Outre son talent, le quadruple Champion du Monde de F1, Sebastian Vettel, ne s'est pas constitué le même palmarès d'amitié envers ses congénères ! Mais au-delà de tous les records de précocité qu'il s'adjugeait en son temps, l'homme a mûri, le pilote s'est forgé une carapace et un mental d'acier, il arbore et construit un nouveau pan de son histoire. Une renaissance chez Ferrari !

On ne présente plus l'homme qui a affolé les tablettes historiques de la F1, de son arrivée remarquée (et programmée) chez BMW-Sauber lors de ce Grand Prix d'Indianapolis en 2007 en remplacement du blessé et titulaire de l'époque, Robert Kubica (gravement accidenté au Grand Prix du Canada de 2007), le jeune prodige allemand réalisait déjà l'exploit de mener à bien sa prestation et de marquer son premier point (avec une huitième place à l'arrivée) dès son premier engagement en F1. L'Histoire était déjà en marche !

Vettel, en un coup gagnant !

Promu par BMW dans les catégories de promotion en monoplaces, mais toujours couvé par Red Bull qui le materne depuis ses débuts en karting, il aura l'opportunité de remplacer Scott Speed chez Toro Rosso dès la course en Hongrie. Là, sa carrière s'accélère avec une prestation de choix au Grand Prix du Japon à Fuji sous la pluie (terminée sous régime de voiture de sécurité en percutant Webber à bord de la Red Bull), il réitérera l'exploit une semaine plus tard en Chine à Shanghai en s'adjugeant la quatrième place sous des conditions tout aussi dantesques !

Nous connaissons la suite avec sa première victoire, là également, sous la pluie à Monza chez Toro Rosso en 2008, puis s'en suivront des débuts prometteurs avec Red Bull l'année suivante, jusqu'aux quatre sacres consécutifs de 2010 à 2013. Trustant les premières places des podiums et des championnats, l'aura de succès du pilote allemand ne saurait durer, la F1 étant comme chaque compétition de haut niveau, cyclique et imprévisible. Vettel se sentant déjà menacé, avec les nouvelles réglementations techniques de la saison 2014 (le passage du V8 Atmosphérique aux blocs V6 Turbo-Hybrides), il envoyait déjà des messages de remerciements à ses troupes fin 2013, au Grand Prix du Brésil, leur demandant d'apprécier le moment présent, craignant que celui-ci ne durerait peut-être pas !

Il avait doublement raison ! Non seulement ces moments de liesse cumulés furent un lointain souvenir durant l'exercice 2014, dont il se fera damner le pion aux victoires par le récent promu et non moins sympathique et souriant, Daniel Ricciardo, mais au-delà, le quadruple lauréat connaîtra désormais les foudres des médias et de son ex-coéquipier (Mark Webber). En effet, les vainqueurs en domination totale ne perdurent pas en adulation auprès du public. Après l'admiration et la béatitude du talent reconnu, vient l'heure du lynchage médiatique et en place publique à la moindre anicroche ou attitude dérangeante pour une écurie en proie aux doutes ! La F1 et les sports de haut-niveau sont ainsi faits. Si vous dominez de la tête et des épaules, vous devenez l'homme à abattre, médiatiquement et sportivement !

Vettel, acte 2 : l'admiration.

Loin d'être anecdotique, le retour en grâce de Vettel est bien entendu dû à son changement d'écurie (et quelle écurie...), mais ce simple transfert ne peut pas tout justifier ! Certains pilotes ont effectué le même parcours, avec bien moins d'entrain ou de réussite ! Pourquoi Vettel est-il différent ?

C'est lors du Grand Prix du Japon, à Suzuka, lors du week-end des 3, 4 et 5 Octobre 2014 que Vettel annonce son départ de la structure Red Bull Racing ! Un pavé dans la marre jeté comme pour marquer une rupture franche à la fin d'une épopée glorieuse avec son écurie d'alors, celle qui lui a donné ses lettres de noblesse ! Si l'histoire prend fin avec les hommes de Milton Keynes, chapeautés par Christian Horner, la destination future ne fait quasiment aucun mystère, même si les intéressés ne font aucune déclaration. Il faudra attendre le dernier meeting de la saison 2014, à Abou Dabi, le 20 novembre pour que l'officialisation du transfert chez Ferrari soit annoncé.

C'est fait, le rêve de gosse du petit blondinet tombé en admiration de son idole déjà pensionnaire de la Scuderia Ferrari, allias Michael Schumacher, réalise à son tour l'exploit d'entrer dans la Légende des pilotes devenus un jour, un homme en rouge. Et ce rouge, il compte bien l'endosser le plus tôt possible, comme pour marquer son attachement et son assiduité au défi qui l'attend. Mais son ex-employeur Red Bull ne lui rendra pas la tâche facile en ne l'autorisant pas à réaliser les essais privés d'après meeting d'Abou Dabi au lendemain de la fin du championnat. Il n'en fallait pas moins pour Vettel de poser ses valises pour l'hiver à Marenello pour prendre place dans une monoplace datée de 2012 pour effectuer son premier décrassage !

