De la France aux Etats-Unis en passant par le Canada ou encore la Grèce, la carrière de Florian Barral est atypique. Véritable globetrotteur du rallye, le copilote Français de 29 ans voit la discipline sous un autre angle depuis ses premières expériences internationales en 2018. La semaine dernière, nous avons pu nous entretenir avec lui, à l'aube d'une saison qui s'annonce une nouvelle fois riche en aventures. 

Tout juste revenu des États-Unis pour le 100 Acre Wood Rally, la deuxième manche du championnat national dans lequel il est engagé avec Patrick Gruszka sur une Hyundai I20 R5, Florian Barral s'est entretenu avec nous pour raconter son parcours pas comme les autres. A 29 ans, le copilote Français est un véritable globetrotteur du rallye. Des routes du CFR à celles de l'Ohio en passant par des rallyes au Canada, au Mexique ou encore en Grèce, Florian Barral vit une carrière unique, pleine d'aventures et découvertes, sportives mais aussi humaines.

Du Championnat de France à l'ARA aux États-Unis

Florian avant de rentrer dans le vif du sujet, petite remise en contexte. Tu es avant tout issue de la formation Française du rallye puisque tu es passé par l'opération Rallye Jeunes mais aussi les championnats de France Asphalte et Terre dans lequel tu roules toujours. 

Pour moi ça a commencé en 2018 avec effectivement mes premières sélections Rallyes Jeunes copilote mais avant ça je roulais déjà un peu puisque j'avais une Peugeot 106 N2 avec laquelle j'avais roulé pour la dernière fois au Var en 2017. A cette époque je mixais à la fois pilotage et copilotage mais comme j'étais étudiant je faisais quand même beaucoup de rallyes en copilote car c'était plus facile financièrement, plutôt que de rouler avec ma 106. J'avais eu des supers opportunités puisqu'en 2017 j'avais par exemple fait le championnat de France Junior avec Julien Pontal. J'avais donc des programmes complets dans des formules de promotions qui s'offraient à moi et j'ai vu que la fédération organisait l'opération Rallye Jeunes alors je me suis dit que j'allais le tenter. Je suis arrivé jusqu'en finale,  je n'ai pas gagné, mais malgré ça m'a tout de même apporté énormément de choses puisque suite à ça j'ai été contacté par Emmanuel Guigou avec qui j'ai roulé pendant deux ans. Cette période a été le déclenchement de ma carrière professionnelle en rallye en tant que copilote.

Tu as donc débuté ta carrière en France et de manière assez traditionnelle. Quand as-tu commencé à t'ouvrir à des expériences à l'international et quel a été l'élément déclencheur ? Comment t'es tu retrouvé embarqué dans ces aventures au lieu de rester uniquement en France ?

En fait ça commence aussi en 2018. Il faut savoir qu'à la base je suis saisonnier, moniteur de ski l'hiver et locations de voitures à l'aéroport de Nice l'été. Quand j'ai eu cette opportunité qui s'est créée avec Rallye Jeunes, j'étais déjà engagé en Championnat de France Terre avec Florent Alvernhes quand Emmanuel Guigou m'a contacté pour le Championnat de France Asphalte. Je me suis donc retrouvé engagé sur les deux Championnats de France puisqu'il n'y avait aucun conflit de dates.  Je suis allé voir mon patron avec qui j'avais déjà prévu de faire la saison d'été et malheureusement il ne pouvait pas me donner toutes les disponibilités et je devais donc faire un choix. Je n'ai pas eu envie de choisir, j'avais envie de rouler et je me suis dit que en tant que saisonnier qui parlait déjà bien Anglais à l'époque, je retrouverais facilement un travail lié au tourisme sur la Côte d'Azur. Je me suis dit qu'une opportunité comme ça n'arrivait qu'une fois dans la vie alors c'était le moment d'essayer. J'ai donc décidé de sauter le pas et de m'engager dans les deux championnats.

