C'est dans une interview exclusive accordée au site de la F1, que Laurent Rossi s'est exprimé sur l'échec des négociations avec leur espoir de l'Alpine Academy, Oscar Piastri, ainsi que l'annonce surprise du départ de Fernando Alonso.

Début août, l'annonce a été reçue telle une (mauvaise) surprise pour Alpine F1 Team, l'Espagnol Fernando Alonso décide de rejoindre Aston Martin dès 2023. Le baquet laissé vacant devant revenir de facto au troisième pilote et pensionnaire de l'Alpine Academy : Oscar Piastri. Mais en coulisses le jeune australien avait déjà signé chez McLaren.

Rossi explique le départ d'Alonso

Chez Alpine, les discussions autour du contrat de Fernando Alonso ont principalement échoué à cause de la durée du contrat et de la préférence à demi-affichée pour Oscar Piastri. Piqué au vif, l'Espagnol est allé voir ailleurs si l'herbe n'était pas plus verte... certainement que si, chez Aston Martin !

"Nous voulions qu'il continue avec nous en tant que pilote d'endurance et/ou au Dakar", déclare Laurent Rossi au site de la F1. "Nous en avons longuement parlé l'année dernière. Pourquoi ne lui avons-nous proposé que deux ans ? Nous n'avions que deux ans d'option avec Oscar. Fernando avait le désir de conduire plus longtemps en F1, ce que nous ne pouvions pas faire, sinon nous aurions perdu Oscar. Cela n'avait pas de sens pour nous. Il est plus que probable que nous ne pouvions pas répondre aux autres conditions qui étaient proposées."

"Donc, avec Fernando, nous aurions aimé continuer. C'est un champion extraordinaire, il restera une légende de notre marque mais ça n'a pas marché et c'est la vie. Nous resterons en bons termes. C'est un champion exceptionnel, c'est un gentleman, il continue à faire un travail fantastique pour nous, même s'il a signé pour Aston Martin l'année prochaine. Nous sommes tristes de nous séparer mais nous restons une famille. C'est la vie. C'est un coup dur de perdre un champion, mais ça arrive. Les saisons des transferts, c'est souvent comme ça."

Portrait de Fernando Alonso en conférence pilote

© Getty Images / Fernando Alonso

Le couac Oscar Piastri

Rossi affirme qu'Alpine s'était engagée, dans un document intitulé "Head of Terms", à former Piastri de manière intensive "puis à l'envoyer piloter avec une autre équipe" pendant qu'ils faisaient courir Alonso pendant au moins une (voire deux saisons) avant de le titulariser.

"Nous avons respecté notre engagement envers Oscar très rapidement, puisque nous avons exercé notre option le 15 novembre, en convenant des conditions générales qui stipulaient qu'il serait conservé. Il bénéficiera d'un programme d'entraînement intensif, entre autres de 5 000 km de roulage pendant l'année, et nous lui trouverons une place de pilote pour les années 2023 et 2024", a déclaré Rossi.

"C'est ce que nous avons fait. Nous l'avons annoncé comme réserviste dès le lendemain. Nous avons très rapidement élaboré un programme d'entraînement et un programme d'essais de 5 000 km, qui a débuté en février aux côtés de Fernando Alonso et d'Esteban Ocon, c'est un programme d'entraînement sérieux. Vous roulez avec deux pilotes de F1, vous allez apprendre d'eux."

"Il a parcouru 3 700 km en août. Nous aurions facilement obtenu les 5 000 km. Nous lui avons donné un accès complet à l'équipe, aux débriefings, aux réunions techniques et il était avec moi la plupart des dimanches à observer la course. Non seulement il était un pilote réserviste, mais il aurait été le débutant le mieux formé de tous les temps. Il savait comment l'équipe fonctionnait, comment un pilote de F1 est censé fonctionner dans l'équipe. Nous avons le sentiment d'avoir tenu parole. Nous nous sommes surpassés."

"Nous avons engagé une personne juste pour lui trouver une place (dans une autre équipe), parce que nous voulions faire ça correctement. À la fin du mois d'avril, nous lui avons trouvé une place chez Williams."

Piastri a décidé de chercher ailleurs...

Dès lors que Piastri a compris qu'il ne serait pas titulaire chez Alpine en 2023, voire même uniquement qu'à partir de 2025, il a commencé à chercher ailleurs, et le précontrat avec McLaren fut signé début juin, son contrat définitif le 4 juillet.

