Après les dernières 24 Heures du Mans 2019, Ford s'est retiré de son programme Endurance. Désormais, la firme américaine n'est engagée dans aucun des championnats chapeautés par la FIA, pourquoi ?
Aujourd'hui, pour trouver Ford engagé officiellement dans un championnat il faut se tourner outre Atlantique où ils sont bien présents en IMSA et en NASCAR. Si celui de la NASCAR est une fourniture moteur pour certains écuries, la firme américaine y affronte Chevrolet et Toyota. En IMSA, les Ford GT roulent en GTLM, mais l'engagement prend fin à l'issue du championnat 2019... un programme en DPi pourrait voir le jour en 2020.
Ford au haut niveau du sport automobile
Ford est revenu aux 24 Heures du Mans en 2016 pour réaliser l'exploit de s'y imposer (en catégorie GTE-Pro) 50 ans après leur première victoire ! Initialement engagé pour deux ans, le projet fut doublé pour deux années supplémentaires. La Ford GT fut l'incarnation de la renaissance de la gloire d'antan alors même que le projet initial était d'y engager... des Ford Mustang !
Dans le monde du rallyes, Ford est une institution, elle est l'une des équipes ayant la plus grande expérience. La discipline a même contribué aux succès de certains modèles, la Cortina Lotus puis par la suite, l'Escort. Mais la direction de Ford décide d'arrêter les frais à l'issue de la saison 2012, c'est la structure de Malcolm Wilson (M-Sport) qui engagera les Ford Fiesta WRC en Mondial des Rallyes.
Évidemment, on ne peut pas oublier le prestige de Ford (Ford-Cosworth) en Formule 1, qui reste l'un des motoristes les plus victorieux dans la catégorie reine des monoplaces. Avec un total de 38 saisons (1967-2004), 567 Grands Prix, 176 victoires et 10 titres mondiaux, la F1 doit beaucoup à Ford !
Après le retrait total de Ford, Cosworth perdura en F1 mais errera dans le ventre mou de la F1, voire les fonds des classements avec pour lot de consolation une seule pole position de Nico Hülkenberg sur la Williams en 2010 au Brésil et un meilleur tour en course en 2006 à Bahreïn (encore Williams) pour le premier Grand Prix de Nico Rosberg. La dernière apparition de Cosworth sera le Brésil 2013 avec les Marussia de Jules Bianchi et Max Chilton.
Pourquoi Ford a déserté les championnats FIA ?
Il y a plusieurs raisons qui ont conduit le constructeur à l'ovale bleu à déserter les championnats mondiaux, on va en retenir deux et d'une évidence certaine. Le premier facteur est le coût d'engagement d'un constructeur dans un championnat pour à terme s'imposer et ne pas se cantonner à faire de la figuration.
En F1, par exemple, Mercedes qui a racheté la structure de Ross Brawn (BrawnGP) a dépensé plus d'un milliard d'euros entre 2010 et 2013 pour avoir une monoplace compétitive dès 2014 avec les nouvelles unités de puissance V6 Turbo Hybride. Aujourd'hui, les écuries Mercedes et Ferrari dépensent environ 400 à 425 millions d'euros par an pour rester au sommet de la hiérarchie.
Et quand bien même, le constructeur disposerait de ressources financières suffisantes, il faut aussi avoir les bonnes personnes aux bons départements et au bon moment. Toyota pourra en attester, en disposant d'un des meilleurs budgets en F1 pendant près de 8 saisons, la firme nippone n'a pas réussi à décrocher la moindre victoire...
Dans le championnat FIA WEC, le Toyota Gazoo Racing dépense environ 40 millions d'euros par saison (ce qui est bien mieux maîtrisé dans la course effrénée que menait Audi face à Porsche avec ses 200 millions dépensés par saison). Cela représente des sommes assez conséquentes et avec une tendance à la hausse quand le budget du constructeur aux anneaux était de 60 millions d'euros pour 2012.
En WRC, les budgets sont moindres, mais non négligeables pour un constructeur, Peugeot et Citroën disposaient d'une enveloppe globale de 80 millions d'euros en 2012 pour le rallye. En fonction des commanditaires (TOTAL), Citroën disposait d'un budget de 35 millions à l'année.
Alors que l'image et la notoriété à acquérir intéresserait n'importe quelle firme, le second facteur en prendre en compte est la technologie employée qui doit correspondre aux positionnements des constructeurs en fonction des marchés qu'ils visent.
Prenons l'exemple des retraits d'Audi, Volkswagen et Peugeot en WRX (Championnat du Monde de Rallycross) dont l'arrivée de l'électrique fut repoussé et initialement prévue en 2020. Peugeot qui prit la succession du Team Hansen début 2018 a annoncé son retrait à la fin de la même année car le timing de l'introduction de l'électrique ne correspondait plus aux attentes des nouveaux produits de la firme de Sochaux (Peugeot 208 électrique). Pour information, le championnat WRX a reporté l'introduction des voitures électriques à... 2021 !
L'hybridation et l'électrique, ce qui manque à Ford !
Ford a accumulé un certain retard dans le domaine de la mobilité électrique et ne peut communiquer sur ses produits tant que leur offre est famélique. Aujourd'hui, seule la Mondeo est disponible en version hybride en France, insuffisant pour permettre une exposition médiatique et un intérêt aux championnats qui mettent cette technologie en valeur.
Au niveau mondial, l'ovale bleu a scellé un partenariat technique avec Volkswagen pour mettre en commun leur savoir-faire et pour le premier cité de disposer de la plateforme électrique du géant allemand pour diffuser des modèles à grand volume. L'accord passé en début d'année représente un investissement entre 10 et 20 milliards de dollars sur 6 ans et qui dépendra également des accords en cours de négociation pour un second modèle dépendant de la technologie de Volkswagen.
Ainsi, il n'est pas étonnant de constater l'absence de Ford dans les championnats qui promeuvent l'hybridation ou l'électrique. La F1 dispose d'un V6 1,6 Turbo Hybride qui développe 1 000 ch, Ford y est absent. En FIA WEC, la catégorie reine LMP1 dispose d'une hybridation (nécessaire pour gagner), Toyota en fait ses choux gras !
En WRC, l'hybridation arrive pour 2022, Ford n'y prévoit pas de programme officiel, même si les Fiesta WRC de M-Sport arpentent les terres à travers le monde, Ford devrait y garder un œil. A ce titre, M-Sport a essuyé plusieurs refus de la part de Ford pour aider au financement de leur saison.
Quant à la Formule E, le championnat 100% électrique des monoplaces, cela représente une vitrine exceptionnelle pour les constructeurs qui ne s'y trompent pas. Tous ceux ayant une gamme de véhicules électriques y sont présents.
Et cette Saison 6 2019/2020 en Formule E fait le plein du côté des allemands, on pourrait y voir un plateau des 24 Heures du Mans d'il y a 20 ans : Audi, BMW, Mercedes, Porsche, Jaguar, Nissan vont se livrer bataille, DS et NIO sont aussi des constructeurs, le reste des équipes étant clientes des motoristes.
Pour toutes ces raisons, Ford n'a plus de programme officiel au sein des championnats FIA, l'heure des nouveaux règlements a sonné en WRC (2022), F1 (2021), WEC (2020/2021) et WRX (2021), il est urgent de patienter pour Ford avant de choisir par quelle fenêtre l'ovale bleu décidera de revenir...