Le président de l'Automobile Club de l'Ouest, Pierre Fillon, explique dans cette interview, le travail mené avec tous les organisateurs et acteurs du sport pour limiter les effets de la crise due à la pandémie de Coronavirus.

Il annonce l'absence de Journée Test en 2020 pour les 24 Heures du Mans et souligne les aménagements de calendrier et d'organisation au sein de l'ACO.

"Entre organisateurs, nous devons faire preuve de solidarité"

Chaque journée qui passe a son lot d’annonces de modification de calendriers, de report, d’annulation de vos événements. Aujourd'hui, vous annoncez l'absence de la Journée Test des 24 Heures du Mans 2020. Qu'est ce qui a motivé cette décision ?
Pierre Fillon : Effectivement, en 2020, il n'y aura pas de Journée Test pour les 24 Heures du Mans (autos). Il s'agit d'un problème pratique et de sollicitation des équipes. Comme annoncé récemment, les 24 Heures du Mans ont été reportées les 19 et 20 septembre. Traditionnellement la Journée Test, qui je le rappelle n'a pas toujours existé ou eu lieu (*) quand elle a été mise en place de façon plus systématique, se tient deux semaines avant l'épreuve.

Nous aurions du envisager d'organiser cette Journée, importante certes pour les équipes et très exigeante en organisation, une semaine après les 24 Heures Motos, qui se dérouleront elles, les 29 et 30 août. Tenir ces deux événements majeurs, les 24 Heures Motos et les 24 Heures du Mans en trois semaines, demandaient un réaménagement des priorités en organisation. Nous avons donc opté pour l'annulation cette année, de la Journée Test.
Nous reprogrammerons le déroulé des essais durant la semaine des 24 Heures, afin de disposer de temps de roulage pour les débutants comme pour les nouvelles machines. Nous vous donnerons plus de détails dans la première semaine d'avril.

Calendrier provisoire des 24 Heures du Mans 2020

  • 13 et 14 septembre : Vérifications administratives et techniques (lieu à confirmer)
  • 16 et 17 septembre : Essais libres et qualificatifs
  • 19 et 20 septembre : Course
  • 21 septembre : Vérifications techniques d'après course

Si tous ces reports d'épreuves, ces reprogrammations de saisons, comme pour l'European Le Mans Series ou le Championnat du Monde d'Endurance de la FIA, ces interrogations encore sur les 24 Heures Camions ou Karting sont parfaitement compréhensibles. N'est-ce pas pour autant pénalisant pour les concurrents, les spectateurs, les prestataires ?
Pierre Fillon : La situation est exceptionnelle. Et, à situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle. Oui notre calendrier est bouleversé, mais comment pourrait-il en être autrement. Nous devons anticiper, le mieux possible, car force est de reconnaître que durant plusieurs semaines à venir, il ne peut pas être envisagé d'organiser des événements. Ce serait être naïf, au mieux, ou inconscient, que de ne pas comprendre cela, ou ne pas vouloir le comprendre et maintenir coûte que coûte des événements qui seront alors de facto, annulés avec les conséquences que cela implique.

Dans la mesure du possible, nous reportons nos événements, nous l'annonçons suffisamment à l'avance pour que chacun (concurrent, spectateur, équipe d'organisation, partenaire, prestataire, équipe de secours….) puisse s'organiser. Pour les motos, nous l'avions fait en avance, à une période où les reports n'étaient pas aussi légion. Vu la densité du calendrier de septembre, octobre, nous avons reprogrammé ce report, suite au déplacement des 24 Heures, mais aussi par rapport à d'autres événements sportifs, à notre faculté pour organiser ces deux événements phares dans ce laps de temps.

Cela peut ressembler à un domino, de l'extérieur, mais en concertation avec la FIA, la FIM, la FFSA, la FFM, nous construisons plutôt un puzzle stratégique pour les calendriers de sports mécaniques, le plus solide possible et le moins pénalisant pour les différents acteurs.
Reporter permet de garantir les commandes auprès des prestataires, alors oui, on ajuste parfois, mais c'est tout de même nettement moins arbitraire et douloureux que d'annuler purement et simplement. Quelques modifications sont plus souhaitables si au final l'événement se déroule. Et ces modifications concernent des événements qui vont se jouer dans 5 mois.