"Lorsque l'opportunité Williams était sur le point de se transformer en un accord concret, à tel point que le moulage du baquet était programmé, l'équipe de management de Piastri a dit 'nous avons une opportunité possible chez McLaren'", raconte Laurent Rossi. "C'était un peu décevant. Nous avons senti que c'était un peu étrange, parce que nous nous attendions à un peu plus de loyauté compte tenu de tout ce que nous avons investi. Il n'a pas dit qu'il allait partir, il a dit qu'il avait une opportunité."

"Ensuite, nous avons vu en juillet, le 6 je crois (NDLR : le 13 juillet en fait), que Daniel Ricciardo confirmait qu'il restait impliqué pour l'année suivante. Nous avons donc pensé qu'il y avait de l'intérêt, mais qu'il n'y aurait peut-être même pas de place. Il y avait peut-être une opportunité chez McLaren, mais la porte se fermait sans doute, donc Oscar était toujours possible pour nous. Cela explique pourquoi nous avons décidé de le promouvoir. Il était réserviste et nous l'avons promu pilote titulaire."

"Otmar Szafnauer l'a vu, lui a dit, et nous l'avons annoncé. Nous n'avons jamais su avec certitude qu'il avait signé. Il ne nous l'a jamais dit. Nous pensions toujours que le volant chez Williams était une bonne place, une bonne opportunité d'apprendre avec un peu moins de pression, une très bonne équipe pour apprendre, très expérimentée, capable de faire grandir des talents comme George Russell."

Portrait de Oscar Piastri dans le paddock

© Getty Images / Oscar Piastri

Les erreurs commises par Alpine

Le Conseil de reconnaissance des contrats (CRB) a déterminé que le seul contrat valide de Piastri était avec McLaren, et non avec Alpine, ouvrant la voie à l'Australien pour rejoindre Lando Norris la saison prochaine. En fin de compte, tout s'est joué sur le fait que Piastri n'a jamais signé de document légal le liant à Alpine.

"Il n'a jamais signé les contrats que nous lui avons proposés", dit Rossi. "Nous avons proposé des contrats à plusieurs reprises. Ils n'ont jamais été signés. Nous ne pouvions pas le retenir parce qu'il n'avait pas signé de contrat avec nous. Nous attendions plus de loyauté."

Rossi admet que des erreurs ont été commises par son équipe et que, dans une certaine mesure, Alpine a fait preuve d'une certaine naïveté dans sa façon de gérer la situation. Cependant, il pense qu'ils ont agi de bonne foi tout au long du processus.

"Nous avons fait quelques erreurs techniques légales", dit-il. "Nous avons laissé la porte entrouverte en ne le forçant pas à entrer avec un contrat consolidé afin qu'il ne puisse plus bouger. Pourquoi avons-nous fait cela ? C'est un peu un oubli parce que nous n'avons jamais pensé que lorsque vous donnez autant à quelqu'un, lorsque vous lui donnez une formation, un rôle de réserve, un volant dans une équipe partenaire, il ne le reniera pas après avoir été soutenu pendant tant d'années et avoir gagné le championnat grâce à votre soutien."

"Comme George Russell avant lui, qui est allé chez Williams avant de revenir chez Mercedes, comme Charles Leclerc qui est allé chez Sauber avant de revenir chez Ferrari, comme Max Verstappen et comme Sebastian Vettel, qui ont tous deux couru pour Toro Rosso avant de piloter pour Red Bull, ils ont tous fait une équipe "junior" avant d'atteindre le but."

"Je suis un peu surpris qu'Oscar ait pensé que d'abord, il était meilleur que Williams. Je peux comprendre que, d'un point de vue sportif, McLaren puisse être plus intéressant que Williams sur la base des résultats sur piste, mais nous ne nous attendions pas à ce qu'après tant de soutien, tant de loyauté, ils utilisent cette porte dérobée pour faire du shopping et obtenir ce qui semblait être un meilleur contrat pour eux. Ce ne sont pas les valeurs que nous avons affichées."

"C'est ainsi que je vois l'histoire. Bien sûr, nous avons fait des erreurs, sinon nous ne serions pas ici à parler de ce sujet, mais nous pensons être restés très fidèles à notre engagement, à nos valeurs et à ce que nous avons dit à Oscar."

"Mais je dirais que les choses arrivent pour une raison. Nous ne partageons pas les mêmes conceptions des choses, et peut-être pas les mêmes valeurs, donc c'est peut-être mieux ainsi, de se séparer."