À ce moment là, Emmanuel Guigou avait repris RRS (ndlr. entreprise spécialisée dans la conception et la fabrication d'équipements et accessoires pour le sport auto) et il sponsorisait Bryan Bouffier qui participait au Championnat de France Asphalte. Ce qu'il faut savoir c'est que Bryan Bouffier est très connu en Pologne puisqu'il a souvent roulé et gagné là-bas, et il s'avère que l'équipe avec qui je roule actuellement aux USA est d'origine Polonaise, donc une connexion avait déjà été faite entre eux puisque Bryan avait déjà roulé là-bas au début des années 2010. Après sa blessure à Ypres, il retournait à la compétition aux États-Unis mais il n'avait pas de copilote et il a donc appelé Emmanuel qui l'a redirigé vers moi. Je sortais de Rallyes Jeunes à peine 6 mois auparavant alors quand Bryan Bouffier t'appelle pour aller rouler aux Etats-Unis ça fait quelque chose. J'ai su saisir l'opportunité et je remercie encore Florent Alvernhes de m'avoir laissé aller rouler là-bas puisque sur le même weekend on aurait du rouler ensemble sur un rallye. Un mois plus tard je me retrouvais dans le Minnesota pour rouler avec Bryan Bouffier et j'ai fait en même temps la connaissance du team Green APU (ndlr. son équipe actuelle en ARA) puisque c'est avec eux qu'on roulait.

Ma première expérience à l'étranger c'était donc aux États-Unis, c'est une expérience qui m'a énormément plu, encore aujourd'hui j'adore, j'ai toujours ce rêve Américain et c'est pour ça que j'y retourne régulièrement. Ca m'a donné envie d'en faire plus et ça m'a conforté dans l'idée que c'était ça que je voulais faire. J'ai aussi eu la chance de tomber avec des pilotes qui m'ont permis de faire des championnats plus internationaux et qui m'ont aidé à progresser dans ma carrière. Au final cette première expérience internationale en a appelée d'autres.

En 2022 le patron du team Green APU (ndlr. le père de Patrick Gruszka, actuel pilote de Florian en ARA) m'a rappelé pour me proposer de faire la saison avec son fils et comme ça collait avec mes dates c'était parfait pour moi et je suis arrivé là-bas pour la troisième manche de la saison.

Pour revenir sur ta toute première expérience aux États-Unis, même si tu ne devais pas être totalement dépaysé car tu parlais Anglais et tu avait aussi ce "rêve Américain", on imagine que cela devait quand même être quelque chose d'extraordinaire. Comment te sentait tu, à peine 6 mois après l'opération Rallye Jeunes ? 

Je me revois encore dans l'avion pour aller là-bas, j'avais tout bien organisé, tout travaillé mais en terme d'organisation une fois sur place c'est plutôt bien organisé. Il y a forcément des couacs, le rallye n'étant pas le sport automobile numéro 1 aux USA, ce sont surtout des passionnés qui organisent les rallyes mais j'avais toutes les infos dont j'avais besoin mais je me rappelle relire une 25ème fois tout ce que j'avais à savoir dans l'avion pour être sûr de n'avoir rien oublié et pour être à la hauteur des attentes et surtout vis à vis de Bryan Bouffier. À ce moment là je ne l'avais encore jamais vu, je l'avait seulement eu au téléphone et encore un an auparavant c'était mon fond d'écran sur mon ordinateur alors quand on te dit que tu va rouler avec lui aux États-Unis c'est quelque chose ! C'est un partage entre le rêve, une certaine forme d'accomplissement et ce côté one shot où il faut faire du bon travail et ne surtout pas passer au travers. Au final ça c'est très bien passé et Bryan m'a même recontacté plus tard pour faire du développement pour Hyundai et Renault.

C'était un mélange de beaucoup de choses mais surtout une envie de bien faire pour prouver que je méritait ma place.

Lorsque l'on copilote partout dans le monde et avec des pilotes de toute nationalité comme tu le fais, comment arrive on t-on à s'adapter à chaque pilote, que ce soit sur le plan culturel comme sportif ?