Il faut se rendre compte que ce nouveau calendrier concerne tous les événements sportifs, culturels, institutionnels en France et à l'international, sur une période de 3 mois pour les reprogrammer. Cela fait donc le sujet de nombreuses réunions car entre organisateurs, nous devons faire preuve de solidarité.

Vous dites que vous travaillez en concertation avec les différents acteurs, pourtant la reprogrammation des 24 Heures Motos semblait délicate pour le Bol d’Or ?
Pierre Fillon : Très clairement, avec les organisateurs du Bol d'Or et les fédérations, nous avons mené plusieurs échanges par téléphone, nous nous sommes rencontrés à Paris aussi lors d'une réunion. Nous avons envisagé en toute transparence différents scenari.
Dans un premier temps, l’option début septembre n’était pas optimale pour le Bol d’Or. Finalement la reprogrammation fin août laisse plus de lest aux organisateurs du Bol d’Or qui nous l’ont confirmé lors de nos échanges. Les 24 Heures Motos ponctueront la saison 2019-2020 et trois semaines après se déroulera le Bol d’Or. Cela étant, il est certain que nous nous retrouvons tous dans une situation extraordinaire, et chacun y met du sien.

En septembre 2020, vous allez vous retrouver en concurrence avec nombre d'événements, n'avez-vous pas des craintes sur la billetterie ? 
Pierre Fillon : Il ne faut pas se voiler la face, les mois de septembre, octobre, novembre seront chargés. Mais en juin d'ordinaire, notamment pour les 24 Heures du Mans, il y a aussi souvent pléthore d'événements et pas des moindres : Roland Garros en tennis, les Coupes du Monde de foot ou les euros de foot parfois, des finales de basket, des GP de F1… donc en billetterie, nous sommes déjà en frontal en juin. En septembre, nous le serons sans doute, mais ce sera bon signe, cela voudra dire que les gens auront à choisir entre différentes activités, à l'extérieur, comme avant.

De plus, concernant la billetterie, à nous aussi de mettre en place des systèmes attractifs et adaptés à ce genre de situation: des reports, un public et un pouvoir d'achat différent, de nouvelles envies. Pour d'autres raisons, en 1968, les 24 Heures s'étaient déroulées en septembre. Devant 300 000 spectateurs. Nous ferons au mieux, pour satisfaire nos spectateurs, nos concurrents, nos prestataires, nos partenaires. C'est un travail d'équipe.

Comment travaillez-vous pour établir ces nouveaux calendriers ? 
Pierre Fillon : C'est un travail collectif avec les concurrents, les partenaires, les fédérations, les circuits pour nos événements internationaux, les organisateurs, les promoteurs, le ministère des sports, les autres disciplines sportives, les télévisions...; Cela dépasse largement le cadre des circuits du Mans et uniquement les sports mécaniques.
Une cellule est dédiée à cette élaboration, d'autant plus compliquée qu'il s'agit de réfléchir à un calendrier sur quelques mois et non pas une année, comme nous avons coutume de le faire d'ordinaire. Chaque jour, nous mettons à jour, reconsidérons la situation suivant l'évolution sanitaire, les directives mises en place, dans les différents pays, car il ne faut pas oublier que nous voyageons avec nos championnats mais que nos concurrents viennent d'autres pays que la France. Ils doivent pouvoir participer à nos épreuves.

Que fait l'ACO durant cette période delicate ?
Pierre Fillon : L'ACO planifie, replanifie son planning prévu initialement. Nos salariés réadaptent leurs missions, anticipent ce qu'ils peuvent encore faire, mais bien évidemment nous avons modifié notre déroulé de saison.

L'ACO est un club qui a toujours défendu la mobilité pour tous. C'est une de ses fonctions et valeurs premières. Nous nous sommes mis à disposition de la préfecture pour toute aide à envisager. Le préfet sait qu'il peut nous solliciter dans la mesure des besoins.

D’autre part, nous avons transféré bien normalement tout le matériel médical de réanimation dont nous disposons au circuit, au centre hospitalier du Mans. Il s'agit d'appareils respiratoires, de matériel de monitoring...Tout matériel supplémentaire n’est pas de trop pour eux. Cela nous parait évident de pouvoir soulager les efforts des services médicaux. Nos équipes médicales, qui oeuvrent d'ordinaire sur le circuit, se battent aujourd'hui dans leurs établissements respectifs; je pense à eux et tiens à souligner leur sérieux, leur implication sans faille.

Communiqué de presse