La F1 et ses bolides, ses circuits mythiques, son ambiance, le circus qu'elle représente mais aussi son attrait financier. Si le sport est actuellement décrié par les fans, il reste une valeur de placement sûre. Riche d’un chiffre d’affaires de 1 120 millions d’euros en 2014, le bénéfice après impôts de la F1 avoisine les 90 millions d’euros. Si bien que, de tels chiffres attirent les investisseurs désireux d’investir dans le sport.

En 2005, le CVC Capital Partners investit massivement dans la F1. Le fonds d’investissement via sa société Alpha Prema rachète dans un premier temps les 46,65% que détient la banque allemande BayernLB dans SLEC Holdings, qui détient les droits de la F1, pour une valeur de 678 millions d’euros. Dans un même temps, Bernie Ecclestone via son « family trust » Bambino Holdings vend sa participation d’une hauteur de 25% de SLEC à Alpha Prema, estimée à 363 millions d’euros.

Cette dernière détient alors 71,65% de SLEC et 100% des droits de vote. Le restant est détenu à parts égales par les banques JP Morgan et Lehman Brothers. Cela ne restera pas ainsi longtemps puisque qu’en décembre 2005, le CVC Capital Partners via Alpha Prema rachète la participation de JP Morgan et la participation de Lehman Brothers en mars 2006. Le montant global de la transaction est estimé à 1,72 milliards d’euros financé à l’aide de deux prêts (un prêt de 807 millions d’euros auprès d’un fonds d’investissement et 920 millions d’euros en prêt auprès de RBS).

FOM

Comme vous pouvez le voir sur le schéma ci-dessus, Alpha Prema, qui détient 100% de SLEC Holdings, qui détient la FOA, société exploitant la F1, est détenue par d’autres sociétés dont la finalité est Delta Topco. Cette société n’est pas détenue à 100% par le CVC Capital Partners. Ce dernier, actionnaire majoritaire tout de même de cette société, ne détient que 63,3% des parts. Le restant est réparti comme suit :
- LBI Group Inc (une société de Lehman Brothers) détient 15,3%.
- Bambino Holdings (une société de la famille Ecclestone) détient 8,5%.
- Bernie Ecclestone détient 5,3%.
- JP Morgan Whitefriars Inc est propriétaire de 3%
- Churchill Capital Ltd détient 0,7%
- le reste est réparti entre les salariés ou dirigeants de la manière suivante : Patrick McNally (1%), Duncan Llowarch et Sacha Woodward Hill (chacun 0,8%), Judith Griggs (0,5%) et Peter Brabeck-Letmathe et Sir Martin Sorrell (chacun 0,25%).

En 2012, le CVC Capital Partners vend 21% de sa participation à trois groupes financiers composés de BlackRock, Waddell & Reed et Norges Bank Investment Management pour une valeur de 1,23 milliards d’euros. Sa participation passe à 42%. Waddell & Reed décide dans le même temps de mettre 378 millions d’euros en plus pour prendre 6,5% supplémentaire. Avec cette vente, le CVC Capital Partners reste le principal actionnaire de Delta Topco avec une participation de 35,5%, Waddell & Reed devient le deuxième plus gros actionnaire avec 21%, Norges Bank Investment Management prend 4% et BlackRock 3%. Le reste ne change pas.

Cependant, la participation du CVC est limitée dans le temps, si l’on en croit les révélations du Daily Telegraph. Dans un premier temps, le fonds a cherché à vendre sa participation lors de l’introduction à la bourse de Singapour en 2012 mais celle-ci a été avortée à la suite de la situation économique mondiale. Aussi, selon le journal anglais, le CVC dispose d’une deadline pour céder ses parts, qui est fixée au 29 juillet 2015 (avec trois extensions d’un an possible décidé avec le consentement des autres investisseurs). Cependant, Bernie Ecclestone déclare dans Forbes que le CVC n’a pas de date limite pour vendre sa participation.

Plusieurs candidats pour la F1

Plusieurs candidats se sont faits connaître directement ou indirectement. Le premier d’entre eux a été Bernie Ecclestone lui-même. Si ses déclarations sont confuses, il regarde de près ce qu’il s’y passe et n’oublions pas qu’il est employé par Donald MacKenzie, co-propriétaire du CVC Capital Partners.

Disney

L’histoire entre « Mickey » et la F1 ne date pas d’aujourd’hui. En 1995, la FOCA, ancienne FOM, signe un accord mondial de trois ans avec Specialised Licensing Services pour la vente de produits sous licence.
Cette société n’est autre qu’une filiale de Walt Disney. À ce moment précis, la F1 ne génère qu’un chiffre d’affaires d’un peu moins de 104 millions d’euros, loin du montant qu’on connaît aujourd’hui. L’année suivante, une F1 tourne dans le célèbre parc Disneyland Paris. C’est Damon Hill, champion du monde cette année-là, sur sa Williams-Renault.

En 2006, Michael Schumacher prête sa voix aux personnages de Cars, une production des studios Disney et Pixar avant que Fernando Alonso et Lewis Hamilton ne fassent de même dans Cars 2. Si le premier film n’a attiré dans les salles obscures que 2,08 millions de personnes, la franchise a rapporté dans le monde entier près d’un milliard de Dollars de chiffres d’affaires. Aussi, les produits dérivés (voitures, livres, magazines, jeux vidéos…) ont rapporté plus de 8 milliards de dollars en 8 ans.