Je pense que déjà il faut avoir une grande ouverture d'esprit, culturellement il faut vraiment être ouvert à tout un tas de choses. Au niveau des barrières linguistiques, je dirait que aujourd'hui je suis suffisamment à l'aise en Anglais pour m'adapter et comprendre. En fait c'est aussi ce côté ouverture internationale et découverte qui me motive. Parfois quand j'y pense c'est assez fou de se dire qu'un pilote Indien qui habite à l'autre bout de la planète (ndlr. Gaurav Gill avec qui Florian a roulé lors de l'Acropole 2023 en WRC2) ait attendu parler de moi et m'ait contacté pour rouler et travailler avec moi. Il y a le côté sportif qui reste la priorité car il faut signer le meilleur résultat possible mais il y aussi tout un côté humain avec un partage de culture qui est super intéressant. Lorsque j'ai passé la semaine avec Gaurav pour le Rallye de l'Acropole j'ai découvert pleins de choses sur son pays, des anecdotes sur sa culture, c'est très enrichissant. Encore une fois même si le sportif reste la priorité j'accorde énormément d'importance à l'aspect humain. Après sur l'adaptation sportive chaque pilote quelque soit sa nationalité a son propre système de notes ou sa propre interprétation des angles et c'est juste une habitude de travail à avoir. Aujourd'hui je travaille beaucoup avec la vidéo en amont afin de m'imprégner d'un certain nombre de choses et jusqu'à présent ça se passe plutôt bien dans l'ensemble.

Avec Patrick et aussi avec l'aide d'un coach Finlandais, Christian Solberg, on a travaillé tous les trois ensemble pour établir un nouveau système de notes. C'était assez intéressant à vivre et à travailler car on avait la vision très Américaine / Anglo-Saxonne de Patrick, la vision nordique de Christian et puis ma vision très Francophone et en mélangeant tout ça on a pu créer un système de notes qui correspond bien à Patrick.

Et justement en ayant travaillé avec autant de pilotes différents on imagine que tu dois désormais avoir une grande capacité d'adaptation et tu doit être en mesure de performer rapidement quelque soit le pilote avec qui tu roule…

Oui tout à fait. D'un côté c'est très plaisant de souvent rouler avec Florent Todeschini car on se connaît très bien et on a grandi ensemble dans ce sport, il y a vraiment un fil conducteur à notre carrière mais d'un autre côté c'est aussi très intéressant de souvent découvrir de nouvelles choses.

Pour moi l'une des notions clés pour être un bon copilote c'est justement l'adaptation, en cumulant les pilotes, les courses et même parfois des organisations qui peuvent être très différentes du WRC où il faut parfois chercher longtemps lorsque l'on veut une info particulière. Il faut savoir prévoir l'imprévisible car dans certains rallyes c'est toujours un peu l'aventure.

Parlons maintenant du Championnat ARA, le championnat national des États-Unis dans lequel tu roules. C'est un championnat très peu connu et suivi en France, explique nous le fonctionnement de ce dernier à quel point il peut être différent des championnats nationaux que l'on connaît en Europe. 

Pour faciliter la comparaison, on va dire que l'ARA (ndlr. American Rally Association) c'est un peu l'équivalent de la FFSA. Le plus gros problème qu'ils doivent affronter c'est la taille du territoire. En Championnat de France, sur 9 manches les deux rallyes les plus éloignés ne sont séparés que par une dizaine d'heures de route alors que aux États-Unis c'est probablement la distance la plus courte à parcourir entre deux manches. Pour donner un exemple, l'an dernier on disputait un rallye dans le Maine (ndlr. Etat le plus au Nord Est du pays) et les manches suivantes se déroulaient complètement de l'autre côté du pays dans l'Etat de l'Oregon et l'Etat de Washington. Il y a plusieurs milliers de kilomètres entre ces manches et logistiquement c'est donc beaucoup plus difficile à assumer, tout comme le coût financier pour les équipages. C'est une première différence à prendre en compte car à voiture égale comme par exemple avec des R5/Rally2, une saison en Championnat de France coûte beaucoup moins cher qu'une saison aux Etats-Unis. En ARA, si par exemple il y a des tests à faire le mercredi avant le rallye, le camion est déjà partie depuis le vendredi la semaine avant. Sur le fonctionnement, comme en France on retrouve un peu les mêmes personnes. De la même manière que l'on retrouve les membres de la commission asphalte et terre en France, on retrouve aussi des personnes récurrentes aux États-Unis car ce sont des membres de l'ARA et ces derniers font le lien entre le championnat et les organisateurs des différentes épreuves.

