Encore privé de toute concurrence en course, Nico Rosberg s’est tranquillement adjugé le Grand Prix de Russie, quatrième rendez-vous de la saison 2016 de Formule 1. Vainqueur pour la 18ème fois de sa carrière, l’Allemand devance au terme d’un nouveau cavalier seul l’autre Mercedes de Lewis Hamilton et la Ferrari rescapée de Kimi Räikkönen.

Trahi par sa mécanique l’an dernier sur ce même tracé de Sotchi alors qu’il menait solidement la course, Nico Rosberg a en l’espace de six mois vu la réussite totalement basculer en sa faveur. Plus souvent victime des rares avaries techniques de sa flèche d’argent que son coéquipier Lewis Hamilton en 2015, l’Allemand est depuis l’entame de la saison à Melbourne complètement épargné par les ennuis quand dans le même temps le triple champion les accumule les uns derrières les autres. Une nouvelle fois trahi par son MGU-H lors de la séance qualificative, il avait déjà connu le même problème lors des précédentes qualifications en Chine, l’Anglais n’a pas été beaucoup plus en réussite ce dimanche puisque un problème de pression d’eau est venu contrarier ses ambitions de victoire.

Revenu du diable vauvert après s’être élancé depuis la 10ème place sur la grille et avoir échappé à l’ouragan Kvyat au départ, Hamilton a vu sa W07 le trahir au plus mauvais moment alors qu’il avait réussi à combler une bonne partie de son retard sur son voisin de garage pour recoller à un peu plus de sept secondes au terme d’une brillante remontée. Contraint, sous les recommandations de ses ingénieurs, de ralentir sensiblement sa cadence à partir du 37ème tour afin de faire redescendre la température de son groupe propulseur, le triple champion du monde met par la même occasion fin à tout suspense pour la victoire, Rosberg n’ayant, cela devient une habitude cette saison, plus de rival à sa mesure. Imperturbable jusqu’au drapeau à damier en dépit d’une alerte moteur finalement sans conséquence, le natif de Wiesbaden conquiert avec aisance son 7ème succès consécutif, le 18ème de sa carrière en Formule 1.

Hamilton poissard.

« Ce week-end a été incroyable, confie à l’arrivée le vice-champion du monde 2015. La voiture a merveilleusement bien fonctionné aussi bien en qualification qu’en course. J’ai continué à attaquer quand Lewis s’est rapproché afin de garder ma concentration et de prendre du plaisir en pilotant. J’ai surveillé les écarts jusqu’au bout au cas où. Ce nouveau doublé est une excellente nouvelle pour l’équipe. 43 points c’est une belle avance, mais il est encore trop tôt dans la saison pour désigner un quelconque favori. Lewis va revenir, car il est plus motivé que jamais. » S’ils s’apparentent plus à une volonté de se décharger de toute pression inutile dans une course au titre qui n’a jamais semblé autant lui sourire, les mots de Rosberg révèlent pourtant la crainte que lui inspire celui qui domine la catégorie reine depuis deux ans.

Étrangement inoffensif il y a deux semaines en Chine, Hamilton a retrouvé toute sa hargne à Sotchi et devrait rapidement proposer une toute autre opposition au leader du championnat. Car après avoir signé sans concurrence la 24ème pole position de sa carrière la veille, le fils de Keke s’est une nouvelle fois promené dans le parc olympique de Sotchi. Crédité d’une très bonne mise en action, Rosberg n’a pas laissé à quiconque le loisir de virer en tête au premier virage. Propulsé en première ligne par la pénalité infligée à la Ferrari de Sebastian Vettel, Valtteri Bottas a pâti de son emplacement sur la grille, le Finlandais s’élançant du côté sale de la piste, et n’est ainsi pas parvenu à troubler les plans de l’homme fort de ce début d’année. Dépassé par son compatriote Kimi Räikkönen à l’amorce du virage 2, le pilote Williams a en revanche évité le chaos provoqué par la Red Bull d’un Daniil Kvyat quelque peu kamikaze sur le coup.

L’ire de Vettel.