Aussi, Disney a été au cœur d’un projet pour un Grand Prix de France. En 2008, plusieurs projets s’opposent pour faire revenir la course sur le sol français. Parmi eux, il y a le Val de France, Magny-Cours, Flins et Disney – Val d’Europe.
Le circuit, prévu près de Santa Fe, Sequoia Lodge et Newport Bay Club, est soutenu par Lagardère Sports. Nicolas Deschaux, président de la FFSA, déclarait que le seul projet à pouvoir être mis en place en 2010 n’était autre que le projet Disney.
Si des élus et une association se montrent opposés, le projet Disney – Val d’Europe dispose d’un soutien de poids dans le monde de la F1 : Bernie Ecclestone himself ! Finalement, courant 2008, le projet est abandonné, faute de soutien du Gouvernement français.

ESPN, un détail important

En 2010, Corporate Strategy, Business Development et Technology Group procèdent à une analyse approfondie de la F1. Ce groupe travaille sur la stratégie d’entreprise, les alliances stratégiques, développement des affaires de l’entreprise, la gestion de la propriété intellectuelle et, surtout, les fusions et acquisitions, agissant comme un consultant interne de Disney. Si bien qu’en avril 2011, le journal britannique Sunday Times indique dans un article que l’un des prétendants pour la prise d’une participation ne serait autre que Walt Disney, propriétaire d’ESPN.

Ce détail semble intéressant pour ESPN. En effet, la chaîne présente aux États-Unis et dans de nombreux pays, pourrait profiter de cette acquisition pour avoir un sport attractif sur sa grille, ce qui pourrait renforcer son audience et offrir aussi une plus grande visibilité à la F1 au pays de l’Oncle Sam où la série tente de gagner du terrain sur la NASCAR.

Si Walt Disney est connu pour ses films, il est aussi connu pour ses parcs d’attractions. Souvenez-vous de ce projet en 2005, le F1-X Theme Park. Union Properties, une société de développement immobilier basée à proximité de Dubaï, obtient les droits pour construire une série de parcs à thème sur la F1. Le premier projet prévu à Dubaï est pharamineux, s’étendant sur 277 km² ! Le projet sera finalement abandonné quelques temps après malgré le début des travaux.

Du côté financier, Walt Disney a enregistré au 28 septembre 2013 un chiffre d’affaires de 45 milliards de Dollars, avec un bénéfice net de 6,6 milliards. Sa trésorerie en banque est estimée à 3,9 milliards, ce qui est suffisant pour racheter les 35% du CVC dans Delta Topco, société mère de la F1, valorisés à environ 2,4 milliards d’euros.

Mais ce scénario n’est pour le moment qu’une solution sur papier, rien de concret.

John Malone et Liberty Media

Le deuxième a été John Malone, à la tête de Liberty Media spécialisée dans la télévision par câble, qui a voulu acheter une grande participation minoritaire de la F1 avec l’aide de Liberty Global, leader mondial de la télévision par câble et satellite américain, Discovery Communications, un groupe de télévision américain comprenant Discovery Channel ou encore OWN (chaîne d’Oprah Winfrey). En effet, l’homme d’affaires souhaitait prendre 49% de la F1, 35% du CVC et 14% d’autres investisseurs. Les discussions ont échoué et John Malone s’est tourné vers la Formule E où il a pris une importante participation (on parle d’un investissement de 50 millions d’euros).

Red Bull

Autre piste lancée par Bernie Ecclestone lui-même n’est autre de Dietrich Mateschitz, le big boss de Red Bull. Outre le rachat des 35% du CVC, il pourrait aussi via sa société sponsoriser le championnat, à la manière de Verizon avec l’IndyCar. Mais pour cela, le géant de la boisson énergétique doit vendre ses deux équipes présentes en F1, valorisées à 590 millions d’euros pour Red Bull et 138 millions pour Toro Rosso.

La valorisation des parts du CVC est estimée à 2,4 milliards d’euros, soit un tiers de la fortune de Dietrich Mateschitz, ce qui ne poserait aucun problème. Si les rumeurs et les phrases lancées à la presse indiquent qu’on va vers cette tendance, rien n’est fait pour le moment.

Stephen Ross et le Qatar

Parmi les investisseurs connus, nous avons Stephen Ross, propriétaire des Dolphins de Miami et dont la fortune atteint 5,4 milliards d’euros, via sa société RSE Ventures, et soutenu par Qatar Sport Investments, propriétaire de l’équipe de football Paris Saint-Germain et actionnaire à hauteur de 17% de Volkswagen.

L’équipe souhaite investir entre 6,2 et 7,1 milliards d’euros dans la F1. Avec cette somme, elle rachèterait les parts du CVC mais aussi celle de Bernie Ecclestone, soit la prise d’une participation de 40,8%.
Le CVC déclare ne pas avoir reçu d’offre de la part du duo pour le moment. Cet investissement de la part du Qatar va crescendo avec son intention d’accueillir un Grand Prix dans les deux-trois ans à venir, un projet estimé à 715 millions d’euros selon Forbes.

Sky

Autre investisseur potentiellement intéressé, le groupe Sky. Diffuseur de la F1 dans quatre pays (Italie, Allemagne, Royaume-Uni et Nouvelle Zélande). Le groupe serait prêt à investir 6,3 milliards d’euros pour racheter les parts du CVC Capital Partners et peut-être les parts de Bernie Ecclestone, tout comme le duo Ross-Qatar souhaite le faire.

En regardant de plus près les candidats, si le duo Stephen Ross-Qatar semble être la meilleure solution d’un point de vue économique et implantation, avec la possibilité d’entrer dans le marché américain, la solution Dietrich Mateschitz semble la plus viable pour le moment de par sa connaissance du sport en général (Red Bull est sponsor en F1 depuis 20 ans), son implication et l’aspect sponsoring non négligeable. Cependant, rien n’est joué, d'autant que le CVC affirme ne pas vouloir vendre...

Au sommet de la F1, la bataille fait rage pour le Trône d'Argent…