Là où c'est un peu plus différent de ce que l'on a en France ou en Europe c'est dans l'organisation même des épreuves. Il y a quelque chose que j'adore là-bas et je pense que l'on devrait l'importer en Europe c'est le concept de parc exposé. En ARA il n'y a pas de parc fermé, tout est ouvert au public et honnêtement je n'ai jamais signé autant d'autographe qu'aux États-Unis. Le parc exposé c'est comme un parc fermé sauf que l'on est en centre ville dans des villes de taille moyenne. Le centre ville est fermé et les voitures sont toutes exposées pendant une heure, on est en combinaison et les gens viennent voir les voitures, demander des autographes, faire des photos, etc. C'est vraiment le show à l'Américaine et je trouve ça super. Ce dont on souffre en France et en Europe c'est la distance avec les fans car tout est toujours fermé. Que ce soit le parc fermé ou l'assistance il faut souvent des pass pour rentrer. Je peux comprendre que ce soit délicat pour un quelqu'un comme Ogier par exemple de rester une heure au milieu de la foule et que ce serait difficile à mettre en place mais je trouve que ce système de parc exposé fait connaître la discipline aux gens et le public adore ça.

Même lorsqu'il y avait Ken Block ou Travis Pastrana, les gens allaient faire des photos de leurs voitures comme ils allaient faire des photos de la dernière voiture du rallye. L'ARA se veut très proche des gens et je trouve que c'est un gros point positif.

Ensuite il y a un point de règlement qui est très différent là-bas et qui je trouve, est une chose intelligente, c'est le fait d'avoir un temps imparti pour faire la spéciale. Par exemple sur une spéciale de 10 kilomètres, si tu as 13 minutes pour faire la spéciale et que tu dépasse tes 13 minutes cela restera ton chrono sur la spéciale. Par contre derrière, il y a un temps imparti pour faire la liaison qui est différent du temps imparti pour faire la spéciale. Si tu as mis 20 minutes pour faire la spéciale tu aura perdu ces 20 minutes mais cela ne débordera pas sur le temps de liaison. Si tu as dix minutes pour faire la liaison tu auras toujours ces dix minutes, malgré le retard pris sur la spéciale.

Je trouve ca intelligent car les Américains sont très respectueux du code de la route, il y a très peu de radars et très peu de policiers sur la route et justement ce système de temps imparti différent pour la spéciale et la liaison permet aux équipages de prendre leur temps en liaison pour respecter le code la route et rouler en toute sécurité.

Le parc exposé en ARA

Le parc exposé en ARA, ici lors du 100 Acre Wood Rally | © Florian Barral

En dessous du niveau national, l'ARA se divise aussi en divisions régionales, comme c'est souvent le cas dans les sports aux États-Unis, il s'agit donc d'une sorte de division 2 plus adaptés à des petits budgets ?

En fait dans le championnat national on dispute 100% du parcours mais en championnat national un équipage peut très bien s'inscrire en régional en disputant donc le même rallye mais avec quelques spéciales en moins. On a certains équipages qui font toute la saison nationale mais inscrits en régional et ils marquent donc des points pour les trois régions Ouest, Central et Est.

Lorsque l'on découvre l'ARA la chose qui surprend le plus c'est probablement la liste des voitures engagées. En dehors des R5/Rally2 et des Rally3, on a l'impression que l'on peut faire rouler n'importe quelle voiture, le tout dans des catégories différentes des catégories FIA que l'on connaît en Europe. 