Sans doute remonté après sa qualification en demi-teinte, le Russe manque totalement son freinage et vient une première fois toucher la monoplace de son prédécesseur dans l’écurie autrichienne avant la première chicane. Toujours blotti dans l’aileron arrière du quadruple champion du monde, le natif d’Oufa ne prête pas attention au ralentissement du paquet devant lui et s’empale une deuxième fois dans la Ferrari de Vettel, envoyant « Baby-Schumi » se fracasser dans les barrières techpro là même où Romain Grosjean avait explosé sa Lotus l’an dernier en course. « Ce genre d’incidents arrive, mais là quelque chose ne va pas avec Kvyat, analyse froidement le fer de lance de la Scuderia. Je n’ai rien contre lui, je pense simplement qu’il a commis une erreur il y a deux semaines et aujourd’hui tout le monde a bien vu ce qu’il s’est passé. »

Privé de l’un de ses principaux protagonistes dès le troisième virage, ce Grand Prix perd également Nico Hulkenberg et Rio Haryanto dans l’agitation du départ, les deux hommes étant victime du freinage suicidaire du toujours aussi peu fiable Esteban Gutierrez. Grands gagnants de ce premier tour chaotique Fernando Alonso et Romain ont magnifiquement fait parler leur expérience pour émerger respectivement en 7ème et 8ème position. Passé lui aussi entre les gouttes de la tornade Kvyat, même s’il a dû pour cela généreusement couper le virage 3, Hamilton pointe déjà en 5ème position et peut alors rêver à une potentielle première victoire en 2016. Le Britannique s’y emploi dès la relance, subtilisant au prix d’un freinage parfait la 4ème place à Felipe Massa. Galvanisé par son retour précoce vers le sommet de la hiérarchie, le pilote flanqué du numéro 44 dispose trois boucles plus tard de la Ferrari de Räikkönen.

Photo : Getty

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Doublé McLaren dans les points.

Sanctionné à juste titre d’un stop and go de dix secondes pour l’ensemble de son œuvre, Kvyat plonge dans les bas fonds du classement tout comme son coéquipier Daniel Ricciardo autre victime collatérale du départ. Ressorti de son arrêt anticipé avec des pneus mediums et un nouvel aileron avant, l’Australien ne réussira pourtant jamais à combler le trop important retard accumulé dans les premiers tours. Loin de toutes ces préoccupations, Rosberg caracole toujours en tête, l’Allemand possède près de dix secondes d’avance sur Bottas au 15ème tour, tandis que l’autre représentant de la firme à l’étoile butte irrémédiablement sur le Finlandais. La première valse des changements de gommes permet toutefois à Hamilton de prendre l’ascendant sur le champion 2011 de GP3. On croit alors se diriger vers une lutte au sommet palpitante entre les deux coqs de chez Mercedes. L’énième problème mécanique rencontré par l’Anglais viendra hélas jeter un froid sur cette troisième manche à 16 tours de l’arrivée.

Gelées à l’avant de la course, les positions ne cessent en revanche d’évoluer au milieu du peloton. En difficulté avec des gommes médiums à l’agonie, Ricciardo s’offre pour seul lot de consolation une somptueuse passe d’armes avec Kevin Magnussen au 29ème passage dont il sortira néanmoins perdant. Opportuniste, Romain Grosjean profite de ce mano-à-mano pour grimper lui aussi d’un rang. Le Français ne lâchera plus le pilote Renault jusqu’au drapeau à damier et terminera, malgré la pression de Sergio Perez en fin de course, à une très belle 8ème place. Propulsé en 6ème position par l’abandon de Max Verstappen au 33ème tour, Fernando Alonso se montrera tout aussi irréprochable, l’Espagnol décrochant au passage ses huit premiers points en 2016. Et comme un bonheur ne vient jamais seul, Jenson Button offre à McLaren une unité supplémentaire au classement constructeur, le champion du monde 2009 arrachant à la force du poignet la 10ème place à la Toro Rosso de Carlos Sainz.

Photo : Getty

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Classement de la course :
1. N. Rosberg (Mercedes) Vainqueur des 53 tours en 1h32'41"997 (moyenne en 200,48 km/h)
2. L. Hamilton (Mercedes) +25"022
3. K. Räikkönen (Ferrari) +31"998
4. V. Bottas (Williams) +50"217
5. F. Massa (Williams) +74"427
6. F. Alonso (McLaren) + 1 tour
7. K. Magnussen (Renault) + 1 tour
8. R. Grosjean (Haas) + 1 tour
9. S. Pérez (Force India) + 1 tour
10. J. Button (McLaren) + 1 tour
11. D. Ricciardo (Red Bull) + 1 tour
12. C. Sainz (Toro Rosso) + 1 tour
13. J. Palmer (Renault) + 1 tour
14. M. Ericsson (Sauber) + 1 tour
15. D. Kvyat (Red Bull) + 1 tour
16. F. Nasr (Sauber) + 1 tour
17. E. Gutiérrez (Haas) + 1 tour
18. P. Wehrlein (Manor) + 2 tours
Abandons
M. Verstappen (Toro Rosso) Moteur Tour 33
S. Vettel (Ferrari) Accrochage Tour 0
N. Hülkenberg (Force India) Accrochage Tour 0
R. Harayanto (Manor) Accrochage Tour 0
Meilleur Tour : N. Rosberg (Mercedes) 1'39"094 tour 52 (pneus Soft)