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Certes, c'est un rêve éveillé que Vettel s'apprête à vivre, mais la Ferrari dans laquelle il a souhaité poser son séant pour quelques trois années de contrat, n'est pas la Rossa flamboyante d'autrefois. En effet, la dernière victoire d'une monoplace rouge date du Grand Prix d'Espagne, le 12 Mai 2013. Une éternité pour une écurie de renom, la dernière pole position remonte, elle, au Grand Prix d'Allemagne, le 22 Juillet 2012, là aussi, un siècle d'absence pour des pilotes auréolés de titres mondiaux !
Quant aux derniers sacres pilotes et constructeurs, il faut remonter encore plus loin. Le dernier pilote Ferrari vainqueur d'un championnat en combinaison rouge est Kimi Räikkönen en 2007, quant à la dernière création de Maranello qui effrayait ses concurrentes, c'était la F2008 pilotée par Felipe Massa et Kimi Räikkönen en 2008.

C'est donc un nouveau chapitre qui doit s'écrire chez Ferrari, car l'expérience de la venue de Fernando Alonso n'aura pas permis de concrétiser ces efforts au-delà de quelques victoires sporadiques. Tout a changé à Maranello ou presque, de l'exécutif aux ingénieurs, en passant par les mécaniciens et pilotes, un grand ménage a été fait ! Ce qui n'a pas fonctionné ne saurait perdurer semble dire la nouvelle communication du Cheval Cabré. Les cloches doivent à nouveau retentir à Maranello, comme après chaque victoires acquises sur les circuits de part le monde.

A la tête et la Présidence de Ferrari, Sergio Marchionne vient en remplacement le 13 Octobre 2014 de Luca Di Montezemolo, et dans le rôle du Directeur d'écurie Maurico Arrivabene prend le relais de Marco Mattiacci, lui-même ayant effectué une période intérimaire après le limogeage de Stefano Domenicali. Le Directeur Technique est James Allison en provenance de chez Lotus, les pilotes essayeurs sont les récents laissés pour compte de la F1, Estéban Gutiérrez et Jean-Éric Vergne.

Maranello, me voilà !

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Sebastian Vettel va donc pouvoir exposer un peu plus un talent caché du parfait communicant, facétieux et du pilote toujours disponible pour les médias. Un pilote moins distant, de part la traversée du désert qu'il a subi une année seulement chez Red Bull, mais suffisante pour que désormais il s'attire la sympathie et la convoitise des médias. Il va en jouer, en surjouer, mais toujours à bon escient. Le nouveau Vettel est présent, sous vos yeux admiratifs, voire interloqués !

Qui ne s'est pas surpris à redécouvrir le Champion allemand sous un jour différent qu'il l'avait connu auparavant ? Qui n'a pas pesté sur ce pilote agaçant de talent, qui avait trusté 9 victoires consécutives à la fin de la saison 2013, au point de falsifier l'attrait et le challenge de la F1 ?

Comme Michael Schumacher en son temps, lors de son retour à la compétition chez Mercedes en 2010, après une demi-retraite de 2007 à 2009, le septuple champion du monde enregistrait plus de complaisance que lors de ses dernières années à Maranello. Beaucoup d'entre nous souhaitions même une victoire ou quelques podiums pour clore définitivement une carrière bien remplie d'un pilote hors normes. Certains voyaient déjà la barre symbolique des 100 victoires atteinte, il n'en sera rien, une simple pole position au Grand Prix de Monaco en 2012 comme seul lot de consolation (non comptabilisée pour une pénalité réglementaire), et un podium pour le Grand Prix d'Europe à Valence, la même année.

Dès les premiers tours de roues en essais privés, Vettel comme à l'accoutumé passe beaucoup de temps avec ses ingénieurs, allant les considérer comme des membres de sa propre famille (le même fonctionnement que son idole Schumacher, qui connaissait par cœur les dates d'anniversaire de ses mécaniciens). Sa présence, son savoir-faire, sa connaissance de la F1 est une source intarissable de motivation pour les ingénieurs et mécaniciens de la Scuderia, c'est certainement cet élément qui manquait ces derniers temps !

Nous attendions Vettel au sommet de son art, avec une monture lui permettant d'exceller, tout en considérant l'écart en performances à combler avec leurs concurrents directs, mais c'est bien le personnage public qui nous aura le plus ébloui. Le couple Arrivabene / Vettel fonctionne à merveille, et bien au delà d'une période d'acclimatation nécessaire à toute nouvelle association. Ça colle parfaitement au renouveau de Ferrari, les bases sont solides et prompt à rétablir la Scuderia sur la voie du succès. Certains y entrevoient déjà le nouveau tandem Todt / Schumacher.