Oui tout à fait. En fait en ARA l'organisation se base sur le nombres de roues motrices. On retrouve la catégorie RC2 de la FIA mais derrière on va avoir par exemple la catégorie Open 4 roues motrices ou "O4WD". Il s'agit plus ou moins de la catégorie "reine" mais elle englobe beaucoup de voitures. Une WRC comme la I20 de Ken Block ou encore la Subaru sont dans cette catégorie mais dans le même temps la Fiesta Rally3 est aussi dans cette catégorie. Il y a un petit peu tout et n'importe quoi dans cette catégorie et cela donne lieu à des voitures assez insolites. Par exemple on a Patrick Moro qui roule avec une Chevrolet Sonic 4 roues motrices et équipée d'un V8 de 350 chevaux. C'est une voiture que j'adore car au-delà du son du V8 et de son look, c'est une voiture bien construite et surtout c'est un prototype maison. C'est cette différence entre toutes les voitures qui est assez incroyable. Ensuite il y aussi la catégorie O2WD pour Open 2 roues motrices et puis les deux catégories limited 4 et 2 roues motrices dans lesquelles on retrouve des voitures plus proches des modèles de production. Ce serait un peu l'équivalent d'un Groupe N mais un Groupe N bien modifié.

La Hyundai I20 R5 de Patrick Gruszka et Florian Barral engagée par le team Green APU

Patrick Gruszka et Florian Barral dans leur Hyundai I20 R5 du team Green APU | © David Cosseboom

Pour rester sur les modèles un peu improbables il y a aussi une Subaru Impreza équipée d'un moteur Ferrari V12...

Oui ! Ce sont justement des amis à moi. Il faut savoir une chose c'est que Subaru est un constructeur très présent aux États-Unis et avec Toyota c'est probablement le constructeur étranger le plus représenté sur le territoire. En Europe on en voit plus beaucoup mais là-bas il y a tout un marché et Subaru joue beaucoup sur ça. La Subaru officielle qui est pilotée par Brandon Semenuk c'est Vermont SportsCar qui la prépare et la fait rouler mais sous engagement officiel de Subaru. Aux États-Unis à cause de certaines lois sur le protectionnisme il est impossible de faire rouler des voitures qui ne sont pas déjà présentes sur le territoire et c'est pour ça que l'on voit beaucoup de Ford Fiesta et de Subaru. En plus de ça, Subaru met en place des récompenses pour les dix premiers engagés en Subaru. C'est pour cela que sur la liste des engagés on voit beaucoup de Subaru, à cause de ces lois sur le protectionnisme mais aussi parce qu'il y a un énorme engagement du constructeur derrière. Pour revenir sur cette fameuse Impreza à moteur Ferrari, l'équipage a monté la voiture avec des amis, donc encore une fois et comme pour la Chevrolet Sonic ce sont des projets qui se lancent et surtout des projets maison.

Justement en parlant de Subaru l'attraction principale du championnat ce sont les voitures officielles qui sont à mi-chemin entre une WRC moderne et une Rally2. Comment vous, les autres équipages, voyez la présence de Subaru dans le championnat avec tous leur moyens financiers et une voiture largement au-dessus du lot ? La présence d'une équipe avec de tels moyens est-elle gênante ou plutôt bien vue ?

Disons qu'il y a à la fois des arguments pour et contre. Mon équipe met beaucoup de moyens en place pour essayer de faire du mieux possible comme par exemple avoir fait venir une R5 d'Europe mais il est évident qu'une R5 ne peut pas rivaliser avec la Subaru officielle. Le weekend dernier au 100 Acre Wood Rally on a l'exemple de l'Irlandais Barry McKenna qui a du légèrement modifier sa Fiesta WRC 2017 pour pouvoir continuer à rouler (ndlr. en retirant ou réduisant certaines pièces aéros) et ses temps étaient proches de la Subaru. En ce qui nous concerne et surtout sur un rallye où il faut du moteur comme le 100 Acre Wood Rally, impossible de tenir le rythme avec le moteur 1.5L d'une R5 face au 2.2L de la Subaru. Je ne sais pas combien de chevaux développe la Subaru car le secret est bien gardé mais c'est clair qu'il y a un delta. En terme de performance la Subaru est vraiment difficile à aller chercher, on essaye de faire bouger les choses mais cela reste un peu David contre Goliath.

Pour terminer sur l'ARA, quelles sont les particularités des rallyes présents dans le championnat et y'a t-il des différences majeures avec les rallyes que l'on connaît en Europe ?

