Les passionnés de sport auto et plus précisément des 24 Heures du Mans, connaissent "Le Mans" de Steve McQueen. Mais l'histoire qui met en scène l'acteur d'Hollywood devait à l'origine être centrée sur la Formule 1.

Alors que beaucoup de passionnés se sont rués dans les salles pour voir "Le Mans 66", certains puristes ont regretté quelques incohérences avec la réalité. Surprise ? Il fallait s'y attendre, c'est Hollywood et pas un reportage créé par des journalistes présents sur place à l'époque...

"Le Mans" de Steve McQueen aurait pu être "Grand Prix"

On connait la passion pour l'automobile et le sport automobile de Steve McQueen, la star d'Hollywood qui reçut le succès dans "La Grande Evasion" (1963), et s'apprêta à apparaître dans "Bullitt" (1968) et "L'affaire Thomas Crown" (1968), avait déjà songé à un film sur le sport auto, la Formule 1 plus précisément.

Ce sont les mémoires de Gérard Crombac (le journaliste suisse émérite et spécialisé des sports automobiles, amis des pilotes et qui assistera à 578 Grands Prix dans sa carrière) qui nous apprennent cette anecdote.

En 1966, Gérard Crombac reçu un coup de fil de la part du réalisateur américain John Sturges ("Règlement de comptes à O.K. Corral", "Les Sept Mercenaires", "La Grande Evasion"...) qui lui annonça qu'il était à Paris en compagnie de Steve McQueen et que les hommes souhaitaient louer le circuit de Reims-Gueux pour tourner un film sur la F1.

Gérard Crombac disposait d'un réseau tout a fait exceptionnel, c'est le pilote Stirling Moss qui conseilla le réalisateur de l'approcher pour rentrer en contact avec le directeur du circuit de l'époque, un certain Toto Roche. Raymond 'Toto' Roche leur donna rendez-vous dans un hôtel, le contrat fut signé et les compères se rendirent sur place pour louer le circuit de Reims lors du Grand Prix de l'ACF 1966.

Mais cette année-là, Steve McQueen était aussi en tournage en Indochine pour le film "La Canonnière du Yang-Tse" et l'acteur attrapa une fièvre qui l'immobilisa plusieurs mois. Entre temps, John Frankenheimer avait débuté le tournage de son film... "Grand Prix" !

Gérard Crombac fut d'ailleurs sollicité sur ce film à l'initiative de Bernard Cahier qui conseilla le réalisateur de confier les rôles des journalistes et des photographes à de vrais professionnels car il savaient où se placer sur les circuits... et puis en étant logés gracieusement dans les meilleurs hôtels, il était peu probable que ces dernières plumes n'écrivent de mauvaises critiques sur le film !

Quand Steve McQueen se remit de sa terrible fièvre, "Grand Prix" avait alors plusieurs longueurs d'avance sur son film sur la F1, le projet fut abandonné... il avait toutefois décidé du titre : "Day of the Champions".

De la F1 aux 24 Heures du Mans

Deux ans plus tard, lors du pesage des 24 Heures du Mans, Gérard Crombac rencontra Bob Relyea (le producteur) qui lui révéla que le projet était relancé : "Nous reprenons le projet, mais cette fois-ci, ce sera sur les 24 Heures du Mans".

Et à nouveau, notre journaliste suisse fut missionné d'établir le contact avec l'ACO et le directeur de la production, Hubert Froelich (il ne parlait pas français), et Gérard 'Jabby' Crombac de révéler qu'il n'était pas facile d'obtenir quelque chose de la part des Manceaux... (tiens donc...).

Avant de s'attaquer aux 24 Heures du Mans que Steve McQueen voulait disputer, Jabby fut chargé d'inscrire l'acteur aux 12 Heures de Sebring sur une Porsche louée. Le manager choisi n'était autre que l'ami de Crombac, Andrew Ferguson (ancien Team Manager de Lotus) et le copilote qui allait assister McQueen était Peter Revson, sorti d'une pseudo retraite. Mais quand tout ce petit monde arriva à Sebring en mars 1970, la surprise fut de voir Steve McQueen avec le pied dans le plâtre. L'acteur avait fait une chute à moto, rien qui n'empêcha McQueen de prendre le départ !

Et les deux comparses allaient réaliser une prestation exceptionnelle en se positionnant comme les futurs vainqueurs... ce qui agaça profondément Mario Andretti. Le pilote américain (aux origines italiennes) accompagné des deux pilotes italiens Ignazio Giunti et Nino Vaccarella sur la Ferrari 512S allait faire son maximum pour remonter sur la Porsche et s'imposer à la toute fin de la course. Plus tard, le cas s'aggrava pour Steve McQueen lorsque les assurances lui annoncèrent leur interdiction de rouler pour les 24 Heures du Mans.

Steve McQueen interdit des 24 Heures du Mans

Steve McQueen voulait disputer initialement les 24 Heures du Mans, Crombac fut investi d'une nouvelle mission auprès des scénaristes qui se succédèrent pour arranger le scénario, ce qui créa le point faible du film. La narration ne plaisait pas au réalisateur ou à McQueen quand ce n'était pas la production qui jugeait le film trop coûteux...

Le film connaîtra même un point mort lorsque John Sturges sortit du projet. Il fut remplacé deux semaines plus tard par Lee H. Katzin. La suite est connue de tous, le film sortira en 1971 mais ne rencontrera pas le succès escompté, les dépenses du film furent en partie amorties par le marché japonais.