Ce n'est pas totalement faux, les hommes aux postes clés ont été soigneusement choisi, en fonction des disponibilités sur le marché (des ingénieurs en fin de contrat), la marge de progression établie semble accessible, chacun en début de saison envisageait des ambitions honnêtes. Pour Vettel, il fallait redevenir le Petit Prince ambitieux de la F1, pour Arrivabene, il fallait que Ferrari fasse rêver à nouveau. Ils ne vont pas attendre longtemps pour remplir ce contrat. Dès la première course, Vettel s'octroie une troisième place, et un premier podium avec sa nouvelle écurie de sang !

Mais ce que l'on retiendra en dehors de la performance un cran au-dessus de la morne saison précédente des rouges, c'est le nouveau statut de leader communiquant de Vettel, qui n'a pas hésité à titiller la langue de bois des pilotes Mercedes qui essayaient de minimiser leur avance, comme pour entretenir un mince espoirs à leurs rivaux de les battre. Une communication par l'humilité frelatée qui n'a pas fait mouche auprès du pilote Ferrari, qui les a repris du revers par la moquerie ! Point gagnant pour Vettel.

Et comme l'ogre Mercedes se voyait déjà trop beau, trop gros pour garder en respect le reste du plateau, Vettel allait asseoir la maîtrise de sa nouvelle politique de l'image du pilote dévoué aux siens par une victoire au Grand Prix de Malaisie. Une victoire précoce qui allait en surprendre plus d'un, chez la concurrence, mais également dans les rangs de la Scuderia Ferrari. Une première part du contrat était remplie, Arrivabene en prédicateur d'espoirs, voit cette saison couronnée de succès et d'objectifs remplis si la Rossa parvient à signer 2 ou 3 victoires !

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N'ayant pas perdu son coup de volant, le pilote allemand conserve ses atouts et ses faiblesses ! Mais Vettel s'applique à donner le meilleur de lui-même pour Ferrari, et continue à insuffler cette nouvelle vague positive qui déroule sur Maranello. Bien aidé par un coéquipier (Räikkönen) servant lui aussi les intérêts communs, au détriment de sa carrière touchant à sa fin, Vettel se joue à merveille de l'attention que les médias portent à leur égard tout au long de la saison.
Additionnant les piques envers les pilotes Mercedes lors des conférences de presse pilotes, ou encore en dédicaçant une émouvante victoire pour Bianchi (récemment disparu au mois de Juillet 2015) lorsque Vettel s'impose au Grand Prix de Hongrie, l'homme au doigt levé sur les podiums maîtrise parfaitement une saison pleine d'espérances !

De son implication auprès de Ferrari, à ses participations aux journées de promotion des Ferrari, des messages remerciant ses ingénieurs ou en leur souhaitant un bon anniversaire en pleine séance d'essais libres à Abou Dabi, ce sont toutes ces attentions et actions qui cimentent la bonne cohésion du groupe et la réussite future de ce mariage.
Vettel n'a pas hésité une seule seconde à apprendre et à parfaire son accent italien pour s'exprimer le plus possible dans la langue de Maranello. Quant à Arrivabene, dont on avait aperçu en lui un personnage haut en couleur et ouvert au public lorsqu'il allait s'asseoir en tribune aux essais hivernaux, il ne tarit pas de mimiques ou de manifestations de joie pour attirer les caméras sur lui, quand les choses fonctionnent, il faut aussi communiquer dessus et s'attirer la curiosité des médias. Le contrat est rempli pour le Chef d'équipe.

Ce faisant, Vettel s'est offert une bonhomie toute retrouvée cette saison, comme lavé de tout soupçons d'arrogance, de suffisance et de pilote parvenu et parachuté sur 4 titres mondiaux glanés par la seule dominance du châssis créé par Adrian Newey !
Non, n'en déplaisent à certains, les Champions du Monde de F1 ne le sont pas par hasard, encore moins par la seule force d'une monoplace ! Nombreux sont les exemples dans l'Histoire de la F1 où la meilleure des monoplaces n'a pas forcément sacré un pilote, non moins méritant, mais dont l'alchimie n'a pas fonctionné !
Etre au bon endroit au bon moment ne fait pas tout non plus, certains pilotes peuvent tout autant en témoigner ! Certains pilotes sont de la trempe des champions derrière un volant, et ils le prouvent en collectionnant les victoires et les titres.

Il faut néanmoins faire la part des choses, il y a le pilote d'un coté, et le personnage public d'un autre coté, exposé aux médias qu'ils sont par essence et par obligation. La maîtrise de ces deux facettes échappent à certains, c'est ce qui contribue le temps s'égrainant à ce que l'on en oublie certains, alors que d'autres nous marquent à jamais pour leurs bonnes actions réalisées. Vettel est de ceux-là, il a formidablement opéré un changement d'attitude qui l'honore au rangs des inoubliables !