En ARA on va se rapprocher de certains terrains que l'on peut retrouver en Europe comme par exemple en Finlande mais avec les jumps en moins. D'un point de vue grip et vitesse on est sur quelque chose d'assez similaire. Il y a certains rallyes avec pas mal de balayage mais dans l'ensemble on est sur des chemins très compactes et très travaillés, on a beaucoup moins de terrains cassants comme en France. Quoiqu'il en soit on a quand même une belle diversité dans le championnat comme on peut l'avoir dans nos championnats Européens. Chaque rallye est différent, ce que l'on a en Ohio on ne l'aura pas dans un autre État et inversement. Je dirais que le point commun la plupart du temps c'est que ce sont souvent des virages où l'on peut embarquer beaucoup de vitesse. Dans le rythme d'annonce des notes c'est un petit exercice d'adaptation.

Comment le championnat pourrait se développer ou même s'exporter en dehors du pays et surtout vers l'Europe ? Y'a t-il un moyen pour le championnat de gagner en popularité et de dépasser les frontières des États-Unis ?

Il faudrait plus de voitures qui peuvent jouer aux avants postes mais d'un autre côté amener plus de voitures est aussi difficile car il y a peu de rallyes. Cela reste difficile de trouver des gens intéressé pour rouler car le championnat reste quand même peu connu et puis les rallyes sont vite très éloignées de là où les gens habitent.

Comment te vois tu évoluer dans les années à venir ? On imagine une volonté de rester en ARA mais y'a t-il un championnat quelque part dans le monde ou même un rallye que tu aimerait faire en particulier ?

Comme tout passionné, mon objectif reste le Championnat du Monde avec un baquet officiel. Maintenant les places sont chères et limités donc c'est pour ça que plutôt que de rester chez moi j'ai pris la décision de faire quelque chose de différent et qui m'apporte énormément. Si les portes du WRC se ferment je n'ai pas l'intention d'arrêter de rouler, je compte bien faire ça encore longtemps. Récemment j'ai du refuser une proposition pour aller rouler en Nouvelle-Zélande sur l'Otago Rally et c'est quelque chose qui me frustre énormément car rouler en Australie ou en Nouvelle-Zélande c'est vraiment un rêve pour moi donc le championnat Néo-Zélandais c'est quelque chose qui me branche pas mal. L'an dernier j'ai aussi du refuser une proposition pour aller rouler en Indonésie qui a aussi l'air d'être un championnat intéressant. Globalement je suis très intéressé par tout cette partie du globe et puis il y a aussi l'Amérique du Sud que je n'ai pas encore faite. Ce ne sont pas forcément des championnats en particulier mais surtout des destinations.

Ce qui me plaît avec le rallye c'est que ça me permet de découvrir, contrairement au circuit où l'on reste dans l'enceinte du circuit quelque soit l'endroit. En rallye on est vraiment on cœur de ce qu'il se passe et même si l'aspect sportif reste ma priorité il y a tout cet aspect humain qui culturel qui me plaît aussi et dont j'essaie de profiter un maximum lors de mes déplacements.

Pour finir, comment arrives tu à t'organiser lorsque tu as un programme comme celui que tu avait en 2023, avec deux championnats de part et d'autre de l'Atlantique plus quelques autres rallyes en Europe. Le rythme n'est-il pas trop contraignant ou épuisant ?

Je pense que déjà je me suis habitué au décalage horaire, je n'ai plus l'impression de le subir. Maintenant j'arrive à ajuster mon décalage, savoir à quel moment dormir dans les avions, etc. Le sport automobile est mon métier à plein temps donc on va dire que j'ai suffisamment de temps pour préparer mes courses proprement. C'est sûr que cela demande de l'organisation mais c'est jouable et puis à côté j'arrive à rester actif et à faire du sport. Je ne pense pas que ce soit une difficulté à condition d'être bien organisé. Par contre, c'est sûr que lorsque tu dois enchaîner cinq rallyes en cinq semaines avec un déplacement aux États-Unis au milieu je ne pense pas que ce soit optimal, donc c'est pour ça j'essaye aussi de gérer mon planning de manière à toujours laisser un peu de repos à plusieurs moments pour pouvoir mieux travailler les courses suivantes.

Crédit photo de couverture: David Cosseboom.