pu aussi travailler sur les stratégies, on a amélioré beaucoup de choses, je suis content et je ne suis pas inquiet de notre rythme quand on reprendra le volant.

Comment voyez-vous la situation après cette crise, le sport va-t-il réussir à se relever rapidement ?
C'est assez compliqué de répondre à cette question car on n'en voit pas le bout pour l'instant. De notre côté, on a des espoirs de reprise, mais les calendriers sont ajustés en fonction des nouvelles dates. Du côté de l'IndyCar on peut compter sur le nouveau propriétaire, Penske Corporation, qui est assez solide financièrement tout comme l'IMSA qui appartient à la NASCAR, néanmoins la difficulté viendra des partenaires.
Comment vont-ils gérer la sortie de la crise et ne vont-ils pas remettre en cause leur implication dans le sport automobile ? C'est la même chose pour tous les sports et tout ce qui concerne le divertissement, ces activités vont souffrir, c'est certain.

Ce qui est dommage pour nous c'est que nous étions dans une bonne dynamique pour l'IndyCar. Le timing du rachat de la NTT IndyCar Series par la Penske Corporation en fin d'année dernière est peut-être salvateur, qui sait ce qui se serait produit sans ça... Aussi dur que cela puisse être pour Penske, comme pour les pilotes et tous les membres de l'IndyCar, c'est quand même un avantage qu'ils soient aux commandes de la discipline.

Direction l'entraînement sur le COTA à présent ?
Oui, complètement, la prochaine course c'est le COTA au Texas, c'est un nouvel entraînement à programmer car il y a 20 virages à étudier donc c'est encore un peu plus de travail. Et pas de panique, cette fois-ci, les trajectoires du circuit seront bien respectées (NDLR : contrairement à la course de 2019 où les voitures allaient très au large), ils nous ont annoncé hier qu'il fallait respecter les lignes de course.

Crédits Photos : Chris Graythen/Getty Images